Vu la requête, enregistrée le 18 novembre 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la SOCIETE VALDIS, dont le siège social est chemin de la Chuque à Saint Hilaire-de-Petitville (50500), représentée par son président en exercice, et par la SOCIETE PEVILDIS, dont le siège social est chemin de la Chuque à Saint Hilaire-de-Petitville (50500), représentée par son président en exercice ; la SOCIETE VALDIS et autre demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision n° 923 T du 28 septembre 2011 par laquelle la Commission nationale d'aménagement commercial a accordé à la société Majedis l'autorisation préalable requise en vue de l'extension de 600 m² d'un supermarché " Super U " de 1 800 m², portant sa surface de vente totale à 2 400 m² à Bricquebec (Manche) ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat et de la société Majedis la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de commerce ;
Vu la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 ;
Vu la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 ;
Vu le décret n° 2008-1212 du 24 novembre 2008 ;
Vu le décret n° 2011-921 du 1er août 2011 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Maurice Méda, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Rémi Keller, rapporteur public ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la société Majedis ;
Sur la procédure suivie devant la Commission nationale d'aménagement commercial :
Considérant qu'aux termes du quatrième alinéa de l'article R. 752-51 du code de commerce : " (...) Le commissaire du gouvernement recueille les avis des ministres intéressés, qu'il présente à la commission. (...) " ; qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article R. 752-16 du même code : " (...) Pour les projets d'aménagement commercial, l'instruction des demandes est effectuée conjointement par les services territorialement compétents chargés du commerce ainsi que ceux chargés de l'urbanisme et de l'environnement. (...) " ;
Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que les ministres intéressés, au sens de l'article R. 752-51 du code de commerce, sont, soit ceux qui ont autorité sur les services chargés d'instruire les demandes, soit les ministres en charge du commerce, de l'urbanisme et de l'environnement ; que la circonstance que la décision attaquée ne mentionne pas les avis des ministres intéressés est dépourvue d'incidence sur la légalité de cette décision ; qu'en l'espèce, il ressort des pièces du dossier que les avis de ces ministres, qui sont signés par des personnes dûment habilitées à cet effet, ont bien été présentés à la commission ; que le moyen tiré de ce que l'avis d'autres ministres n'a pas été recueilli est inopérant ;
Sur la composition du dossier de demande :
Considérant qu'aux termes du II de l'article R. 752-7 du code de commerce : " La demande est également accompagnée d'une étude destinée à permettre à la commission d'apprécier les effets prévisibles du projet au regard des critères prévus par l'article L. 752-6. Celle-ci comporte les éléments permettant d'apprécier les effets du projet sur : (...) ; 2° Les flux de voitures particulières et de véhicules de livraison ainsi que sur les accès sécurisés à la voie publique ; (...) 4° Les consommations énergétiques et la pollution ; 5° Les paysages et les écosystèmes. " ; que si les requérantes soutiennent que le dossier de demande serait incomplet s'agissant de l'impact du projet sur les flux de véhicules et sur l'environnement, il ressort des pièces du dossier que le dossier de demande d'autorisation comportait des informations suffisantes en la matière pour permettre à la commission nationale d'apprécier la conformité du projet aux objectifs fixés par le législateur ;
Sur l'appréciation de la commission nationale :
Considérant qu'il appartient aux commissions d'aménagement commercial, lorsqu'elles se prononcent sur un projet d'exploitation commerciale soumis à autorisation en application de l'article L. 752-1 du code de commerce, d'apprécier la conformité de ce projet aux objectifs prévus à l'article 1er de la loi du 27 décembre 1973 et à l'article L. 750-1 du code de commerce, au vu des critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752-6 du même code ; que l'autorisation ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet compromet la réalisation de ces objectifs ;
Considérant que les requérantes soutiennent que la décision attaquée serait illégale en raison de la localisation du projet en dehors d'une zone urbanisée et de ses conditions d'accès par les transports collectifs, les pistes cyclables et les piétons ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que le projet se situe à proximité d'habitations et que des cheminements particuliers permettent d'assurer l'accès sécurisé du site aux piétons ; que si le magasin n'est pas desservi par les réseaux de transport en commun et par les pistes cyclables, cette circonstance ne justifie pas, compte tenu notamment de l'impact limité du projet sur les flux de circulation, le refus de l'autorisation sollicitée ;
Considérant que les requérantes soutiennent que la décision attaquée aurait méconnu l'objectif fixé par le législateur en matière de développement durable en raison de l'absence de dispositifs prévus par le pétitionnaire pour permettre de réduire l'impact du projet sur l'environnement ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que des dispositifs permettant de réduire les consommations énergétiques et les pollutions ont été mis en oeuvre pour l'exploitation de la surface de vente existante et bénéficieront au projet d'extension ; que des aménagements supplémentaires pour la récupération des eaux de pluie et l'insertion paysagère du site seront réalisés ;
Sur la compatibilité du projet avec le schéma de cohérence territoriale du pays du Cotentin :
Considérant qu'en vertu de l'article L. 122-1 du code de l'urbanisme, les autorisations délivrées par la Commission nationale d'aménagement commercial doivent être compatibles avec les schémas de cohérence territoriale ; que les requérantes soutiennent que la décision attaquée ne serait pas compatible avec le schéma de cohérence territoriale du pays du Cotentin qui prévoit que les accès aux surfaces commerciales seront facilités pour les cyclistes et les piétons par la réalisation de liaisons fonctionnelles adaptées ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier, comme il a été dit ci-dessus, que l'accès au site par les piétons est assuré ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'utilisation par les cyclistes des voies routières desservant le magasin mettrait en cause leur sécurité ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompatibilité du projet contesté avec le schéma de cohérence territoriale du pays du Cotentin doit être écarté ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE VALDIS et autre ne sont pas fondées à demander l'annulation de la décision attaquée ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société Majedis, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demandent la SOCIETE VALDIS et autre au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de chacune des requérantes le versement de la somme de 2 500 euros à la société Majedis ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de la SOCIETE VALDIS et de la SOCIETE PEVILDIS est rejetée.
Article 2 : La SOCIETE VALDIS et la SOCIETE PEVILDIS verseront chacune à la société Majedis la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE VALDIS, à la SOCIETE PEVILDIS, à la société Majedis et à la Commission nationale d'aménagement commercial.