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19/12/2007 | FRANCE | N°289708

France | France, Conseil d'État, 7ème et 2ème sous-sections réunies, 19 décembre 2007, 289708


Vu 1°), sous le n° 289708, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 31 janvier 2006, la requête présentée par la FEDERATION FRANÇAISE DES VEHICULES D'EPOQUE, dont le siège social est ACF, 8, place de la Concorde à Paris (75008), le RESEAU DU SPORT DE L'AIR - FEDERATION FRANÇAISE DES COLLECTIONNEURS ET CONSTRUCTEURS AMATEURS D'AERONEFS, dont le siège social est 46, rue Sauffroy à Paris (75017), la FEDERATION FRANÇAISE DES GROUPES DE CONSERVATION DES VEHICULES MILITAIRES, dont le siège social est Les Enauderies, à Bouille-Ménard (49520), la SOCIETE SOMATEX,

dont le siège social est 5, RN 20, à Linas(91310), la SOCIETE S...

Vu 1°), sous le n° 289708, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 31 janvier 2006, la requête présentée par la FEDERATION FRANÇAISE DES VEHICULES D'EPOQUE, dont le siège social est ACF, 8, place de la Concorde à Paris (75008), le RESEAU DU SPORT DE L'AIR - FEDERATION FRANÇAISE DES COLLECTIONNEURS ET CONSTRUCTEURS AMATEURS D'AERONEFS, dont le siège social est 46, rue Sauffroy à Paris (75017), la FEDERATION FRANÇAISE DES GROUPES DE CONSERVATION DES VEHICULES MILITAIRES, dont le siège social est Les Enauderies, à Bouille-Ménard (49520), la SOCIETE SOMATEX, dont le siège social est 5, RN 20, à Linas(91310), la SOCIETE SCMD dont le siège social est 5, RN 20, à Linas (91310), M. Henri C, demeurant ..., M. Robert A, demeurant 41, rue Boileau à Brétigny-sur-Orge (91220), M. André D, demeurant ..., M. Christian E, demeurant ... ; la FEDERATION FRANÇAISE DES VEHICULES D'EPOQUE, le RESEAU DU SPORT DE L'AIR, la FEDERATION FRANÇAISE DES GROUPES DE CONSERVATION DES VEHICULES MILITAIRES, la SOCIETE SOMATEX, la SOCIETE SCMD, MM. C, A, D, et E demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2005-1463 du 23 novembre 2005 relatif au régime des matériels de guerre, armes et munitions, pris pour l'application du code de la défense et modifiant le décret n° 95-589 du 6 mai 1995 ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu 2°), sous le n° 293676, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 22 mai 2006 et 15 septembre 2006, la requête sommaire et le mémoire complémentaire présentés par l'ASSOCIATION DE TIREUR, dont le siège est 8, rue du portail de ville à La Tour du Pin Cedex (38353), M. Hervé F, demeurant ..., M. Gérard G, demeurant ..., M. Raymond H, demeurant ..., M. Pierre I, demeurant ..., M. Philippe J, demeurant ..., M. Philippe K, demeurant ..., M. Christian L, demeurant ..., M. Christian M, demeurant ..., M. Patrick N, demeurant ..., M. Gérard O, demeurant ..., M. Patrice P, demeurant ..., M. Jean-Paul Q, demeurant ..., M. Gilbert R, demeurant ..., M. Jean S, demeurant ..., M. Christian T, demeurant ..., M. Robert U, demeurant ..., M. Raymond V, demeurant ..., M. Hervé W, demeurant ..., M . Pierre X, demeurant ..., M. Jean-Claude Y, demeurant ..., M. Patrick Z, demeurant ..., M. Jean AA, demeurant ..., M. Hervé AB, demeurant ..., M. Bertrand AC, demeurant ..., M. François AD, demeurant ..., M. Arnaud AE, demeurant ..., M. Christophe AF, demeurant ..., M. Claude AG, demeurant ..., M. Jean-Claude AH, demeurant ..., M. Jean-Michel AI, demeurant ..., M. André AJ, demeurant ..., M. Jean AK, demeurant ..., M. Jean-Jacques AL, demeurant ..., M. Christian AM, demeurant ..., M. Joël AN, demeurant ..., M. Jean-Pascal AR, demeurant ..., M. Pascal AP, demeurant ..., M. Germano AQ, demeurant ... ; l'ASSOCIATION DE TIREUR et MM. F, G, H, I, J, K, L, CAILBAUT, N, O, P, Q, R, S, T, U, V, W, X, Y, Z, AA, AB, AC, AD, AE, AF, AG, AH, AI, AJ, AK, AL, AM, AN, AR, AP, AQ demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2005-1463 du 23 novembre 2005 relatif au régime des matériels de guerre, armes et munitions, pris pour l'application du code de la défense et modifiant le décret n° 95-589 du 6 mai 1995 ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................

