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09/02/2011 | FRANCE | N°311754

France | France, Conseil d'État, 8ème sous-section jugeant seule, 09 février 2011, 311754


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 21 décembre 2007 et 18 mars 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SNC BAIE DES TOURELLES, dont le siège social est situé c/o Carenantilles à Fort-de-France (97200) ; la SNC BAIE DES TOURELLES demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 0300244 du 28 juin 2007 par lequel le tribunal administratif de Fort-de-France a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titr

e des années 2001 et 2002 dans les rôles de la commune de Fort-de-France, ...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 21 décembre 2007 et 18 mars 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SNC BAIE DES TOURELLES, dont le siège social est situé c/o Carenantilles à Fort-de-France (97200) ; la SNC BAIE DES TOURELLES demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 0300244 du 28 juin 2007 par lequel le tribunal administratif de Fort-de-France a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2001 et 2002 dans les rôles de la commune de Fort-de-France, à raison de locaux destinés à un centre de réparation navale qu'elle a fait édifier sur un terrain cadastré AP 1806 au lieu-dit Baie des Tourelles, ainsi que des pénalités correspondantes ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 8 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le décret du 26 août 1953 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jérôme Michel, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la SNC BAIE DES TOURELLES,

- les conclusions de Mme Nathalie Escaut, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la SNC BAIE DES TOURELLES ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que, par un décret du 25 août 1953, l'Etat a concédé, pour 50 ans, à la chambre de commerce et d'industrie de la Martinique (CCIM) l'établissement et l'exploitation d'un outillage public au port de Fort-de-France ; que la CCIM a conclu, le 15 septembre 1994, avec la société Carenantilles un contrat de sous-concession, lui confiant, pour 18 ans, l'établissement, l'entretien et l'exploitation des ouvrages et outillages d'un centre de réparation navale pour bateaux de plaisance en baie des Tourelles ; que la société Carenantilles a elle-même, par un contrat en date du 26 août 1996, confié, pour 15 ans, à la SNC BAIE DES TOURELLES l'établissement et l'exploitation d'une partie des équipements neufs destinés au centre de réparation navale ; que la SNC BAIE DES TOURELLES a été assujettie à la taxe foncière sur les propriétés bâties au titre des années 2001 et 2002 à raison des locaux qu'elle a fait construire en 1998 pour le centre de réparation navale situé sur le terrain cadastré AP 1806 ; que cette dernière société se pourvoit en cassation contre le jugement du 28 juin 2007 par lequel le tribunal administratif de Fort-de-France a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties mises à sa charge au titre des années 2001 et 2002 à raison de ces locaux ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1400 du code général des impôts : I. Sous réserve des dispositions des articles 1403 et 1404, toute propriété, bâtie ou non bâtie, doit être imposée au nom du propriétaire actuel ;

Considérant que pour rejeter la demande présentée par la SNC BAIE DES TOURELLES, le tribunal administratif de Fort-de-France s'est fondé sur les stipulations du contrat de sous-concession conclu en 1994 par la société Carenantilles, notamment de son article 13, selon lequel la CCIM entrera en possession des biens à l'expiration du contrat et le titulaire pourra obtenir le remboursement des investissements qu'il aura réalisés à titre d'aménagement et d'équipement des lieux attribués, sur présentation de pièces justificatives, et sous déduction de l'amortissement, à la condition toutefois que ces investissements et leurs modalités d'amortissement aient été effectués avec l'accord préalable donné par écrit de la CCIM pour juger que le principe du retour à titre gratuit des biens qu'elle exploitait n'était pas établi dès lors que ceux-ci n'étaient pas complètement amortis à la date d'expiration du contrat, la durée d'amortissement des constructions étant de 20 ans alors que la durée du contrat de sous-concession n'était que de 18 ans ; qu'en se fondant sur ces stipulations contractuelles pour apprécier le principe du retour à titre gratuit des constructions à l'expiration du contrat de concession alors que la condition liée au principe de gratuité du retour des installations ne peut être appréciée qu'au regard des stipulations du contrat de concession passé entre l'Etat, autorité concédante, et la CCIM, concessionnaire, le tribunal administratif de Fort-de-France a commis une erreur de droit ; que la SNC BAIE DES TOURELLES est fondée, pour ce motif, à demander l'annulation du jugement qu'elle attaque ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative et de régler l'affaire au fond ;

