Vu la requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le 29 novembre 2004, présentée par M. et Mme Jean-Marc B, demeurant ... et M. et Mme Jean C, demeurant ... ; les consorts A demandent au Conseil d'Etat d'annuler la décision du 2 juillet 2004 par laquelle la commission nationale d'aménagement foncier, à la demande du ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales a tiré les conséquences des jugements en date des 18 novembre 1993 et 25 septembre 1995 par lesquels le tribunal administratif de Lille a annulé les décisions de la commission départementale d'aménagement foncier du Nord des 11 avril 1991 et 13 novembre 1995 en tant qu'elles concernent les propriétés des consorts A sises sur le territoire de la commune de Bazuel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code rural ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Damien Botteghi, Auditeur,
- les conclusions de M. Didier Chauvaux, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par un jugement du 25 septembre 1997, le tribunal administratif de Lille a annulé la décision de la commission départementale d'aménagement foncier du Nord en date du 13 novembre 1995 en tant qu'elle concernait le compte 96 des biens de communauté des consorts Jean C et le compte 97 des biens propres de M. Jean-Marc A sur le territoire de la commune de Bazuel ; que, par un arrêt du 1er février 2001, la cour administrative d'appel de Douai a rejeté le recours présenté par le ministre de l'agriculture et de la pêche contre ce jugement ; que la commission nationale d'aménagement foncier, saisie par le ministre de l'agriculture le 25 février 2004 en application de l'article L. 121-11 du code rural afin de tirer les conséquences de ces décisions de justice a décidé le 2 juillet 2004, d'une part, de modifier les parcelles ZM 28 et ZA 1 du compte n° 97 des biens propres de M. Jean-Marc A, la parcelle ZM 25 du compte n° 99 des biens grevés d'usufruit de M. A et la parcelle ZM 26 du compte n° 98 des biens de la communauté de M. et Mme Jean-Marc B et, d'autre part, en application du dernier alinéa de l'article précité d'accorder une indemnité de 2.580 euros à M. Jean-Marc A pour des travaux de déplacement d'une haie, une indemnité de 2.709,90 euros à M. et Mme Jean A pour des travaux de mise en place d'une buse et de curage d'un fossé et une indemnité de 1.000 euros à M. et Mme Jean A en réparation des préjudices et troubles résultant des erreurs commises à l'occasion des opérations de remembrement ;
Sur la légalité externe :
Considérant que, contrairement à ce que soutiennent les consorts A, aucune disposition législative ou réglementaire, ni aucun principe général ne fait obligation à la commission nationale d'aménagement foncier de leur communiquer le rapport établi par le rapporteur désigné par son président ; que s'ils font valoir que la commission n'a pas été objectivement informée, il ressort des pièces du dossier qu'ils ont été entendus par la commission en application de l'article R. 121-15 du code rural ;
Sur la légalité interne :
Considérant qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 121-11 du code rural, dans sa rédaction applicable à la date de la décision attaquée : « Lorsque la commission nationale d'aménagement foncier est saisie dans les conditions prévues au premier alinéa de l'article L. 121-11 d'un litige en matière de remembrement rural et qu'elle constate que la modification du parcellaire qui serait nécessaire pour assurer intégralement par des attributions en nature le rétablissement des droits du propriétaire intéressé aurait des conséquences excessives sur la situation d'autres exploitations et compromettrait la finalité du remembrement, elle peut, à titre exceptionnel et par décision motivée, prévoir que ce rétablissement sera assuré par le versement d'une indemnité à la charge de l'Etat dont elle détermine le montant. » ; qu'aux termes de l'article L. 123-6 du même code : « Sauf exception justifiée, il n'est créé qu'une seule parcelle par propriétaire dans une masse de répartition » ;
Considérant que les consorts A soutiennent que la décision attaquée ne respecte pas l'autorité de la chose jugée par la cour administrative d'appel de Douai ;
Sur le compte n° 97 des biens propres de M. Jean-Marc A :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'il a été jugé par un arrêt de la cour administrative d'appel de Douai du 1er février 2001, devenu définitif, que les lots ZA 1, ZM 24 et ZM 28 attribués au compte 97 de biens propres de M. Jean-Marc A appartenaient à une même masse de répartition et que l'existence d'un fossé, de haies et d'une dénivelée d'une dizaine de mètres ne constituait pas en l'espèce des obstacles naturels délimitant plusieurs masses de répartition ; que la commission nationale d'aménagement foncier a respecté le principe de l'unicité de parcelle par masse de répartition en modifiant la configuration des parcelles ZM 24 et ZA 1 pour constituer un seul lot ; qu'elle a décidé, en application de l'article L. 121-11 du code rural, d'accorder une indemnité de 2.580 euros à M. Jean-Marc A du fait du déplacement d'une haie résultant de cette modification ; qu'en revanche, la parcelle ZM 28 étant constituée de terres labourables et non de prés, à la différence des parcelles ZM 24 et ZA 1, la commission a pu légalement estimer que son échange avec des terres jouxtant les deux autres parcelles ne pouvait être opéré sauf à méconnaître le respect du principe d'équivalence par nature de culture posé par l'article L. 123-4 du code rural ; qu'il a ainsi été porté, sans que soit méconnue l'autorité de la chose jugée, une exception justifiée à l'article L. 123-6 du code rural pour maintenir l'équilibre du compte de M. Jean-Marc A ;
Sur le compte n° 96 des biens de communauté des époux Jean C :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'il a été jugé par un arrêt de la cour administrative d'appel de Douai du 1er février 2001 devenu définitif que les lots ZM 19, ZM 27 et ZM 29 attribués au compte 96 de M. et Mme Jean C appartenaient à la même masse de répartition sans que l'existence d'un fossé ne constitue un obstacle naturel délimitant plusieurs masses de répartition ; qu'en application de cette décision, la commission nationale a modifié la configuration des parcelles ZM 29 et ZA 19 afin de constituer un seul lot dans une même masse de répartition et décidé d'accorder à M. et Mme Jean C une indemnité de 2 709,90 euros correspondant aux travaux nécessaires à l'aménagement de ces deux parcelles ; qu'elle a pu légalement, en raison de l'impossibilité d'attribuer les parcelles ZM 27 à M. D et au centre communal d'action sociale, compte tenu de l'absence d'entretien normal de cette parcelle par M. Jean A, contrairement aux obligations qui lui incombaient en application de l'article 121-12 du code rural, décidé de maintenir ladite parcelle dans ses attributions ; qu'il a été ainsi porté, sans que soit méconnue l'autorité de la chose jugée, une exception justifiée à l'article L. 123-6 du code rural ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les consorts A ne sont pas fondés à demander l'annulation de la décision de la commission nationale d'aménagement foncier en date du 2 juillet 2004 ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de M. et Mme Jean-Marc B et de M. et Mme Jean C est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à MM. et Mmes Jean-Marc B et Jean C, à M. D, à M. E, au centre communal d'action sociale de Bazuel et au ministre de l'agriculture et de la pêche.