Vu, enregistré le 2 mai 2006, le courrier par lequel la FEDERATION FRANÇAISE DES VEHICULES D'EPOQUE déclare se désister de l'instance ;

Vu, enregistré le 4 juillet 2006, le courrier par lequel la FEDERATION FRANÇAISE DES GROUPES DE CONSERVATION DE VEHICULES MILITAIRES déclare se désister de l'instance ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble le 1er protocole additionnel à cette convention ;

Vu la directive n° 91/477/CEE du 18 juin 1991 ;

Vu le code de la défense ;

Vu la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives ;

Vu le décret du 18 avril 1939 fixant le régime des matériels de guerre, armes et munitions ;

Vu le décret n° 95-589 du 6 mai 1995 modifié relatif à l'application du décret du 18 avril 1939 fixant le régime des matériels de guerre, armes et munitions ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Denis Prieur, Conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Nicolas Boulouis, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes sont dirigées contre le même décret ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

En ce qui concerne les désistements :

Considérant que par courriers enregistrés respectivement le 2 mai 2006 et le 4 juillet 2006, la fédération française des véhicules d'époque d'une part, et la fédération française des groupes de conservation de véhicules militaires d'autre part, ont déclaré se désister de l'instance qu'elles avaient engagée ; que rien ne fait obstacle à ce qu'il soit donné acte à ces deux associations de ce désistement ;

En ce qui concerne les requêtes en tant qu'elles sont présentées par les autres requérants :

Sur l'irrégularité de la consultation du Conseil d'Etat :

Considérant que les dispositions du décret attaqué reprennent soit le projet soumis au Conseil d'Etat, soit le texte adopté par le Conseil d'Etat ; qu'ainsi le moyen tiré de ce que le décret attaqué aurait été pris à l'issue d'une procédure irrégulière de consultation du Conseil d'Etat doit être écarté ;

Sur le défaut de contreseing :

Considérant qu'aux termes de l'article 22 de la Constitution : « Les actes du Premier ministre sont contresignés, le cas échéant, par les ministres chargés de leur exécution. » ; que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, l'exécution du décret attaqué ne comporte pas nécessairement de mesures réglementaires ou individuelles que le ministre chargé des transports ou le ministre des affaires étrangères auraient à signer ou à contresigner ; qu'ainsi l'absence de contreseing par ces deux ministres du décret attaqué n'entache pas celui-ci d'irrégularité ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré de cette absence doit être écarté ;

