Vu la requête, enregistrée le 30 novembre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Zakia A veuve B, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 24 avril 2008 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours contre la décision du 4 août 2006 par laquelle le consul général de France à Rabat a refusé de lui délivrer un visa d'entrée et de court séjour ;
2°) d'enjoindre au consul général de France à Rabat de lui délivrer le visa sollicité dans un délai de 10 jours à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 300 euros par jour de retard ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le règlement du Parlement européen et du Conseil n° 562/2006 du 15 mars 2006 établissant un code communautaire relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Michel Thenault, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Mattias Guyomar, rapporteur public ;
Considérant que Mme A veuve B, ressortissante marocaine, demande au Conseil d'Etat l'annulation de la décision du 24 avril 2008 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre la décision du consul général de France à Rabat (Maroc) refusant de lui délivrer le visa d'entrée et de court séjour en France qu'elle sollicitait ;
Considérant que pour refuser de délivrer le visa de court séjour demandé, la commission s'est fondée, d'une part, sur l'insuffisance des ressources de l'intéressée pour financer un court séjour en France, d'autre part, sur le risque de détournement de l'objet du visa ;
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 5 du règlement (CE) n° 562/2006 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 : 1° Pour un séjour n'excédant pas trois mois sur une période de six mois, les conditions d'entrée pour les ressortissants de pays tiers sont les suivantes : (...) c) justifier l'objet et les conditions du séjour envisagé, et disposer des moyens de subsistance suffisants, tant pour la durée du séjour envisagé que pour le retour dans le pays tiers dans lequel leur admission est garantie, ou être en mesure d'acquérir légalement ces moyens ; qu'à l'appui de sa demande de visa de court séjour, Mme A a produit une attestation de solde créditeur de 3 388 euros en date du 7 juillet 2006 ; qu'il ressort des pièces du dossier et il n'est pas contesté par le ministre que la soeur de Mme A, qui réside en France et atteste d'un revenu de 14 423 euros pour l'année 2004, a produit une attestation d'accueil ; que, dans ces circonstances, en estimant que Mme A ne pouvait être regardée comme disposant des ressources suffisantes pour financer son court séjour en France, la commission de recours a fait une inexacte application des dispositions précitées ;
Considérant, en second lieu, que pour refuser le visa sollicité, la commission s'est également fondée sur la circonstance que la demande pouvait dissimuler un projet d'installation durable en France, au motif que la requérante avait sollicité, préalablement à sa demande de visa de court séjour, un visa d'entrée et de long séjour ; que toutefois, cette circonstance ne suffit pas, à elle seule, à démontrer l'existence d'un risque de détournement de l'objet du visa ; que par suite, en fondant son refus sur un tel motif, la commission a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A est fondée à demander l'annulation de la décision attaquée ;
Considérant que l'annulation de la décision attaquée implique nécessairement la délivrance du visa sollicité par la requérante ; qu'il y a lieu pour le Conseil d'Etat d'enjoindre au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration de délivrer le visa de court séjour demandé par Mme A dans le délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision ; qu'en revanche il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Mme A de la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
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Article 1er : La décision du 24 avril 2008 de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France est annulée.
Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration de faire délivrer le visa sollicité par Mme A dans le délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision .
Article 3 : L'Etat versera à Mme A la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mme Zakia A veuve B et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.