Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 11 août et 11 décembre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Patrice A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision du 12 mai 2003 par laquelle le conseil national de l'ordre des pharmaciens a rejeté sa requête tendant à l'annulation de la décision du 12 mars 2002 par laquelle la chambre de discipline du conseil central de la section G de l'ordre des pharmaciens lui a infligé la sanction de l'interdiction d'exercer la pharmacie pendant six mois ;
2°) réglant l'affaire au fond, d'annuler la décision de la chambre de discipline du conseil central de la section G en date du 12 mars 2002 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu la loi n° 2002-1062 du 6 août 2002 portant amnistie ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Herbert Maisl, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de M. A et de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat du conseil national de l'ordre des pharmaciens,
- les conclusions de M. Terry Olson, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;
Considérant qu'aux termes de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue (...) publiquement (...) par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. Le jugement doit être rendu publiquement (...) ;
Considérant que, si la décision attaquée du conseil national de l'ordre des pharmaciens, confirmant la sanction de l'interdiction d'exercer la pharmacie pendant une durée de six mois infligée à M. A par la chambre de discipline du conseil central de la section G de l'ordre, porte les mentions « le conseil national de l'ordre des pharmaciens réuni le 12 mai 2003 en séance publique », et « affaire examinée et délibérée en la séance du 12 mai 2003 », elle ne mentionne pas la date à laquelle elle a été rendue publique ; qu'ainsi elle ne fait pas la preuve qu'elle a été prononcée dans des conditions régulières ; que, par suite, M. A est fondé à en demander l'annulation ;
Considérant qu'en vertu de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de l'appel formé par M. A ;
Considérant qu'aux termes de l'article 11 de la loi du 6 août 2002 : Sont amnistiés les faits commis avant le 17 mai 2002 en tant qu'ils constituent des fautes passibles de sanctions disciplinaires ou professionnelles (...) / Sauf mesure individuelle accordée par décret du Président de la République, sont exceptés du bénéfice de l'amnistie prévue par le présent article les faits constituant des manquements à l'honneur, à la probité ou aux bonnes moeurs... ;
Considérant que, pour infliger à M. A la sanction de l'interdiction d'exercer la pharmacie pendant six mois, la chambre de discipline du conseil central de la section G de l'ordre des pharmaciens a retenu en premier lieu un grief tiré de ce que, en exécution d'une convention conclue avec la commune du Blanc-Mesnil, le laboratoire d'analyses de biologie médicale dont il était directeur recevait des prélèvements aux fins d'analyse qui lui étaient transmis directement par les centres de soins municipaux, en méconnaissance du 1er alinéa de l'article L. 6211-5 du code de la santé publique ; qu'il résulte de l'instruction que, dès le mois de juin 2001, avant même que le conseil central de la section G décide de traduire M. A en chambre de discipline, il avait été mis fin à cette pratique, qui est d'ailleurs désormais permise lorsqu'elle satisfait aux dispositions de l'article L. 6211-5 du code de la santé publique dans sa rédaction résultant de la loi du 23 décembre 2000 et aux dispositions réglementaires prises pour son application ; que, dans les circonstances de l'espèce, les faits reprochés à M. A n'ont pas constitué un manquement à l'honneur ou à la probité ;
Considérant que la chambre de discipline du conseil central de la section G de l'ordre des pharmaciens a retenu en second lieu à l'encontre de M. A le grief d'avoir mis à la disposition de médecins prescripteurs des tampons encreurs et des auto-collants imprimés au nom du laboratoire dont il était directeur ; que toutefois, il ne résulte de l'instruction, ni que la possession de ces matériels par certains médecins résulterait de démarches de M. A auprès de ceux-ci en vue de l'orientation de patients vers le laboratoire, ni que le pharmacien aurait rémunéré les médecins prescripteurs ; que, dans les circonstances de l'espèce, ces faits n'ont pas constitué un manquement à l'honneur ou à la probité ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les faits servant de base à la sanction prononcée en première instance sont amnistiés en vertu des dispositions de l'article 11 de la loi du 6 août 2002 ; que la loi d'amnistie a fait disparaître tous les effets de la sanction prononcée antérieurement, qui n'a pas été exécutée ; qu'il en résulte que l'appel formé postérieurement à l'intervention de la loi d'amnistie est devenu sans objet ; que, par suite, il n'y a pas lieu d'y statuer ;
D E C I D E :
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Article 1er : La décision du conseil national de l'ordre des pharmaciens en date du 12 mai 2003 est annulée.
Article 2 : Il n'y a pas lieu, les faits étant amnistiés, de statuer sur l'appel formé par M. A à l'encontre de la décision du conseil central de la section G de l'ordre des pharmaciens du 12 mars 2002.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Patrice A, au conseil national de l'ordre des pharmaciens et au ministre de la jeunesse et des sports.