Vu le pourvoi du MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT, enregistré le 29 avril 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat ; le ministre demande au Conseil d'État d'annuler l'arrêt n° 08LY00451 du 2 mars 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon, faisant droit à l'appel formé par M. A... B...contre le jugement n° 0508439-0508440 du 18 décembre 2007 du tribunal administratif de Lyon en tant qu'il lui était défavorable, a réformé ce jugement et a déchargé M. B...des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 1998 à raison de l'imposition d'une plus-value de cession de parts sociales ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Romain Victor, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Odent, Poulet, avocat de M. A...B...,
- les conclusions de M. Edouard Geffray, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Odent, Poulet, avocat de M. B... ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'au cours de l'examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle, dont M. et Mme B...ont fait l'objet à compter du 20 juin 2000, le service vérificateur leur a adressé le 16 janvier 2001, sur le fondement des dispositions de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales, une demande de justifications portant sur l'origine et la nature de différents crédits bancaires ; qu'en réponse à cette demande et à la mise en demeure qui leur a été adressée par un courrier du vérificateur du 19 mars 2001, les époux B...ont justifié de certains crédits bancaires par un courrier du 24 avril 2001, dans lequel ils ont notamment indiqué que la remise à l'encaissement, le 19 janvier 1998, d'un chèque d'un montant de 868 000 francs correspondait au prix de cession des 124 parts sociales que Mme B... détenait dans le capital de la Sarl Sogifor ; que, par une lettre du 12 juin 2001, le vérificateur leur a notifié qu'il envisageait de procéder, d'une part, selon la procédure contradictoire, à un redressement correspondant au défaut de déclaration de la plus-value réalisée par Mme B...au cours de l'année 1998 et, d'autre part, à la taxation d'office des crédits bancaires demeurés injustifiés au titre des années 1998 et 1999 ; que, par un jugement du 18 décembre 2007, le tribunal administratif de Lyon a déchargé M. B...des seules cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales qui lui ont été assignées à raison de la taxation d'office de ses revenus d'origine indéterminée au titre des années 1998 et 1999 ; que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 2 mars 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon, faisant droit à l'appel formé par M. B...contre le jugement du tribunal administratif de Lyon en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande, a réformé ce jugement et prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. et Mme B... ont été assujettis au titre de l'année 1998 à raison de l'imposition de la plus-value de cession de parts sociales ;
Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales : " En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements. (...) / Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés (...). / Les demandes visées aux alinéas précédents doivent indiquer explicitement les points sur lesquels elles portent et mentionner à l'intéressé le délai de réponse dont il dispose en fonction des textes en vigueur " ; qu'aux termes de l'article L. 69 du même livre : " Sous réserve des dispositions particulières au mode de détermination des bénéfices industriels et commerciaux, des bénéfices agricoles et des bénéfices non commerciaux, sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article L. 16 " ;
Considérant, d'autre part, que le caractère contradictoire que doit revêtir l'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d'un contribuable au regard de l'impôt sur le revenu en vertu des articles L. 47 à L. 50 du livre des procédures fiscales, interdit au vérificateur d'adresser la notification de redressement qui, selon l'article L. 48 du même livre, marquera l'achèvement de son examen, sans avoir au préalable engagé un dialogue contradictoire avec le contribuable sur les points qu'il envisage de retenir ; qu'en outre, dans sa version applicable au litige, la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, rendue opposable à l'administration par l'article L. 10 du même livre prévoit que, dans le cadre de l'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle, le dialogue joue un rôle très important tout au long de la procédure ; qu'il ne résulte pas de ces dispositions que le vérificateur serait tenu, avant d'avoir recours à la procédure prévue par les dispositions précitées de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales, d'engager avec le contribuable un dialogue sur les discordances relevées par lui ;
Considérant qu'un contribuable n'est pas fondé à soutenir que la procédure d'imposition dont il a fait l'objet est entachée d'irrégularité, au seul motif que le dialogue qu'il a eu avec le vérificateur dans le cadre de l'examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle a eu lieu à l'occasion d'une demande de justifications ; que, dès lors, la cour a commis une erreur de droit en jugeant, après avoir relevé que le vérificateur avait, au cours de l'examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle, adressé à M. et Mme B...une demande de justifications suivie d'une mise en demeure, en réponse à laquelle ceux-ci ont notamment fait valoir que l'un des crédits bancaires sur lesquels ils étaient interrogés représentait le prix de cession de parts sociales ayant dégagé une plus-value qu'ils n'avaient pas déclarée, que la procédure d'imposition était irrégulière au seul motif que le dialogue contradictoire entre le vérificateur et les contribuables avait eu lieu à l'occasion de la procédure de demande de justifications ; que, par suite, et sans qu'il soit nécessaire d'examiner l'autre moyen du pourvoi, le ministre est fondé à demander pour ce motif l'annulation de l'arrêt attaqué ;
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une somme au titre des frais engagés par M. B...et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt du 2 mars 2010 de la cour administrative d'appel de Lyon est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Lyon.
Article 3 : Les conclusions de M. B...présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT, PORTE-PAROLE DU GOUVERNEMENT et à M. A...B....