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20/06/2012 | FRANCE | N°342666

France | France, Conseil d'État, 3ème et 8ème sous-sections réunies, 20 juin 2012, 342666


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 23 août et 23 novembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE DIJON, représentée par son maire ; la COMMUNE DE DIJON demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 09LY02945 du 24 juin 2010 en tant que, par cet arrêt, la cour administrative d'appel de Lyon, statuant sur renvoi après cassation par le Conseil d'Etat de son arrêt n° 06LY00137 du 23 septembre 2008, a rejeté l'appel qu'elle a formé contre le jugement n° 0400208 du 13 octobre 2005 par leque

l le tribunal administratif de Dijon l'a condamnée à verser à l'associat...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 23 août et 23 novembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE DIJON, représentée par son maire ; la COMMUNE DE DIJON demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 09LY02945 du 24 juin 2010 en tant que, par cet arrêt, la cour administrative d'appel de Lyon, statuant sur renvoi après cassation par le Conseil d'Etat de son arrêt n° 06LY00137 du 23 septembre 2008, a rejeté l'appel qu'elle a formé contre le jugement n° 0400208 du 13 octobre 2005 par lequel le tribunal administratif de Dijon l'a condamnée à verser à l'association d'éducation populaire " Centre universitaire catholique de Bourgogne " la somme de 174 052,89 euros en réparation du préjudice que celle-ci estimait avoir subi ;

2°) réglant l'affaire au fond dans cette mesure, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'association d'éducation populaire " Centre universitaire catholique de Bourgogne " la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Eglises et de l'Etat ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Romain Victor, Maître des Requêtes en service extraordinaire,

- les observations de la SCP Defrenois, Levis, avocat de la COMMUNE DE DIJON et de la SCP Baraduc, Duhamel, avocat de l'association d'éducation populaire " Centre universitaire catholique de Bourgogne ",

- les conclusions de Mme Emmanuelle Cortot-Boucher, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Defrenois, Levis, avocat de la COMMUNE DE DIJON et à la SCP Baraduc, Duhamel, avocat de l'association d'éducation populaire " Centre universitaire catholique de Bourgogne " ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par une délibération de son conseil municipal du 15 novembre 1999, la COMMUNE DE DIJON a accordé à l'association d'éducation populaire " Centre universitaire catholique de Bourgogne " une subvention d'un million de francs affectée au financement des travaux de délocalisation et d'extension des locaux de cet établissement d'enseignement supérieur ; que, par un jugement du 19 octobre 2000, le tribunal administratif de Dijon a annulé cette délibération au motif que la note explicative de synthèse prévue par les dispositions du premier alinéa de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales n'avait pas été remise aux membres du conseil municipal ; que cette annulation est devenue définitive après que la cour administrative d'appel de Lyon a, par un arrêt du 24 décembre 2002, pris acte du désistement de la COMMUNE DE DIJON de l'appel qu'elle avait formé contre ce jugement ; que, par une requête enregistrée le 3 février 2004, l'association a saisi le tribunal administratif de Dijon de conclusions tendant à ce que la COMMUNE DE DIJON soit condamnée à lui verser la somme de 219 860 euros en réparation du préjudice subi du fait de l'obligation dans laquelle elle s'est trouvée de rembourser la subvention qui lui avait été versée ; que, par un jugement du 13 octobre 2005, le tribunal administratif de Dijon a condamné la commune à verser à l'association, en réparation de son préjudice, la somme de 174 052,89 euros incluant, d'une part, le montant de la subvention litigieuse et, d'autre part, des frais financiers liés au reversement de la subvention ; que, par un arrêt du 23 septembre 2008, la cour administrative d'appel de Lyon a annulé ce jugement ; que, toutefois, par un arrêt du 16 novembre 2009, le Conseil d'Etat a annulé son arrêt et lui a renvoyé l'affaire ; que la COMMUNE DE DIJON se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 24 juin 2010 en tant qu'il rejette l'appel qu'elle a interjeté du jugement du 13 octobre 2005 du tribunal administratif de Dijon ;

Considérant, en premier lieu, qu'en jugeant, après avoir relevé que la subvention versée à l'association d'éducation populaire " Centre universitaire catholique de Bourgogne " avait exclusivement pour objet de contribuer au financement de l'extension de bâtiments destinés à l'enseignement supérieur, que la délibération du conseil municipal de Dijon du 15 novembre 1999 n'avait pas méconnu " le principe de laïcité de l'Etat et des collectivités publiques défini par la loi du 9 décembre 1905 ", alors même que cette association, sans constituer une association cultuelle au sens du titre IV de cette loi, aurait eu des activités cultuelles et que ses biens seraient, comme le soutient la commune, susceptibles, à terme, de devenir " la propriété de l'Eglise catholique ", la cour administrative d'appel de Lyon n'a pas commis d'erreur de droit ;

Considérant, en deuxième lieu, que le moyen tiré de ce que la cour aurait inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis en jugeant que la subvention litigieuse " n'était pas étrangère " à l'intérêt public local n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ;