Sur les moyens relatifs à la compétence des auteurs du décret attaqué :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 2336-1 du code de la défense : « I. - L'acquisition et la détention des matériels de guerre, des armes et des munitions par les personnes autres que celles mentionnées à l'article L. 2332-1 sont soumises aux dispositions suivantes : 1° L'acquisition et la détention des matériels de guerre des 2e et 3e catégories sont interdites, sauf pour les besoins de la défense nationale. Un décret en Conseil d'Etat définit les conditions dans lesquelles l'Etat, pour les besoins autres que ceux de la défense nationale, les collectivités locales et les organismes d'intérêt général ou à vocation culturelle, historique ou scientifique peuvent être autorisés à acquérir et à détenir des matériels de ces catégories. Il fixe également les conditions dans lesquelles certains matériels de 2e catégorie peuvent être acquis et détenus à fin de collection par des personnes physiques, sous réserve des engagements internationaux en vigueur et des exigences de l'ordre et de la sécurité publics ; 2° L'acquisition et la détention des matériels, des armes et des munitions des 1re et 4e catégories sont interdites, sauf autorisation délivrée dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) » ; qu'en fixant, par le décret attaqué, les conditions dans lesquelles des personnes privées, physiques ou morales, pourront être autorisées, à des fins de collection, à détenir des matériels de guerre classés en 2e catégorie, le Premier ministre s'est, contrairement à ce que soutiennent les requérants, conformé aux termes de l'habilitation que lui a conférée le législateur ; qu'il en est de même pour les dispositions relatives aux conditions dans lesquelles le ministre de l'intérieur peut autoriser des personnalités étrangères à détenir, pour les besoins de leur sécurité pendant leur séjour en France, des armes de poing ; qu'ainsi le Premier ministre n'a pas excédé sa compétence en prenant les dispositions critiquées ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'article L. 2338-1 du code de la défense dispose : « Le port des armes des 1ère , 4ème et 6ème catégories ou d'éléments constitutifs des armes des 1ère et 4ème catégories ou de munitions correspondantes est interdit ainsi que leur transport sans motif légitime. / Les fonctionnaires et agents des administrations publiques exposés par leurs fonctions à des risques d'agression, ainsi que les personnels auxquels est confiée une mission de gardiennage et qui ont été préalablement agréés à cet effet par le préfet, peuvent être autorisés à s'armer pendant l'exercice de leurs fonctions, dans les conditions définies par décret. » ; qu'il résulte de ces dispositions qu'en fixant les conditions dans lesquelles le ministre de l'intérieur peut autoriser temporairement des personnalités étrangères et les personnes qui assurent leur sécurité pendant leur séjour en France, à porter une arme de poing lorsque les gouvernements des pays dont ces personnalités sont ressortissantes en font la demande pour un motif légitime, le décret attaqué respecte les termes de l'habilitation conférée au pouvoir réglementaire par l'article L. 2338-1 précité du code de la défense ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 39 du décret du 6 mai 1995, dans sa rédaction issue de l'article 11 du décret attaqué : « Les demandes d'autorisation doivent être appuyées : .... II.- des pièces complémentaires suivantes lorsque l'autorisation est demandée dans les cas définis par les articles suivants du présent décret : ....4° Pour les autorisations visées au 2° de l'article 28 ci-dessus : .... avis favorable d'une fédération mentionnée à cet article ; » ;

Considérant que les dispositions précitées, qui font figurer l'avis favorable d'une fédération sportive dans la liste des documents que doit fournir la personne qui souhaite se voir délivrer par le préfet une autorisation d'acquérir une arme destinée à la pratique du tir sportif, n'ont ni pour objet ni pour effet d'instaurer au profit de cette fédération sportive un pouvoir de « codécision » sur les demandes d'autorisation en cause, dont la satisfaction ou le rejet restent de la compétence du seul préfet ; qu'ainsi les requérants ne sont fondés à soutenir ni que ces dispositions concèdent à une personne privée le pouvoir de délivrer une autorisation administrative sans qu'une loi l'ait expressément prévu, ni , par conséquent, que le décret attaqué aurait méconnu les termes de l'habilitation conférée au pouvoir réglementaire par l'article L. 2338-1 du code de la défense précité ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'en ce qui concerne les matériels de guerre de 2e catégorie mentionnés au I-1° de l'article L. 2336-1 précité du code de la défense, c'est-à-dire ceux qui sont destinés à porter ou à utiliser au combat les armes à feu, le législateur n'a pas entendu imposer au pouvoir réglementaire, de fixer, au titre des mesures d'application de la loi, une règle relative à la date de fabrication des engins auxquels s'applique le régime d'autorisation d'acquisition et de détention à fin de collection prévu par le décret attaqué ;

Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article 55-1 du décret du 6 mai 1995 introduit par l'article 19 du décret attaqué : « (...) les systèmes d'armes et armes embarquées sont neutralisés selon des modalités définies par arrêté conjoint des ministres de la défense et de l'intérieur et des ministres chargés de l'industrie et des douanes. » ; qu'en renvoyant à un arrêté interministériel le soin de fixer les modalités, purement techniques, de neutralisation des systèmes d'armes et armes embarquées, le Premier ministre n'a pas illégalement délégué la compétence qu'il tenait des dispositions législatives précitées ;

Sur la méconnaissance des dispositions de la directive n° 91/477/CEE du 18 juin 1991 :

Considérant que si la directive n° 91/ 477/ CEE du 18 juin 1991, relative au contrôle de l'acquisition et de la détention d'armes, transposée par le décret du 6 mai 1995, pose en principe, sous réserve des nécessités de l'ordre et de la sécurité publics, la libre circulation des « armes de collection », ses dispositions ne sont pas applicables aux matériels de guerre, qui sont en dehors de son objet ; qu'ainsi, en ne prévoyant pas de modalités spécifiques de transfert et d'exportation des matériels de guerre « de collection » sur le territoire communautaire, le décret attaqué n'a pu, contrairement à ce que soutiennent les requérants, méconnaître les dispositions de la directive précitée ;

Sur la méconnaissance de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :

Considérant d'une part, que pour l'application de l'article L. 2336-1 du code de la défense, le décret attaqué a institué, dans son article 8 modifiant l'article 32 du décret du 6 mai 1995, un régime d'autorisation administrative applicable à l'acquisition et à la détention, à fins de collection, de matériels de guerre de 2ème catégorie ; qu'en posant des conditions à l'acquisition et à la détention par des particuliers de matériels de cette nature, qui ne sauraient, notamment en raison de leur usage antérieur, être regardés comme des objets ordinaires, le pouvoir réglementaire n'a pas porté au droit de propriété garanti par les stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales une atteinte disproportionnée aux buts poursuivis, compte tenu des exigences de l'ordre et de la sécurité publics qui s'imposent à lui ;

Considérant, d'autre part, qu'avant l'intervention du décret attaqué, aucune exception au principe de l'interdiction d'acquisition et de détention de matériels de guerre de 2ème catégorie n'avait été prévue en faveur des personnes physiques désireuses d'en faire collection ; qu'il s'ensuit qu'il ne peut utilement être reproché à l'article 8 dudit décret, modifiant l'article 32 du décret du 6 mai 1995, de viser indifféremment les situations nouvelles et celles constituées antérieurement à son entrée en vigueur, ces dernières ne pouvant exister légalement ; qu'ainsi le moyen tiré de ce que cet article serait incompatible avec l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant ;

Sur les moyens propres aux articles 4, 5, 6, 7,11, 13 et 14 du décret attaqué :

Sur l'article 4 :

Considérant qu'aux termes de l'article 23 du décret du 6 mai 1995 dans sa rédaction issue de l'article 4 du décret attaqué : « Sous réserve des dispositions de l'article 40 ci-dessous, 1° L'acquisition et la détention des matériels, armes, éléments d'arme, munitions ou éléments de munition des quatre premières catégories sont interdites, sauf autorisation.(...)L'autorisation n'est pas accordée lorsque le demandeur : a été condamné à une peine d'emprisonnement avec ou sans sursis supérieure à trois mois figurant au bulletin n° 2 de son casier judiciaire, ou dans un document équivalent pour les ressortissants d'un Etat membre de la Communauté européenne ou d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen fait l'objet d'un régime de protection en application de l'article 490 du code civil, est ou a été hospitalisé sans son consentement en raison de troubles mentaux en application des articles L. 3212-1 à L. 3213-9 du code de la santé publique ou bénéficie de sorties d'essai en application de l'article L. 3211-11 du même code ou est dans un état physique ou psychique manifestement incompatible avec la détention de ces matériels, armes et munitions ; »

Considérant, en premier lieu, que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, la référence à un « document équivalent » au bulletin n° 2 du casier judiciaire français pour les ressortissants des pays européens est une simple modalité de vérification que la condition, identique pour tous les demandeurs d'autorisation, d'absence de condamnation à certaines peines, est remplie; qu'ainsi, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les dispositions précitées méconnaîtraient le principe d'égalité ;

