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08/02/2010 | FRANCE | N°324085

France | France, Conseil d'État, 5ème sous-section jugeant seule, 08 février 2010, 324085


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 13 janvier et 14 avril 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE OMNIUM DE GESTION IMMOBILIERE DE L'ILE DE FRANCE, dont le siège est 39 avenue de Friedland à Paris (75008) ; la SOCIETE OMNIUM DE GESTION IMMOBILIERE DE L'ILE DE FRANCE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 13 novembre 2008 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à réparer les préjudices qu'elle a subis en raison du

refus du préfet de Seine-Saint-Denis de lui accorder le concours d...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 13 janvier et 14 avril 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE OMNIUM DE GESTION IMMOBILIERE DE L'ILE DE FRANCE, dont le siège est 39 avenue de Friedland à Paris (75008) ; la SOCIETE OMNIUM DE GESTION IMMOBILIERE DE L'ILE DE FRANCE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 13 novembre 2008 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à réparer les préjudices qu'elle a subis en raison du refus du préfet de Seine-Saint-Denis de lui accorder le concours de la force publique pour l'exécution de la décision de justice prononçant l'expulsion de M. A ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit aux conclusions de sa demande de première instance ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la construction et de l'habitation ;

Vu la loi n° 91-650 du 9 janvier 1991 ;

Vu le décret n° 92-755du 31 juillet 1992 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Nicole Guedj, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Thouin-Palat, Boucard, avocat de la SOCIETE OMNIUM DE GESTION IMMOBILIERE DE L'ILE DE FRANCE,

- les conclusions de M. Jean-Philippe Thiellay, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Thouin-Palat, Boucard, avocat de la SOCIETE OMNIUM DE GESTION IMMOBILIERE DE L'ILE DE FRANCE ;

Considérant qu'il résulte des pièces soumises aux juges du fond que la SOCIETE OMNIUM DE GESTION IMMOBILIERE DE L'ILE DE FRANCE, propriétaire d'un logement sis 77 rue d'Enghien à Epinay-sur-Seine, qu'elle louait à M. A, a obtenu, par un jugement exécutoire du juge des référés du tribunal d'instance de Saint-Ouen en date du 25 juin 2002, la résiliation du bail et l'expulsion du locataire ; que la société requérante a demandé, le 29 janvier 2003 au préfet de la Seine-Saint-Denis le concours de la force publique, qui lui a été accordé le 1er septembre 2006 ; que la société requérante ayant demandé au préfet d'indemniser le préjudice résultant pour elle du refus d'accorder le concours de la force publique avant cette dernière date, a obtenu et accepté le versement par l'Etat d'une indemnité de 6 768,06 euros au titre de la période s'étendant jusqu'au 31 octobre 2004 ; que la société ayant saisi le préfet d'une seconde demande, au titre de la période s'étendant du 1er novembre 2004 au 1er septembre 2006, à hauteur de 10 592,25 euros, le préfet a accepté d'y faire droit à hauteur de 10 241,77 euros ; que la société a saisi le tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'une demande indemnitaire tendant à ce que lui soit versée la somme qu'elle avait demandée au préfet, ainsi qu'une indemnité supplémentaire de 800 euros ; que par un jugement du 13 novembre 2008, le tribunal a rejeté la demande de la SOCIETE OMNIUM DE GESTION IMMOBILIERE DE L'ILE DE FRANCE, qui se pourvoit en cassation ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ;

