Vu le recours, enregistré le 12 juin 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ; le MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 11 avril 2006 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a annulé le jugement du 9 mars 2001 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté la demande de M. Ahmed A tendant à l'annulation de la décision du MINISTRE DE L'INTERIEUR, en date du 7 mars 2000, refusant de l'assigner à résidence ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la requête de M. A devant la cour administrative d'appel de Lyon ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Catherine Meyer-Lereculeur, chargée des fonctions de Maître des Requêtes,
- les observations de Me Brouchot, avocat de M. A,
- les conclusions de M. Frédéric Lenica, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 28 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, modifiée, relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France, applicable aux faits de l'espèce : « L'étranger qui fait l'objet d'un arrêté d'expulsion ou qui doit être reconduit à la frontière et qui justifie être dans l'impossibilité de quitter le territoire français en établissant qu'il ne peut ni regagner son pays d'origine ni se rendre dans aucun autre pays, peut (...) être astreint à résider dans les lieux qui lui sont fixés dans lesquels il doit se présenter périodiquement aux services de police et de gendarmerie » ; qu'aux termes de l'article 28 bis de la même ordonnance : « Il ne peut être fait droit à une demande de relèvement d'une interdiction du territoire français (....) que si le ressortissant réside hors de France. Toutefois, cette disposition ne s'applique pas pendant le temps où le ressortissant étranger subit en France une peine privative de liberté sans sursis ou fait l'objet d'un arrêté d'assignation à résidence pris en application de l'article 28 » ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond, que M. A, étranger qui revendique la nationalité pakistanaise et qui a fait l'objet en 1990 d'une condamnation, devenue définitive, à 12 ans d'emprisonnement pour infraction à la législation sur les stupéfiants, assortie d'une interdiction définitive du territoire national, a sollicité du MINISTRE DE L'INTERIEUR son assignation à résidence à l'effet de présenter une demande de relèvement de cette interdiction ; qu'un refus lui a été opposé le 7 mars 2000 ;
Considérant que le bénéfice de l'assignation à résidence prévue par l'article 28 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 est subordonné à la double condition que l'intéressé ne puisse pas regagner son pays d'origine et ne puisse pas être admis dans un autre pays ; que, pour annuler le jugement du 9 mars 2001 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté la demande de M. A tendant à l'annulation du refus d'assignation à résidence qui lui avait été opposé le 7 mars 2000, la cour administrative d'appel de Lyon s'est fondée sur la circonstance que le refus des autorités consulaires du Pakistan de reconnaître à M. A la qualité de ressortissant du Pakistan et, en conséquence, de lui délivrer un passeport ou tout autre document lui permettant d'être admis dans un autre pays, établissait par elle-même son impossibilité de quitter la France ; qu'en se prononçant ainsi, alors qu'à la date de la décision ministérielle lui refusant l'assignation à résidence, M. A ne justifiait pas avoir effectué de démarches auprès d'autres pays que le Pakistan pour être admis sur leur territoire, la cour administrative d'appel de Lyon a entaché sa décision d'une erreur de droit au regard de l'article 28 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ; que, par suite, le MINISTRE DE L'INTERIEUR est fondé à en demander, pour ce motif, l'annulation ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;
Considérant qu'en relevant tant le caractère exécutoire de la peine d'interdiction définitive du territoire français que la gravité des faits reprochés à M. A pour refuser de faire droit à sa demande d'assignation à résidence, le MINISTRE DE L'INTERIEUR n'a fait qu'user du pouvoir d'appréciation qu'il détient en vertu des dispositions précitées de l'article 28 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, sans ajouter aux conditions posées par cet article ; qu'il n'a, par suite, commis aucune erreur de droit au regard de ce texte ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, qu'à la date de la décision ministérielle lui refusant l'assignation à résidence qu'il sollicitait, M. A ne justifiait pas avoir effectué de démarches auprès d'autres pays que le Pakistan pour être admis sur leur territoire ; qu'en particulier, la lettre du 25 février 2000 du préfet du Puy-de-Dôme dont se prévaut l'intéressé, mentionnant qu'il n'a pu obtenir un document transfrontière des autorités consulaires pakistanaises, ne suffit pas à établir son impossibilité de quitter le territoire national ;
Considérant que la circonstance que M. A n'est pas recevable à déposer une demande de relèvement d'interdiction du territoire en l'absence d'assignation à résidence est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande d'annulation de la décision susmentionnée du MINISTRE DE L'INTERIEUR ; que, par suite, ses conclusions aux fins d'injonction ainsi que ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt du 11 avril 2006 de la cour administrative d'appel de Lyon est annulé.
Article 2 : La requête de M. A devant la cour administrative d'appel de Lyon est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE L'IMMIGRATION, DE L'INTEGRATION, DE L'IDENTITE NATIONALE ET DU CODEVELOPPEMENT et à M. Ahmed A.