Considérant, en deuxième lieu, que les requérants soutiennent que l'interdiction opposée par les dispositions citées ci-dessus au demandeur qui est ou a été hospitalisé sans son consentement en raison de troubles mentaux est illégale du fait qu'elle ne comporte pas de limite dans le temps ; qu'au regard toutefois des nécessités de protection de l'ordre et de la sécurité publics, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'interdiction en cause constitue une restriction excessive à l'acquisition et à la détention d'armes, lesquelles demeurent soumises, dans tous les cas, à une autorisation administrative ;

Considérant, enfin, que contrairement à ce que soutiennent les requérants, le législateur n'a pas entendu, par l'article L. 2336-1 du code de la défense, autoriser l'acquisition et la détention d'une arme de 1ère ou de 4ème catégorie dans le cas où ces acquisition et détention ne portent que sur une seule arme par individu, réservant au cas où elles porteraient sur plusieurs armes pour un même acquéreur et détenteur, l'intervention du pouvoir réglementaire pour déterminer les conditions mises à cette autorisation ;

Sur les articles 5 et 7 :

Considérant que les dispositions des articles 28-I et 31 du décret du 6 mai 1995 dans leur rédaction issue respectivement des articles 5 et 7 du décret attaqué fixent à vingt et un ans l'âge à partir duquel une personne peut être autorisée à acquérir et à détenir une arme de la 1ère ou de la 4ème catégorie pour la pratique du tir sportif ( article 28-I ) ou pour sa défense ( article 31 ) ; qu'en fixant cette condition d'âge, le pouvoir réglementaire, compétent pour définir le régime d'autorisation applicable à ces armes, n'a méconnu ni la volonté du législateur, lequel n'a pas entendu instituer un droit à l'acquisition et à la détention de telles armes ouvert à tout citoyen majeur en faisant la demande, ni le principe d'égalité, dès lors que ceux des demandeurs auxquels cette condition ne s'applique pas en vertu d'autres dispositions réglementaires se trouvent dans une situation objectivement différente, en raison par exemple de leur profession, de celle que visent les dispositions critiquées ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que ces dispositions iraient au-delà de ce que prévoit la loi et engendreraient une rupture d'égalité entre les citoyens n'est pas fondé ;

Sur l'article 6 :

Considérant que l'article 6 du décret attaqué ramène d'un an à six mois le délai prévu à l'article 30 du décret du 6 mai 1995 laissé aux détenteurs d'armes acquises comme armes de 5e,7e ou 8e catégorie et classées ultérieurement à l'achat en 1ère ou 4e catégorie pour faire la demande d'autorisation correspondant à la nouvelle classification de leur arme ; que s'agissant d'armes dont l'acquisition et la détention sont en principe interdites, un délai de six mois suivant la date d'entrée en vigueur de la décision de reclassement pour formuler la demande d'autorisation doit être regardé comme suffisant pour permettre aux personnes les ayant acquises et les détenant au titre d'une catégorie inférieure de se conformer à la nouvelle réglementation, sans que l'administration soit tenue de les informer individuellement de la nécessité d'effectuer cette démarche ; qu'ainsi le moyen tiré de ce que la brièveté alléguée du délai ci-dessus mentionné et l'absence d'information individuelle des détenteurs sur les démarches leur incombant rendraient les dispositions visées illégales n'est pas fondé et doit, par suite, être écarté ;

Sur l'article 11 :

Considérant que les dispositions de l'article 39-II-4° du décret du 6 mai 1995, dans sa rédaction issue de l'article 11 du décret attaqué, prévoient que parmi les pièces à fournir à l'appui d'une demande d'autorisation de détenir une arme destinée à la pratique du tir sportif, doit figurer « pour les mineurs de 18 ans, [l'] autorisation d'acquérir une arme émanant d'une personne exerçant l'autorité parentale » ; que l'expression « mineurs de 18 ans », vise les personnes n'ayant pas encore atteint l'âge de 18 ans et non les personnes ayant cet âge ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutiennent les requérants, les dispositions précitées sont dépourvues de toute contradiction ;

