Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 6 août et 3 novembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Renée A épouse B, demeurant ... ; Mme B demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement n° 0800344 du 3 juin 2010 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 23 novembre 2007 par laquelle le directeur général de la Caisse des dépôts et consignations, agissant en qualité de gestionnaire de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL), a rejeté sa demande de mise à la retraite avec jouissance immédiate de ses droits à pension à compter du 1er décembre 2007 ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat et de la Caisse des dépôts et consignations le versement de la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
Vu la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 ;
Vu le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Laure Bédier, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, avocat de Mme B et de la SCP Odent, Poulet, avocat de la Caisse des dépôts et consignations,
- les conclusions de Mme Claire Landais, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, avocat de Mme B et à la SCP Odent, Poulet, avocat de la Caisse des dépôts et consignations ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite, rendu applicable aux fonctionnaires hospitaliers par l'article 40 de la loi du 21 août 2003, dans sa rédaction applicable à la situation de Mme B : La liquidation de la pension intervient : (...) 3° Lorsque le fonctionnaire civil est parent de trois enfants vivants, ou décédés par faits de guerre, ou d'un enfant vivant, âgé de plus d'un an et atteint d'une invalidité égale ou supérieure à 80 %, à condition qu'il ait, pour chaque enfant, interrompu son activité dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. (...). ; que, selon les dispositions, alors en vigueur, du I de l'article R. 37 du même code, pris pour l'application de l'article L. 24 et rendu applicable aux fonctionnaires hospitaliers par l'article 25 du décret du 26 décembre 2003 : L'interruption d'activité prévue au premier alinéa du 3° du I (...) de l'article L. 24 doit avoir eu une durée continue au moins égale à deux mois et être intervenue alors que le fonctionnaire ou le militaire était affilié à un régime de retraite obligatoire. / Cette interruption d'activité doit avoir eu lieu pendant la période comprise entre le premier jour de la quatrième semaine précédant la naissance ou l'adoption et le dernier jour du trente-sixième mois suivant la naissance ou l'adoption. ; qu'en vertu du dernier alinéa du I de l'article R. 37, pour certains enfants énumérés au II de l'article L. 18 du même code, dont ceux du conjoint issus d'un mariage précédent, que l'intéressé a élevés dans les conditions prévues au III du cet article, l'interruption ou la réduction d'activité doit intervenir soit avant leur seizième anniversaire, soit avant l'âge où ils ont cessé d'être à charge au sens des articles L. 512-3 et R. 512-2 à R. 512-3 du code de la sécurité sociale. ;
Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions, d'une part, que le fait d'interrompre son activité pendant au moins deux mois afin de s'occuper des enfants de son conjoint issus d'un précédent mariage de ce dernier et accueillis ensemble dans ce nouveau foyer ouvre droit, pour chacun de ces enfants, au bénéfice des dispositions précitées du 3° du I de l'article L. 24, sans que puisse y faire obstacle la circonstance que le congé de deux mois ait été pris de façon globale pour l'ensemble de ces enfants, d'autre part, que l'excédent d'au moins deux mois, au-delà de deux mois, d'une période d'interruption d'activité prise au titre d'un enfant peut être pris en compte au titre d'un autre enfant du foyer ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'après avoir relevé que Mme B avait élevé les deux enfants issus du premier mariage de son conjoint et interrompu son activité pendant quatre mois à l'occasion de la naissance de l'enfant qu'elle a eu avec ce dernier, le tribunal administratif d'Orléans a commis une erreur de droit en jugeant qu'elle ne pouvait prétendre à la mise à la retraite avec jouissance immédiate de ses droits à pension, au motif qu'elle n'établissait pas avoir interrompu en outre son activité pour une période de deux mois pour chacun des deux enfants de son conjoint ; que, pour ce motif et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, Mme B est fondée à demander l'annulation du jugement qu'elle attaque ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la Caisse des dépôts et consignations le versement à Mme B de la somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du tribunal administratif d'Orléans du 3 juin 2010 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif d'Orléans.
Article 3 : La Caisse des dépôts et consignations versera à Mme B la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme Renée A épouse B et à la Caisse des dépôts et consignations.
Copie en sera adressée au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement.