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24/09/2010 | FRANCE | N°334125

France | France, Conseil d'État, 1ère et 6ème sous-sections réunies, 24 septembre 2010, 334125


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 26 novembre 2009 et 5 janvier 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE TEOFARMA, dont le siège est via F.lli Cervi 8 à Pavia (27100), Italie ; la SOCIETE TEOFARMA demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du comité économique des produits de santé notifiée par courrier de son président en date du 25 juin 2009, rejetant sa demande tendant à la modification du prix des spécialités Natispray 0,15 mg/dose et Natispray 0,30 mg/dose, ainsi que la décision

notifiée par lettre du président du comité économique des produits de sa...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 26 novembre 2009 et 5 janvier 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE TEOFARMA, dont le siège est via F.lli Cervi 8 à Pavia (27100), Italie ; la SOCIETE TEOFARMA demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du comité économique des produits de santé notifiée par courrier de son président en date du 25 juin 2009, rejetant sa demande tendant à la modification du prix des spécialités Natispray 0,15 mg/dose et Natispray 0,30 mg/dose, ainsi que la décision notifiée par lettre du président du comité économique des produits de santé en date du 25 septembre 2009 rejetant son recours gracieux ;

2°) d'enjoindre au comité économique des produits de santé d'accepter ses demandes d'augmentation du prix de ces deux spécialités à hauteur respectivement de 31 % et 67 % ou, subsidiairement, de statuer de nouveau sur celles-ci dans un délai d'un mois, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la directive 89/105/CEE du Conseil du 21 décembre 1988 ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean Lessi, Auditeur,

- les observations de Me Blanc, avocat de la SOCIETE TEOFARMA,

- les conclusions de M. Luc Derepas, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à Me Blanc, avocat de la SOCIETE TEOFARMA ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 162-16-4 du code de la sécurité sociale : Le prix de vente au public de chacun des médicaments mentionnés au premier alinéa de l'article L. 162-17 est fixé par convention entre l'entreprise exploitant le médicament et le comité économique des produits de santé conformément à l'article L. 162-17-4 ou, à défaut, par décision du comité, sauf opposition conjointe des ministres concernés qui arrêtent dans ce cas le prix dans un délai de quinze jours après la décision du comité. La fixation de ce prix tient compte principalement de l'amélioration du service médical rendu apportée par le médicament, des prix des médicaments à même visée thérapeutique, des volumes de vente prévus ou constatés ainsi que des conditions prévisibles et réelles d'utilisation du médicament ; qu'aux termes de l'article R. 163-11 du même code : I. Le prix d'un médicament inscrit sur la liste prévue au premier alinéa de l'article L. 162-17 peut être modifié par convention conclue entre l'entreprise qui l'exploite et le comité économique des produits de santé ou, à défaut, par décision du comité (...) ; qu'aux termes de l'article 3 de la directive 89/105/CEE du Conseil du 21 décembre 1988 : (...) 2. Lorsque les autorités compétentes décident de ne pas autoriser, en totalité ou en partie, l'augmentation de prix demandée, la décision comporte un exposé des motifs fondé sur des critères objectifs et vérifiables (...) ; que, pour assurer la transposition de ces dispositions, l'article R. 163-14 du code de la sécurité sociale prévoit que les décisions portant refus de modification du prix de vente au public d'un médicament sont communiquées à l'entreprise avec la mention de leurs motifs ainsi que des voies et délais de recours qui leur sont applicables ;

Considérant que la SOCIETE TEOFARMA a sollicité auprès du comité économique des produits de santé la modification du prix de deux médicaments inscrits sur la liste des spécialités remboursables qu'elle exploite, Natispray(r)-0,15 mg et Natispray(r)-0,30 mg, indiqués notamment dans le traitement préventif et curatif des crises d'angor ; que le comité économique des produits de santé a successivement rejeté sa demande et son recours gracieux, par deux décisions notifiées les 25 juin et 25 septembre 2009 dont la société demande l'annulation ;

Considérant, en premier lieu, qu'aucune disposition législative ou réglementaire ne prévoit que le comité économique des produits de santé ne peut valablement siéger qu'en présence de la totalité des membres le composant ; que, par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que les décisions attaquées, prises au terme des séances des 11 juin 2009 et 10 septembre 2009 au cours desquelles auraient été absents les représentants de certaines administrations seraient, de ce seul fait, entachées d'irrégularité ;

Considérant, en deuxième lieu, que, saisi par la SOCIETE TEOFARMA d'une demande de modification du prix des spécialités Natispray(r)-0,15 mg et Natispray(r)-0,30 mg se référant expressément aux dispositions précitées de l'article L. 162-16-4, qui constituent les seules dispositions du code de la sécurité sociale susceptibles de fonder une décision relative au prix de vente au public de l'un des médicaments mentionnés au premier alinéa de l'article L. 162-17 du même code, le président du comité économique des produits de santé pouvait, sans méconnaître l'obligation de motivation posée par l'article R. 163-14, se référer dans la notification de la décision litigieuse effectuée le 25 juin aux dispositions du code de la sécurité sociale dès lors que cette mention était, dans les circonstances de l'espèce, dépourvue de toute ambiguïté sur les considérations de droit ayant fondé le refus du comité et ne privait dès lors pas la SOCIETE TEOFARMA des garanties que l'exigence de motivation visait à lui apporter ; que, s'agissant de la décision notifiée le 25 septembre 2009, la mention selon laquelle plus de 65 % des patients consomment un seul flacon par an à la fois pour Isocard en 250 doses et pour Natispray en 200 ou 300 doses expose avec une précision suffisante, eu égard à l'argumentation dont le comité était saisi, les éléments de fait sur lesquels ce dernier a fondé le rejet du recours gracieux de la SOCIETE TEOFARMA ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte des termes de la directive 89/105/CEE et des dispositions précitées du code de la sécurité sociale que, sous réserve des cas dans lesquels l'évolution du prix de vente au public de la spécialité remboursable a été prévue par convention entre l'entreprise exploitant le médicament et le comité économique des produits de santé, il appartient à celui-ci, saisi d'une demande en ce sens de l'entreprise, d'apprécier s'il y a lieu de procéder à la modification de prix sollicitée au regard notamment des critères indiqués à l'article L. 162-16-4 et qu'à cette fin, il lui revient en particulier de déterminer dans chaque cas, sur la base de critères objectifs et vérifiables, la méthode de comparaison des prix des médicaments à même visée thérapeutique la plus adaptée aux caractéristiques des spécialités en cause en tenant compte des conditions réelles et prévisibles d'utilisation de celles-ci ; qu'en l'espèce, le comité économique des produits de santé a pu, sans fonder ses décisions sur des faits matériellement inexacts, estimer que les conditions réelles d'utilisation de Natispray(r)-0,15 mg, de Natispray(r)-0,30 mg et de la spécialité Isocard(r) correspondaient à la consommation, non pas d'une certaine quantité annuelle de principe actif, mais d'un certain nombre de flacons par patient et par an, dont l'achat est renouvelé sans que le précédent flacon soit nécessairement épuisé ; que, dès lors que ce constat se vérifiait, pour une année donnée, dans des conditions statistiquement cohérentes, le comité a pu, sans porter sur ces éléments une appréciation manifestement erronée, se fonder sur les constats effectués au cours de cette seule année ; qu'enfin, il a pu en conséquence, sans méconnaître les dispositions de l'article L. 162-16-4 du code de la sécurité sociale, procéder dans ce cas particulier à des comparaisons avec la spécialité Isocard(r) reposant sur le seul prix des flacons, indépendamment du nombre de doses et de la concentration de principe actif contenus par chacun ;

Considérant, enfin, qu'en raison de la méthode de comparaison ainsi retenue, l'erreur matérielle commise par le président du comité économique des produits de santé quant à la concentration de principe actif de la spécialité Isocard(r) ne saurait révéler une inexactitude matérielle entachant l'appréciation portée par le comité sur les prix respectifs de ces spécialités ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la requête de la SOCIETE TEOFARMA doit être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de la SOCIETE TEOFARMA est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE TEOFARMA et au comité économique des produits de santé.


Synthèse
Formation : 1ère et 6ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 334125
Date de la décision : 24/09/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

61-04-01-022 SANTÉ PUBLIQUE. PHARMACIE. PRODUITS PHARMACEUTIQUES. - DEMANDE DE MODIFICATION DU PRIX DE SPÉCIALITÉS PHARMACEUTIQUES - DÉCISION DU COMITÉ ÉCONOMIQUE DES PRODUITS DE SANTÉ - OBLIGATION DE MOTIVATION - PORTÉE [RJ1].

61-04-01-022 Saisi d'une demande de modification du prix de spécialités pharmaceutiques se référant expressément aux seules dispositions pertinentes du code de la sécurité sociale, le comité économique des produits de santé a pu, sans entacher sa décision d'insuffisance de motivation, refuser de faire droit à cette demande en se bornant à mentionner les dispositions du code de la sécurité sociale et les éléments de fait justifiant ce refus. Cette mention était en effet, dans les circonstances de l'espèce, dépourvue de toute ambiguïté sur les considérations de droit ayant fondé la décision du comité.


Références :

[RJ1]

Comp., pour l'annulation d'une décision se bornant à faire référence aux dispositions du code de la sécurité sociale, 23 octobre 2002, Société des laboratoires Mayoly Spindler, n° 237875, inédite.


Publications
Proposition de citation : CE, 24 sep. 2010, n° 334125
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Jean Lessi
Rapporteur public ?: M. Derepas Luc
Avocat(s) : BLANC

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:334125.20100924
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