Sur l'article 13 :

Considérant qu'aux termes de l'article 41 du décret du 6 mai 1995 dans sa rédaction issue de l'article 13 du décret attaqué : « .... Cette autorité peut également, avant de statuer, si elle l'estime nécessaire, demander à la direction départementale des affaires sanitaires et sociales de l'informer, dans le respect des règles du secret médical, de l'éventuelle hospitalisation d'office ou à la demande d'un tiers dans un établissement de santé habilité en vertu des dispositions de l'article L. 3222-1 du code de la santé publique ou de l'éventuel traitement dans un service ou secteur de psychiatrie d'un demandeur qui n'a pas produit le certificat médical datant de moins de quinze jours prévu à l'article 40. Si ces informations confirment que le demandeur aurait dû joindre ce certificat à sa demande, l'autorité lui demande de le produire sans délai ou d'apporter tous éléments de nature à établir que sa demande n'est pas soumise aux dispositions de l'article 40. » ;

Considérant, en premier lieu, que si tout patient hospitalisé peut demander qu'il ne soit pas fait état de sa présence dans l'établissement qui l'accueille, cette possibilité, qui résulte des dispositions d'un décret, ne peut être utilement invoquée à l'encontre des dispositions précitées, qui procèdent également d'un décret ; qu'ainsi le moyen tiré de ce que la faculté prévue par les dispositions précitées au bénéfice de l'autorité appelée à statuer sur une demande d'autorisation d'acquisition et de détention d'arme soumise aux dispositions de l'article 40 du décret du 6 mai 1995 modifié serait contraire aux dispositions réglementaires relatives au fonctionnement des centres hospitaliers et des hôpitaux locaux est inopérant ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 2336-3 du code de la défense : « Toute personne physique sollicitant la délivrance ou le renouvellement d'une autorisation d'acquisition ou de détention de matériels, d'armes ou de munitions des 1ère et 4e catégories ou faisant une déclaration de détention d'armes des 5e et 7e catégories doit produire un certificat médical attestant que son état de santé physique n'est pas incompatible avec la détention de ces matériels, armes ou munitions. / Dans le cas où la personne mentionnée au précédent alinéa suit ou a suivi un traitement dans un service ou un secteur psychiatrique d'un établissement de santé, l'autorité administrative lui demande de produire également un certificat médical délivré par un médecin psychiatre. Un décret en Conseil d'Etat, pris après avis du Conseil national de l'ordre des médecins, définit les modalités d'application du présent article. (....) Il prévoit également les conditions dans lesquelles le préfet peut vérifier si la personne mentionnée au premier alinéa est ou a été dans le cas mentionné au deuxième alinéa. » ; qu'il résulte de ces dispositions que le législateur a expressément prévu la possibilité pour le préfet de recueillir auprès des services à même de les lui fournir des informations relatives à l'existence passée ou présente d'un traitement pour troubles mentaux suivi par un demandeur d'autorisation d'acquisition ou de détention d'arme ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutiennent les requérants, les dispositions de l'article 41 du décret du 6 mai 1995 introduites par l'article 13 du décret attaqué, n'excèdent pas les limites de l'habilitation conférée par la loi au pouvoir réglementaire ;

Sur l'article 14 :

Considérant qu'aux termes de l'article 45-2 du décret du 6 mai 1995 dans sa rédaction issue de l'article 14 du décret attaqué : « La demande de renouvellement doit être déposée au plus tard trois mois avant la date d'expiration de l'autorisation. Il en est délivré récépissé. Celui-ci vaut autorisation provisoire pendant trois mois à compter de la date d'expiration de l'autorisation. Si la demande de renouvellement d'autorisation pour une arme n'est pas déposée dans le délai prescrit, il ne peut plus être délivré d'autorisation de renouvellement pour cette arme, sauf si le retard du dépôt est justifié par un empêchement de l'intéressé. » ;