Considérant que, pour rejeter la demande indemnitaire dont il était saisi, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise s'est fondé sur le motif que la SOCIETE OMNIUM DE GESTION IMMOBILIERE DE L'ILE DE FRANCE ne justifiait pas, au regard des pièces qu'elle avait versées au dossier, avoir subi un préjudice au titre de la période s'étendant du 1er novembre 2004 au 1er septembre 2006, et précisément justifié de l'existence et du montant des indemnités d'occupation et des charges impayées qui lui seraient dues ; que toutefois, il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que si la requérante n'avait pas produit le contrat de bail, dont il était au demeurant loisible au tribunal de demander la communication dans le cadre de ses mesures d'instruction s'il s'estimait insuffisamment éclairé, elle avait versé au dossier la copie des tableaux de décomptes des loyers et des charges dus par l'occupant pour la période litigieuse qu'elle avait adressés à l'administration à l'appui de sa demande indemnitaire et sur la base desquels l'administration a d'ailleurs fait une proposition de règlement en cours d'instance ; que, dans ces conditions, en jugeant que la société requérante ne justifiait pas avoir subi un préjudice au titre de la période pour laquelle elle demandait réparation, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis ; que par suite la SOCIETE OMNIUM DE GESTION IMMOBILIERE DE L'ILE DE FRANCE est fondée à demander l'annulation du jugement attaqué ;

Considérant qu'il y a lieu pour le Conseil d'Etat, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative et de statuer sur la demande de la SOCIETE OMNIUM DE GESTION IMMOBILIERE DE L'ILE DE FRANCE devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

Considérant que l'administration a été valablement saisie le 29 janvier 2003 par l'huissier mandaté par la requérante d'une demande de concours de la force publique, alors même qu'à cette date l'exécution forcée d'une mesure d'expulsion était interdite par les dispositions de l'article de l'article L. 613-3 du code de la construction et de l'habitation, relative à la trêve hivernale ; que les dispositions de l'article 50 du décret du 31 juillet 1992 pris pour l'application de la loi portant réforme des procédures civiles d'exécution, ne sauraient être interprétées comme permettant à l'Etat de se prévaloir de l'absence de justification, par l'huissier qui a accompli les diligences, de la nécessité de recourir à la force publique pour échapper à sa responsabilité au titre du rejet d'une réquisition de la force publique ; que cette responsabilité a en l'espèce commencé à courir à compter de la naissance, le 29 mars 2003, d'une décision implicite du préfet de Seine-Saint-Denis rejetant la demande de concours de la force publique présentée par la société requérante et a pris fin le 1er septembre 2006 date de la libération des lieux ; que la société ayant accepté l'indemnité proposée par l'Etat pour le préjudice subi du 29 mars 2003 au 31 octobre 2004, il n'y a lieu de statuer que sur le montant du préjudice subi du 1er novembre 2004 au 1er septembre 2006 ;

Considérant que, compte tenu des circonstances de l'espèce et des documents produits par la société dont tous les éléments ne sont pas précisément justifiés, il sera fait une juste appréciation de son préjudice en l'évaluant à 8 500 euros tous intérêts compris au jour de la présente décision ; qu'en revanche la société ne justifie pas de troubles dans les conditions d'existence de nature à lui ouvrir droit à des dommages-intérêts ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3500 euros au titre des frais exposés par la société requérante devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise et le Conseil d'Etat ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise en date du 13 novembre 2008 est annulé.

Article 2 : L'Etat est condamné à verser la somme de 8 500 euros à la SOCIETE OMNIUM DE GESTION IMMOBILIERE DE L'ILE DE FRANCE tous intérêts compris au jour de la présente décision.

Article 3 : L'Etat versera la somme de 3 500 euros à la SOCIETE OMNIUM DE GESTION IMMOBILIERE DE L'ILE DE FRANCE en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions présentées par la SOCIETE OMNIUM DE GESTION IMMOBILIERE DE L'ILE DE FRANCE devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise et le Conseil d'Etat est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE OMNIUM DE GESTION IMMOBILIERE DE L'ILE DE FRANCE et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.


Synthèse
Formation : 5ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 324085
Date de la décision : 08/02/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 08 fév. 2010, n° 324085
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Hubac
Rapporteur ?: Mme Nicole Guedj
Rapporteur public ?: M. Thiellay Jean-Philippe
Avocat(s) : SCP THOUIN-PALAT, BOUCARD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:324085.20100208
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