Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 6 août et 6 novembre 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour
M. Jean-Guy A, demeurant ... ;
M. A demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 13 juin 2007 de la Cour des comptes en tant qu'il rejette sa requête tendant à l'annulation du jugement du 1er juin 2005 par lequel la chambre régionale des comptes de Rhône-Alpes l'a déclaré, à titre définitif, comptable de fait des deniers de l'Office du tourisme de l'Alpe d'Huez (OTAH) à compter du 23 mars 1988, conjointement et solidairement avec MM. B et C, Mme D et l'association Alpe d'Huez Initiatives ;
2°) réglant l'affaire au fond, d'annuler le jugement du 1er juin 2005 de la chambre régionale des comptes de Rhône-Alpes ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des juridictions financières ;
Vu l'article 60 de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 modifiée ;
Vu le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 modifié ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Delphine Hedary, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Peignot, Garreau, avocat de M. A,
- les conclusions de M. Mattias Guyomar, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Peignot, Garreau, avocat de M. A ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ;
Considérant que M. A se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 13 juin 2007 de la Cour des comptes en tant qu'il le déclare participant à la gestion de fait des deniers de l'office du tourisme de l'Alpe d'Huez (OTAH) ayant consisté en ce que le directeur de cet établissement public encaisse des recettes sur un compte bancaire privé, les soustrayant ainsi à la caisse d'un comptable public et au budget de cette structure ;
Considérant qu'aux termes de l'article R. 131-12 du code des juridictions financières, dans sa rédaction applicable au présent litige : La Cour des comptes, lorsqu'elle est saisie ou se saisit d'office de faits présumés constitutifs de gestion de fait, peut déclarer la ou les personnes intéressées comptables de fait et procéder au jugement du compte et de la gestion de fait dans les conditions prévues aux articles R. 131-3, R. 131-5 et R. 131-6. ; qu'aux termes de l'article R. 131-3 du même code, dans sa rédaction applicable au présent litige : La cour des comptes rend des arrêts par lesquels elle statue à titre provisoire ou à titre définitif. La procédure devant la Cour des comptes est écrite et contradictoire. Les dispositions provisoires des arrêts enjoignent, en tant que de besoin, au comptable de rapporter, dans un délai fixé par la Cour et ne pouvant être inférieur à un mois, toutes explications ou justifications à sa décharge. ; que cette règle du double arrêt était applicable à la procédure d'appel en application de l'article R. 131-41 dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêt attaqué ;
Considérant que lorsque la Cour des comptes, saisie en appel d'un jugement rendu par une chambre régionale des comptes, censure les motifs retenus par les premiers juges et, dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel, entend retenir contre une partie des griefs nouveaux, elle doit, pour respecter le principe du contradictoire, les lui faire connaître et l'inviter à apporter des explications ou justifications en suivant les procédures, prévues par les textes législatifs et réglementaires, applicables à la date à laquelle elle statue ;
Considérant qu'après avoir censuré les motifs retenus par la chambre régionale des comptes de Rhône-Alpes pour déclarer M. A comptable de fait des deniers de l'OTAH, la Cour des comptes a substitué les motifs tirés de ce que l'intéressé, en tant que maire de la commune avait institué les recettes illégales dont il savait nécessairement qu'elles devaient revenir à cet établissement public, et en tant que président de l'office de tourisme voyait les comptes et budgets dans lesquels n'apparaissaient pas les sommes correspondant à ces recettes et exerçait une autorité étroite sur le directeur de l'établissement ; que si les documents sur lesquels la Cour des comptes s'est fondée, y compris ceux remis le jour de l'audience par l'ancien directeur de l'OTAH, avaient déjà été soumis à la procédure contradictoire applicable, les motifs retenus dans l'arrêt, qui pouvaient légalement fonder une déclaration de gestion de fait, constituaient des griefs distincts de ceux préalablement énoncés contre M. A ; que, dès lors, en application de la procédure en vigueur lorsque la Cour des comptes a statué, elle aurait dû, sans que le débat contradictoire qui se déroule à l'audience publique puisse l'en dispenser, communiquer à l'intéressé ces griefs par des dispositions provisoires, afin que M. A puisse y répondre par écrit avant que la juridiction ne statue définitivement ; que faute pour la Cour des comptes d'avoir suivi cette procédure du double arrêt, M. A est fondé à soutenir que l'arrêt attaqué est entaché d'une méconnaissance du principe du contradictoire en tant qu'il le déclare comptable de fait et à en demander pour ce motif l'annulation ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de M. A tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt de la Cour des comptes du 13 juin 2007 est annulé en tant qu'il déclare M. A gestionnaire de fait des deniers de l'office public du tourisme de l'Alpe d'Huez.
Article 2 : Le surplus des conclusions de M. A est rejeté.
Article 3 : L'affaire est renvoyée à la Cour des comptes.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Jean-Guy A et au Premier ministre.
Une copie pour information sera adressée au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, ainsi qu'au Procureur général près la Cour des comptes.