Considérant, en premier lieu, que pour contester la légalité du délai de trois mois institué par les dispositions ci-dessus au bénéfice de l'administration pour statuer sur les demandes de renouvellement d'autorisation, délai pendant lequel le récépissé délivré au moment du dépôt de la demande vaut autorisation provisoire, les requérants se bornent à affirmer qu'il n'a été prévu par aucun autre texte ; qu'à supposer que cette affirmation soit exacte, elle ne serait pas de nature à entraîner l'illégalité alléguée, les dispositions critiquées relevant de l'exercice par le pouvoir réglementaire de sa compétence en matière de police administrative ; que, par suite, le moyen doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'en disposant qu'il ne peut plus être délivré d'autorisation de renouvellement pour l'arme dont le détenteur a omis, sans pouvoir justifier son retard par un empêchement, de solliciter dans le délai prescrit, que son autorisation lui soit renouvelée, l'article 45 du décret du 6 mai 1995 n'a pas pour objet, contrairement à ce que soutiennent les requérants, de créer une sanction administrative, mais simplement de tirer les conséquences de la négligence ou du désintérêt du détenteur à l'égard de son arme révélés par cette omission ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que les dispositions en cause seraient illégales faute d'être assorties de la définition d'une procédure contradictoire et d'une échelle graduée de sanctions n'est pas fondé ;

Sur l'erreur d'appréciation dont seraient entachés les articles 5, 21 et 22 du décret attaqué :

Sur l'article 5 :

Considérant qu'aux termes de l'article 28-I du décret du 6 mai 1995, dans sa rédaction issue de l'article 5 du décret attaqué : « Peuvent être autorisés pour la pratique du tir sportif à acquérir et à détenir : b) Des armes des paragraphes 1, 2,4 à 7, 9 du I et du paragraphe 1 du II de la 4e catégorie ainsi que les éléments d'arme, munitions et chargeurs s'y rapportant : 1° Les associations sportives agréées pour la pratique du tir.... » ;

Considérant que ces dispositions ont notamment pour objet d'exclure des armes qui peuvent être détenues régulièrement en vue de la pratique du tir sportif celles du paragraphe 8 du I de la 4e catégorie, communément désignées sous l'appellation de « fusils à pompe » ; que les requérants soutiennent qu'en édictant cette exclusion qui empêcherait les tireurs sportifs français d'utiliser ce type d'arme dans les compétitions internationales, ou à l'entraînement, ce qui les désavantagerait par rapport à leurs concurrents d'autres nationalités, les auteurs du décret attaqué auraient entaché celui-ci d'une erreur d'appréciation ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier qu'une telle crainte n'a pas été exprimée par la fédération française de tir à l'occasion de sa consultation sur le projet de décret, cet organisme se bornant à « prendre acte » de l'exclusion des « fusils à pompe » des armes dont la détention est autorisée pour la pratique du tir sportif ; que l'administration dispose en outre du pouvoir de limiter, pour des motifs tenant à l'ordre et à la sécurité publics, la diffusion des types d'armes qui présentent un danger avéré ; qu'il ne ressort des pièces du dossier ni que les auteurs du décret attaqué auraient commis une erreur d'appréciation en cherchant, par l'exclusion des « fusils à pompe » des armes autorisées pour la pratique du tir sportif, à restreindre le nombre des détenteurs de cette arme ni que les dispositions qu'ils ont édictées sur ce point seraient excessives au regard des exigences de la sécurité publique ;

Sur l'article 21 :

Considérant qu'aux termes de l'article 58-2 du décret du 6 mai 1995 ajouté par l'article 21 du décret attaqué : « Le ministre de l'intérieur peut autoriser par arrêté toute personnalité étrangère séjournant en France, ainsi que les personnes assurant sa sécurité, sur la demande du gouvernement du pays dont cette personnalité est ressortissante, à détenir, porter et transporter une arme de poing relevant d'une catégorie et présentant certaines caractéristiques et, dans les limites fixées au premier alinéa du I de l'article 35, les munitions correspondantes. » ;

Considérant que l'autorisation du ministre de l'intérieur mentionnée par les dispositions précitées ne peut être délivrée que si le gouvernement du pays dont la personnalité bénéficiaire est ressortissante en a formulé la demande ; qu'il appartient au ministre de l'intérieur, lorsqu'il est saisi d'une telle demande dans les formes prescrites, de l'instruire et de s'assurer de son bien-fondé, dans l'exercice de son pouvoir de police administrative ; que les dispositions ainsi édictées ne sont entachées d'aucune erreur d'appréciation ;

