Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 14 mars et 14 juin 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE LA PLAINE-DES-PALMISTES, représentée par son maire ; la COMMUNE DE LA PLAINE-DES-PALMISTES demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt n° 10BX00921 du 14 décembre 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement n° 0801601 du 26 novembre 2009 du tribunal administratif de Saint-Denis annulant le titre exécutoire d'un montant de 3 729 euros émis par le maire à l'encontre de M. A le 6 octobre 2008 et, d'autre part, au rejet de la demande de M. A ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande de M. A ;
3°) de mettre à la charge de M. A la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Agnès Martinel, Maître des Requêtes en service extraordinaire,
- les observations de la SCP Monod, Colin, avocat de la COMMUNE DE LA PLAINE DES PALMISTES et de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat M. Joël A,
- les conclusions de M. Vincent Daumas, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Monod, Colin, avocat de la COMMUNE DE LA PLAINE DES PALMISTES et à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat M. Joël A ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A a bénéficié en sa qualité de conseiller municipal de la commune de La Plaine-des-Palmistes, chargé des fonctions d'adjoint au maire, d'une majoration de 13,8 % de son indemnité mensuelle de fonction pendant toute la période courant du 17 mars 1989 au 16 juin 1995 ; que le maire nouvellement élu en 2008, estimant que les majorations perçues par l'intéressé, comme d'ailleurs d'autres membres du conseil municipal, étaient dépourvues de base légale, a émis le 6 octobre 2008 à l'encontre de M. A un titre de perception d'un montant de 3 729 euros en remboursement de ces versements ; que par un jugement du 26 novembre 2009, le tribunal administratif de Saint-Denis de La Réunion, faisant droit à la demande de M. A, a annulé ce titre de perception, estimant qu'il avait été émis en méconnaissance des règles applicables au retrait des actes illégaux créateurs de droit ; que son jugement a été confirmé par un arrêt du 14 décembre 2010 de la cour administrative d'appel de Bordeaux contre lequel la COMMUNE DE LA PLAINE-DES-PALMISTES se pourvoit en cassation ;
Considérant qu'une décision administrative accordant un avantage financier crée des droits au profit de son bénéficiaire alors même que l'administration avait l'obligation de refuser cet avantage ; que, sous réserve de dispositions législatives ou réglementaires contraires et hors le cas où il est satisfait à une demande du bénéficiaire, l'administration ne peut retirer une décision individuelle explicite créatrice de droits, si elle est illégale, que dans le délai de quatre mois suivant la prise de cette décision ; que, par ailleurs, un acte administratif obtenu par fraude ne crée pas de droits et, par suite, peut être abrogé ou retiré par l'autorité compétente pour le prendre, alors même que le délai de droit commun serait expiré ;
Considérant que dans son mémoire d'appel, la COMMUNE DE LA PLAINE-DES-PALMISTES soutenait que la perception par M. A de la majoration d'indemnité litigieuse résultait d'une situation de pur fait, en l'absence de toute décision formalisée du conseil municipal ayant prévu l'octroi de cet avantage et que l'absence de formalisation et de publicité avait eu pour objet de faire obstacle à ce que le préfet ou des membres du conseil municipal pussent en demander l'annulation au juge administratif ; qu'elle avait conclu ses développements sur l'illégalité et le caractère occulte de ces versements en soutenant que " si la cour jugeait que l'application de ces " indexations " constitue malgré tout une décision, mais non formalisée par écrit, elle devrait alors constater que ces décisions sont, tant sur la forme compte tenu des modalités de leur édiction, que sur le fond, étant donné l'irrégularité patente du dispositif et son aspect occulte, des décisions inexistantes ou obtenues par fraude qui n'ont pas pu valablement faire courir le délai de retrait de l'acte " ; que la cour ne s'est pas prononcée sur la question de savoir si, comme le soutenait la commune requérante, ces versements mensuels avaient été obtenus par fraude ; qu'en s'abstenant ainsi de répondre à cette argumentation qui n'était pas inopérante, elle a entaché son arrêt d'une insuffisance de motifs ; que la COMMUNE DE LA PLAINE-DES-PALMISTES est ainsi fondée à demander l'annulation de celui-ci, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de son pourvoi ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A la somme de 3 000 euros à verser à la COMMUNE DE LA PLAINE-DES-PALMISTES au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que ces mêmes dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la commune qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 14 décembre 2010 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Bordeaux.
Article 3 : M. A versera à la COMMUNE DE LA PLAINE-DES-PALMISTES une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions de M. A présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DE LA PLAINE-DES-PALMISTES et à M. Joël A.
Copie en sera adressée pour information au ministre de l'intérieur.