Considérant, en troisième lieu, qu'en jugeant que la COMMUNE DE DIJON n'apportait " aucun commencement de démonstration " à l'appui de l'allégation selon laquelle les membres du conseil municipal auraient pu ne pas allouer la subvention litigieuse s'ils avaient reçu la note de synthèse prévue par l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales, la cour n'a pas dénaturé les faits du dossier qui lui était soumis ni commis d'erreur de droit ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'en jugeant, d'une part, après avoir successivement relevé qu'aucun principe ni aucune disposition ne faisaient obstacle à l'octroi de la subvention litigieuse, que la commune avait effectivement procédé au versement de la subvention à l'association, que celle-ci l'avait utilisée conformément à son objet, enfin que l'association avait dû rembourser la subvention et supporter des frais financiers à cette fin, que la perte par l'association de la subvention litigieuse résultait directement de la méconnaissance fautive, par la commune, des dispositions de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales et, d'autre part, qu'aucune imprudence imputable à l'association n'était susceptible d'atténuer la responsabilité de la commune, la cour, qui a porté sur les faits qui lui étaient soumis une appréciation souveraine exempte de dénaturation, n'a entaché son arrêt d'aucune erreur de qualification juridique ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'en déduisant de ces circonstances que le montant du préjudice réparable devait inclure le montant de la subvention et celui des intérêts versés par l'association au titre de l'emprunt souscrit pour son remboursement, la cour, qui a suffisamment motivé son arrêt, n'a commis aucune erreur de droit, alors même qu'elle n'a pas recherché si le financement accordé par la commune conditionnait en tout ou partie la réalisation du projet auquel il était affecté ni si l'association était tenue d'emprunter pour rembourser la subvention ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la COMMUNE DE DIJON n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la COMMUNE DE DIJON la somme de 3 000 euros à verser à l'association d'éducation populaire " Centre universitaire catholique de Bourgogne " au même titre ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de la COMMUNE DE DIJON est rejeté.

Article 2 : La COMMUNE DE DIJON versera la somme de 3 000 euros à l'association d'éducation populaire " Centre universitaire catholique de Bourgogne " au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DE DIJON et à l'association d'éducation populaire " Centre universitaire catholique de Bourgogne ".

Copie en sera adressée pour information au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 3ème et 8ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 342666
Date de la décision : 20/06/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

COLLECTIVITÉS TERRITORIALES - DISPOSITIONS GÉNÉRALES - DISPOSITIONS ÉCONOMIQUES - AIDES - ASSOCIATION AYANT DÛ REMBOURSER À UNE COMMUNE UNE SUBVENTION À LA SUITE DE L'ANNULATION DE LA DÉLIBÉRATION L'ACCORDANT POUR DÉFAUT D'INFORMATION PRÉALABLE DES MEMBRES DU CONSEIL MUNICIPAL - LIEN DIRECT ENTRE L'ILLÉGALITÉ COMMISE ET LE PRÉJUDICE RÉSULTANT POUR L'ASSOCIATION DE L'OBLIGATION DANS LAQUELLE ELLE S'EST TROUVÉE DE REMBOURSER LES SOMMES - EXISTENCE.

135-01-06-01 Commune ayant accordé une subvention à une association par une délibération annulée, pour défaut de communication aux membres du conseil municipal de la notice explicative requise, par un jugement de tribunal administratif devenu définitif après le désistement de son appel par la commune, en exécution duquel l'association a dû reverser la subvention.,,,Aucun principe ni aucune disposition ne faisant obstacle à l'octroi de la subvention litigieuse, que la commune avait effectivement versée à l'association, qui l'avait utilisée conformément aux fins prévues, la perte par l'association de la subvention litigieuse résulte directement de la méconnaissance fautive, par la commune, des dispositions de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales.

RESPONSABILITÉ DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - FAITS SUSCEPTIBLES OU NON D'OUVRIR UNE ACTION EN RESPONSABILITÉ - RESPONSABILITÉ ET ILLÉGALITÉ - ILLÉGALITÉ ENGAGEANT LA RESPONSABILITÉ DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - ASSOCIATION AYANT DÛ REMBOURSER À UNE COMMUNE UNE SUBVENTION À LA SUITE DE L'ANNULATION DE LA DÉLIBÉRATION L'ACCORDANT POUR DÉFAUT D'INFORMATION PRÉALABLE DES MEMBRES DU CONSEIL MUNICIPAL - LIEN DIRECT ENTRE L'ILLÉGALITÉ COMMISE ET LE PRÉJUDICE RÉSULTANT POUR L'ASSOCIATION DE L'OBLIGATION DANS LAQUELLE ELLE S'EST TROUVÉE DE REMBOURSER LES SOMMES - EXISTENCE.

60-01-04-01 Commune ayant accordé une subvention à une association par une délibération annulée, pour défaut de communication aux membres du conseil municipal de la notice explicative requise, par un jugement de tribunal administratif devenu définitif après le désistement de son appel par la commune, en exécution duquel l'association a dû reverser la subvention.,,,Aucun principe ni aucune disposition ne faisant obstacle à l'octroi de la subvention litigieuse, que la commune avait effectivement versée à l'association, qui l'avait utilisée conformément aux fins prévues, la perte par l'association de la subvention litigieuse résulte directement de la méconnaissance fautive, par la commune, des dispositions de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales.


Publications
Proposition de citation : CE, 20 jui. 2012, n° 342666
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Romain Victor
Avocat(s) : SCP DEFRENOIS, LEVIS ; SCP BARADUC, DUHAMEL

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2012:342666.20120620
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