Vu le pourvoi, enregistré le 17 décembre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour M. Philippe A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt n°07PA02270 du 16 octobre 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement n° 0315271 du 27 avril 2007 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 16 septembre 2003 par laquelle la Banque de France a rejeté sa demande d'indemnisation des préjudices financier et moral qu'il estime avoir subis en raison des cotations le concernant figurant au fichier bancaire des entreprises et la condamnation de la Banque de France à lui verser la somme de 386 297 euros en réparation de ces préjudices, d'autre part, à la condamnation de la Banque de France à lui verser la somme susvisée ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge de la Banque de France la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code monétaire et financier ;
Vu la loi n° 73-7 du 3 janvier 1973 ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu la loi n° 93-980 du 4 août 1993 ;
Vu le décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Raphaël Chambon, Auditeur,
- les observations de Me Foussard, avocat de M. A et de la SCP Delvolvé, Delvolvé, avocat de la Banque de France,
- les conclusions de M. Mattias Guyomar, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à Me Foussard, avocat de M. A et à la SCP Delvolvé, Delvolvé, avocat de la Banque de France,
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ;
Considérant que M. A avait soulevé devant la cour administrative d'appel le moyen tiré de ce que les cotations qui lui avaient été attribuées par la Banque de France n'étaient pas conformes aux exigences procédurales et de fond de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'attribution par la Banque de France d'une cotation aux personnes physiques qui exercent une fonction de dirigeant, enregistrée au fichier bancaire des entreprises (FIBEN), qui ne peut s'analyser comme ayant en elle-même et par elle-même la nature et la portée d'une sanction administrative ou d'une mesure prise en considération de la personne dès lors qu'elle est fondée sur des éléments objectifs tenant à l'existence ou non et, le cas échéant, à la date, d'une mise en liquidation judiciaire des sociétés dont l'intéressé avait été le représentant légal, et excluant toute appréciation sur le comportement de l'intéressé, ne saurait en elle-même porter atteinte aux biens de l'intéressé, dès lors qu'une telle cotation a seulement le caractère d'une information à caractère objectif sans caractère contraignant, qui ne lie pas les établissements de crédit qui en ont connaissance, et qu'elle est seulement susceptible d'affecter l'accès au crédit des entreprises dirigées par la personne physique faisant l'objet de la cotation ; que, par suite, le moyen soulevé par M. A, tiré de la méconnaissance de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, était inopérant et la cour n'était pas tenue d'y répondre ; que, toutefois, en s'abstenant de viser ce moyen ainsi que celui, également inopérant, tiré de la méconnaissance des objectifs de la législation relative aux procédures collectives, soulevés dans un mémoire enregistré avant la clôture de l'instruction, la cour a entaché son arrêt d'une irrégularité ; qu'il en résulte que M. A est fondé à en demander l'annulation ;
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de M. A qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une somme au titre des frais exposés par la Banque de France et non compris dans les dépens ; qu'en revanche il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la Banque de France le versement à M. A de la somme de 2 000 euros ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 16 octobre 2008 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Paris.
Article 3 : La Banque de France versera à M. A une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions présentées par la Banque de France au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. Philippe A et à la Banque de France.
Copie en sera adressée pour information au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement.