Vu la requête, enregistrée le 19 novembre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Catherine B, ressortissante française, demeurant ... ; Mme B demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre la décision implicite du consul général de France à Khartoum refusant un visa d'entrée et de long séjour en France à M. Aloys C ;
2°) d'enjoindre à l'autorité compétente de réexaminer la demande de visa d'entrée et de long séjour sollicité par M. C en qualité de conjoint de ressortissant français ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Michel Thenault, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Mattias Guyomar, rapporteur public ;
Considérant que la requête de Mme B est dirigée contre la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée et de long séjour en France a rejeté son recours contre la décision implicite du consul général de France à Khartoum refusant de délivrer un visa d'entrée et de long séjour en France à son conjoint, M. C ; que ce dernier a lui aussi saisi le Conseil d'Etat de conclusions tendant à l'annulation de cette décision ; que ses conclusions ne sont pas tardives, en l'absence de notification aux intéressés de la décision de la commission de recours ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;
Considérant qu'aux termes du quatrième alinéa de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Outre le cas mentionné au deuxième alinéa, le visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ne peut être refusé à un conjoint de Français qu'en cas de fraude, d'annulation du mariage ou de menace à l'ordre public ; qu'il appartient en principe aux autorités consulaires de délivrer au conjoint étranger d'un ressortissant français dont le mariage n'a pas été contesté par l'autorité judiciaire le visa nécessaire pour que les époux puissent mener une vie familiale normale ;
Considérant que pour rejeter comme irrecevable le recours formé devant elle par Mme B, la commission de recours contre les refus de visa s'est fondée sur le fait que son conjoint, M. C, n'avait pas régulièrement déposé de demande de visa auprès des autorités consulaires ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. C, qui s'est rendu à plusieurs reprises à Khartoum pour déposer une demande de visa, en expliquant les circonstances dans lesquelles il avait perdu ses papiers, s'est heurté aux refus répétés du consulat général de France au Soudan d'enregistrer sa demande de visa en raison du fait qu'il n'était plus en possession de ses papiers d'identité ; qu'il ressort par ailleurs des pièces du dossier que son épouse, Mme B, a effectué à deux reprises, les 9 avril et 25 mai 2009, une demande de visa pour son mari auprès du ministre des affaires étrangères et européennes en expliquant les démarches accomplies par son conjoint et l'impossibilité matérielle dans laquelle celui-ci se trouvait de fournir des papiers d'identité; qu'une décision implicite de rejet est née du silence gardé pendant plus de deux mois par le ministre, dont Mme B a saisi la commission de recours contre la décision de refus de visa d'entrée et de long séjour en France par courrier en date du 9 septembre 2009 ; qu'il suit de là que Mme B et M. C sont fondés à soutenir que c'est à tort que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée et de long séjour en France a rejeté comme irrecevable le recours formé devant elle ;
Considérant que l'annulation de la décision attaquée implique qu'il soit procédé à un réexamen de la demande de M. C dans un délai d'un mois à compter de la présente décision ; qu'il y a lieu pour le Conseil d'Etat d'enjoindre au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, de réexaminer la demande de visa sollicitée pour M. C dans un délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision ; qu'en revanche il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1200 euros à Mme B au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : La décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France relative à la demande de visa de M. Aloys C est annulée.
Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration de réexaminer la demande de visa d'entrée et de long séjour de M. C dans un délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision.
Article 3 : L'Etat versera à Mme B la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de Mme B et de M. C est rejeté.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à à Mme Catherine B, à M Aloys C et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.