Sur la recevabilité de la demande :

Considérant que la demande présentée par la SNC BAIE DES TOURELLES est revêtue de la signature de son représentant ; que par suite la fin de non-recevoir opposée par le directeur des services fiscaux et tirée de l'irrecevabilité pour ce motif ne peut qu'être rejetée ;

Sur le bien-fondé des impositions :

Considérant qu'il résulte de l'article 43 du cahier des charges annexé au décret du 26 août 1953 et dont le ministre ne conteste pas l'applicabilité au présent litige, que l'ensemble des biens gérés par la chambre de commerce et d'industrie doit revenir gratuitement en fin de concession à l'Etat ; que ces biens, incluant ceux que la société requérante a fait construire en 1998 pour le centre de réparation navale, doivent, par suite, être regardés comme incorporés au domaine de l'Etat dès la date de leur établissement ; qu'en conséquence, la taxe foncière sur les propriétés bâties due au titre de ces biens devait être établie au nom de l'Etat, seul redevable légal de cette imposition ; que, dès lors et sans que puissent être utilement invoquées les stipulations du contrat de sous-concession passé entre la CCIM et la société Carenantilles, la société requérante est fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration l'a assujettie, à raison des constructions qu'elle a fait édifier, à la taxe foncière sur les propriétés bâties ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1404 du code général des impôts : I. Lorsqu'au titre d'une année une cotisation de taxe foncière a été établie au nom d'une personne autre que le redevable légal, le dégrèvement de cette cotisation est prononcé à condition que les obligations prévues à l'article 1402 aient été respectées. L'imposition du redevable légal au titre de la même année est établie au profit de l'Etat dans la limite de ce dégrèvement ; que, pour l'application de ces dispositions, après avoir prononcé le dégrèvement de la taxe foncière sur les propriétés bâties de la personne qui n'en était pas le redevable légal, le juge a l'obligation, même en l'absence de demande expresse formulée par les parties, de mettre cette imposition à la charge du redevable légal ; qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que la taxe foncière sur les propriétés bâties en litige doit être mise à la charge de l'Etat pris en sa qualité d'autorité concédante ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SNC BAIE DES TOURELLES est fondée à demander la décharge des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2001 et 2002 à raison des locaux qu'elle a fait construire en 1998 pour le centre de réparation navale situé sur le terrain cadastré AP 1806 ; qu'il convient de mettre à la charge de l'Etat, en sa qualité de redevable légal, les cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties due au titre des mêmes années à raison de ces mêmes locaux ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat le versement à la SNC BAIE DES TOURELLES de la somme de 4 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens tant devant le tribunal administratif que devant le Conseil d'Etat ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Fort-de-France du 28 juin 2007 est annulé.

Article 2 : La SNC BAIE DES TOURELLES est déchargée de la taxe foncière sur les propriétés bâties à laquelle elle a été assujettie, au titre des années 2001 et 2002, à raison des locaux qu'elle a fait construire en 1998 pour le centre de réparation navale situé sur le terrain cadastré AP 1806.

Article 3 : La taxe foncière sur les propriétés bâties établie au titre des années 2001 et 2002 à raison des locaux mentionnés à l'article 2 est mise à la charge de l'Etat en sa qualité d'autorité concédante.

Article 4 : L'Etat versera à la SNC BAIE DES TOURELLES une somme de 4500 euros au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la SNC BAIE DES TOURELLES et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement.


Synthèse
Formation : 8ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 311754
Date de la décision : 09/02/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 09 fév. 2011, n° 311754
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Bachelier
Rapporteur ?: M. Jérôme Michel
Rapporteur public ?: Mme Escaut Nathalie
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN, FABIANI, THIRIEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2011:311754.20110209
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