Sur l'article 22 :

Considérant qu'aux termes de l'article 70-I du décret du 6 mai 1995 introduit par l'article 22 du décret attaqué : « Le détenteur d'une arme, de munitions et de leurs éléments dont l'autorisation a fait l'objet d'un retrait ou d'un refus de renouvellement, ou qui n'a pas sollicité le renouvellement de son autorisation dans les conditions prévues au premier alinéa de l'article 45 s'en dessaisit dans le délai de trois mois qui suit soit la notification de la décision préfectorale de retrait ou de refus, soit la date d'expiration de son autorisation. En cas de risque pour l'ordre public ou la sécurité des personnes, le préfet peut fixer un délai inférieur. » ;

Considérant que pour les armes, les munitions et leurs éléments dont la détention est soumise à autorisation, il appartient à l'administration de prendre à l'égard du détenteur qui n'est plus titulaire de l'autorisation requise les dispositions propres à empêcher la poursuite d'une situation irrégulière ; qu'en prévoyant que le détenteur placé dans cette situation devra se dessaisir de son arme dans les trois mois, le décret attaqué ne fait qu'énoncer la conséquence qui doit être nécessairement tirée de la cessation de la situation régulière du détenteur de l'arme, sans que ce dessaisissement constitue, s'agissant d'un bien dont la jouissance est subordonnée à la détention d'une autorisation administrative, ni une atteinte au droit de propriété susceptible de faire l'objet d'une indemnisation, ni une mesure d'une gravité disproportionnée par rapport à l'objectif poursuivi ; qu'ainsi le moyen tiré de ce que, par cette disposition, les auteurs du décret attaqué auraient entaché celui-ci d'une erreur d'appréciation n'est pas fondé et doit, par suite, être écarté ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Il est donné acte à la FEDERATION FRANÇAISE DES VEHICULES D'EPOQUE ET A LA FEDERATION FRANÇAISE DES GROUPES DE CONSERVATION DES VEHICULES MILITAIRES de leur désistement.

Article 2 : Les requêtes sont rejetées en tant qu'elles sont présentées par les autres requérants.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la FEDERATION FRANÇAISE DES VEHICULES D'EPOQUE ET A LA FEDERATION FRANÇAISE DES GROUPES DE CONSERVATION DES VEHICULES MILITAIRES, au RESEAU DU SPORT DE L'AIR et à l'ASSOCIATION DE TIREUR.

Une copie sera adressée pour information à la SOCIETE SOMATEX, à la SOCIETE SCMD, à M. Henri C, à M. Robert A, à M. André D, à M. Christian E, à M. Hervé F, à M. Gérard G, à M. Raymond H, à M. Pierre I, à M. Philippe J, à M. Philippe K, à M. Christian L, à M. Christian M, à M. Patrick N, à M. Gérard O, à M. Patrice P, à M. Jean-Paul Q, à M. Gilbert R, à M. Jean S, à M. Christian T, à M. Robert U, à M. Raymond V, à M. Hervé W, à M. Pierre X, à M. Jean-Claude Y, à M. Patrick Z, à M. Jean AA, à M. Hervé AB, à M. Bertrand AC, à M. François AD, à M. Arnaud AE, à M. Christophe AF, à M. Claude AG, à M. Jean-Claude AH, à M. Jean-Michel AI, à M. André AJ, à M. Jean AK, à M. Jean-Jacques AL, à M. Christian AM, à M. Joël AN, à M. Jean-Pascal AR, à M. Patrick AP, à M. Germano AQ, au Premier ministre, au ministre de la défense et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.


Synthèse
Formation : 7ème et 2ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 289708
Date de la décision : 19/12/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 19 déc. 2007, n° 289708
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Stirn
Rapporteur ?: M. Denis Prieur
Rapporteur public ?: M. Boulouis Nicolas

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2007:289708.20071219
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