Vu le pourvoi, enregistré le 3 juillet 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour Mme Amina A, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt n° 08PA02769 du 11 mai 2009 par lequel la cour administrative d'appel de Paris, après avoir annulé l'ordonnance du 17 avril 2008 du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du 4 février 2008 du préfet de police de Paris portant refus de renouvellement de son titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au préfet de police de Paris de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard, a rejeté sa demande de première instance et le surplus des conclusions de sa requête ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à l'ensemble de ses conclusions de première instance et d'appel ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 ;
Vu l'arrêté du 8 juillet 1999 relatif aux conditions d'établissement des avis médicaux concernant les étrangers malades prévus à l'article 7-5 du décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Marie Picard, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de Mme A,
- les conclusions de M. Rémi Keller, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de Mme A,
Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision litigieuse : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 11º) A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis (...), à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux parlementaires qui ont précédé l'adoption de la loi du 24 avril 1997 dont sont issues les dispositions précitées de l'article L. 313-11, qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage l'éloignement d'un étranger du territoire national, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin mentionné à l'article 7-5 du décret du 30 juin 1946 précité, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays de renvoi ; que lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement décider l'éloignement de l'étranger que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans le pays de renvoi ; que si de telles possibilités existent mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ;
Considérant qu'en jugeant que le coût élevé, à la charge de Mme A, de l'opération chirurgicale au Maroc nécessitée par son état de santé était, en tout état de cause, sans incidence sur l'existence de soins appropriés à sa pathologie dans ce pays, la cour administrative d'appel de Paris a méconnu la portée des dispositions précitées de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et a, par suite, entaché son arrêt d'une erreur de droit ; qu'ainsi, Mme A est fondée à en demander l'annulation ;
Considérant qu'il y a lieu de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par Mme A et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt du 11 mai 2009 de la cour administrative d'appel de Paris est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Paris.
Article 3 : L'Etat versera à Mme A la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme Amina A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.