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20/07/2007 | FRANCE | N°278412

France | France, Conseil d'État, 8ème et 3ème sous-sections réunies, 20 juillet 2007, 278412


Vu le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE, enregistré le 9 mars 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 20 janvier 2005 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux, après avoir annulé le jugement du 18 janvier 2001 du tribunal administratif de Limoges, a prononcé la décharge du complément d'impôt sur le revenu auquel a été assujetti M. Alain A au titre de l'année 1991 ainsi que de la pénalité correspondante ;

Vu l

es autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le...

Vu le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE, enregistré le 9 mars 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 20 janvier 2005 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux, après avoir annulé le jugement du 18 janvier 2001 du tribunal administratif de Limoges, a prononcé la décharge du complément d'impôt sur le revenu auquel a été assujetti M. Alain A au titre de l'année 1991 ainsi que de la pénalité correspondante ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Paquita Morellet-Steiner, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Laurent Olléon, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis à la cour administrative d'appel que M. A a été soumis, au titre de l'année 1991, à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu assises sur une somme de 82 627,37 euros (542 000 F) correspondant à la valeur de bons du Trésor dérobés à une personne décédée au cours de la même année ; que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 20 janvier 2005 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a, après avoir annulé le jugement du 18 janvier 2001 du tribunal administratif de Limoges, accordé à M. A la décharge de ces impositions ;

Considérant que l'article 12 du code général des impôts dispose : L'impôt est dû chaque année à raison des bénéfices ou revenus que le contribuable réalise ou dont il dispose au cours de la même année ; qu'aux termes de l'article 92 du même code : 1. Sont considérés comme provenant de l'exercice d'une profession non commerciale ou comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices... de toutes occupations, exploitations lucratives et sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus ;

Considérant qu'en se bornant, pour juger que la somme retenue comme base des impositions litigieuses ne pouvait être regardée comme la conséquence de l'accomplissement d'une opération entrant dans les prévisions de l'article 92 du code général des impôts, à se référer aux circonstances, susmentionnées, dans lesquelles elle a été perçue, sans énoncer le motif pour lequel elle écartait cette qualification, la cour n'a pas suffisamment motivé l'arrêt attaqué ; que, par suite, le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est fondé à en demander l'annulation ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative et de régler l'affaire au fond ;

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à la suite de la plainte déposée par les héritiers de Mme B, née C, M. Alain A, qui a reconnu les faits, a, par un jugement du tribunal de grande instance de Limoges statuant en matière correctionnelle, en date du 25 janvier 1995, été, d'une part, reconnu coupable d'avoir recelé la somme mentionnée ci-dessus résultant du partage des bons du Trésor anonymes dérobés par son frère M. Claude A au domicile de cette dernière, le jour de son décès survenu le 23 janvier 1991, et, d'autre part, a été condamné à la restituer aux héritiers de Mme B ;

Considérant, en premier lieu, qu'il ne ressort d'aucune des pièces du dossier et n'est pas soutenu que M. A ait été bénéficiaire d'un legs ; que l'existence alléguée de liens affectifs, voire de parenté, l'unissant à la personne décédée ne suffit pas pour qualifier d'actif successoral la somme dérobée ;

Considérant, en deuxième lieu, que les circonstances de l'affaire, notamment l'existence de tels liens, ne font pas obstacle à ce que le gain ainsi effectué, qui n'était pas insusceptible de renouvellement, soit regardé comme relevant de la catégorie des bénéfices non commerciaux en application des dispositions précitées du 1. de l'article 92 du code général des impôts ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il n'est pas contesté que M. A a personnellement disposé de la somme ainsi dérobée ; que, dès lors, la circonstance qu'il ait été ultérieurement condamné à la restituer est sans influence sur le caractère de revenu de cette somme, au sens des dispositions du même article ;

Considérant, enfin, que M. A, qui n'exerce aucune profession non commerciale, ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article 202 du code général des impôts relatives à la cessation de l'exercice d'une profession non commerciale ;

En ce qui concerne l'application de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales :

Considérant que si M. A se prévaut, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des énonciations du paragraphe 2 de la documentation administrative de base 5G 1144 du 15 décembre 1995, relatif aux revenus et profits dont la source est susceptible de renouvellement, cette documentation ne donne pas de la loi fiscale une interprétation différente de ce qui a été dit ci-dessus ; qu'ainsi M. A n'est en tout état de cause pas fondé à s'en prévaloir ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions de M. A tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans présente instance, la partie perdante, la somme demandée par M. A au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 20 janvier 2005 de la cour administrative d'appel de Bordeaux est annulé.

Article 2 : Les impositions et pénalités litigieuses sont remises à la charge de M. A.

Article 3 : La requête présentée par M. A devant la cour administrative d'appel de Bordeaux et ses conclusions présentées devant le Conseil d'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE et à M. Alain A.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 20 jui. 2007, n° 278412
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: Mme Paquita Morellet-Steiner
Rapporteur public ?: M. Olléon

Origine de la décision
Formation : 8ème et 3ème sous-sections réunies
Date de la décision : 20/07/2007
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 278412
Numéro NOR : CETATEXT000018006730 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2007-07-20;278412 ?
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