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02/07/2007 | FRANCE | N°295685

France | France, Conseil d'État, 1ère et 6ème sous-sections réunies, 02 juillet 2007, 295685


Vu la requête, enregistrée le 20 juillet 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par l'ASSOCIATION FNATH, ASSOCIATION DES ACCIDENTES DE LA VIE, dont le siège est 42, rue des Alliés à Saint-Etienne (42100) et l'ASSOCIATION CISS - COLLECTIF INTERASSOCIATIF SUR LA SANTE, dont le siège est 5, rue du Général Bertrand à Paris (75007) ; ces associations demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2006-707 du 19 juin 2006 modifiant l'article R. 322-8 du code de la sécurité sociale ;

2°) de mettre à la charge d

e l'Etat le versement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1...

Vu la requête, enregistrée le 20 juillet 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par l'ASSOCIATION FNATH, ASSOCIATION DES ACCIDENTES DE LA VIE, dont le siège est 42, rue des Alliés à Saint-Etienne (42100) et l'ASSOCIATION CISS - COLLECTIF INTERASSOCIATIF SUR LA SANTE, dont le siège est 5, rue du Général Bertrand à Paris (75007) ; ces associations demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2006-707 du 19 juin 2006 modifiant l'article R. 322-8 du code de la sécurité sociale ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, notamment son préambule ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu la loi n° 2004-810 du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie ;

Vu la loi n° 2005-1579 du 19 décembre 2005 de financement de la sécurité sociale, notamment son article 70 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Alexandre Lallet, Auditeur,

- les conclusions de M. Luc Derepas, Commissaire du gouvernement ;

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 322-2 du code de la sécurité sociale : « I. - La participation de l'assuré aux tarifs servant de base au calcul des prestations prévues aux 1°, 2° et 3° de l'article L. 321-1 peut être proportionnelle auxdits tarifs ou être fixée à une somme forfaitaire. Elle peut varier selon les catégories de prestations, les conditions dans lesquelles sont dispensés les soins, les conditions d'hébergement, la nature de l'établissement où les soins sont donnés. La participation de l'assuré peut être réduite en fonction de l'âge ou de la situation de famille du bénéficiaire des prestations. / La participation est fixée dans des limites et des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, par décision de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie, après avis de l'Union nationale des organismes d'assurance maladie complémentaire (...) » ; que l'article R. 322-1 du code de la sécurité sociale, pris sur le fondement de l'article L. 322-2 de ce code dans sa rédaction antérieure à l'intervention de la loi du 13 août 2004, et qui est en vigueur jusqu'à l'intervention d'une décision de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie prise en application du nouvel article L. 322-2 du même code, fixe à 20 p. 100 la participation des assurés sociaux pour les frais engagés dans le cadre d'une hospitalisation ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 322-3 du même code, dans sa rédaction résultant de la loi du 19 décembre 2005 de financement de la sécurité sociale : « La participation de l'assuré mentionnée au premier alinéa de l'article L. 322-2 peut être limitée ou supprimée dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, pris après avis de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie et de l'Union nationale des organismes d'assurance maladie complémentaire, dans les cas suivants : / 1°) lorsque, à l'occasion d'une hospitalisation ou au cours d'une période de temps déterminée, la dépense demeurant à la charge de l'intéressé dépasse un certain montant (...) » ;

Considérant que pour l'application de ces dispositions est intervenu le décret attaqué du 19 juin 2006 modifiant l'article R. 322-8 de ce code, qui fixe à 18 euros le montant de la participation de l'assuré aux tarifs servant de base au calcul des prestations en nature de l'assurance maladie pour les actes dits coûteux, définis comme les actes inscrits sur la liste mentionnée à l'article R. 162-52 du code de la sécurité sociale affectés soit d'un coefficient égal ou supérieur à 50, soit d'un tarif égal ou supérieur à 91 euros, ainsi que pour l'ensemble des frais intervenant au cours d'une hospitalisation dans un établissement de santé, lorsqu'il est effectué un acte thérapeutique ou un acte diagnostique dont la réalisation en établissement de santé est nécessaire à la sécurité des soins, affecté d'un coefficient égal ou supérieur à 50 ou d'un tarif égal ou supérieur à 91 euros et, enfin, pour l'ensemble des frais intervenant au cours d'une hospitalisation consécutive à une hospitalisation répondant aux conditions précédemment mentionnées et en lien direct avec elle ;

Considérant, en premier lieu, que si, dans sa rédaction résultant de la loi du 13 août 2004, l'article L. 322-2 du code de la sécurité sociale donnait compétence à l'Union nationale des caisses d'assurance maladie pour limiter ou supprimer, dans certaines hypothèses, la participation de l'assuré aux tarifs des actes et prestations liés à l'hospitalisation qui résulterait de l'application du taux de 20 p. 100, il résulte de l'article 70 de la loi de financement de la sécurité sociale du 19 décembre 2005 que cette compétence appartient désormais au Gouvernement, agissant par la voie d'un décret en Conseil d'Etat ; qu'en fixant à 18 euros le montant de cette participation pour les seuls actes dont le tarif est supérieur ou égal à 91 euros, l'article R. 322-8 du code de la sécurité sociale a pour effet de réduire le montant de la participation due par l'assuré, qui s'élèverait, en l'absence de ce décret, à 20 p. 100 de 91 euros, soit 18,20 euros ; que, par suite, les associations requérantes ne sont pas fondées à soutenir que le décret attaqué aurait méconnu les dispositions des articles L. 322-2 et L. 322-3 du code de la sécurité sociale ;

Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance que le Gouvernement ait rendu public, plusieurs mois avant la consultation de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie sur le projet de décret attaqué, son intention de laisser à la charge des assurés sociaux hospitalisés une participation forfaitaire de 18 euros pour les actes dits coûteux est sans incidence sur la régularité de cette consultation, dès lors que celle-ci est intervenue avant la signature du décret attaqué ; que le moyen tiré de l'irrégularité de la consultation de cette union doit, par suite, être écarté ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte des dispositions de l'article L. 322-2 du code de la sécurité sociale précédemment rappelées que la participation de l'assuré aux tarifs servant de base au calcul des prestations peut être proportionnelle à ces tarifs ou être fixée à une somme forfaitaire ; que, contrairement à ce que soutiennent les associations requérantes, l'autorité réglementaire pouvait procéder, en application de l'article L. 322-3 du même code, à la réduction de cette participation à une somme forfaitaire, sans qu'y fassent obstacle les dispositions de l'article R. 322-1 du même code dans leur rédaction applicable en l'espèce, qui fixent le montant de la participation due par les assurés sociaux de manière proportionnelle au tarif des actes qu'ils reçoivent ;

Considérant, en quatrième lieu, que l'article R. 322-8 du code de la sécurité sociale issu du décret attaqué se borne à réduire à 18 euros le montant de la participation due par l'assuré social lorsque, à l'occasion d'une hospitalisation ou au cours d'une période de temps déterminée, la dépense demeurant à sa charge dépasse un certain montant, en application du 1° de l'article L. 322-3 du code de la sécurité sociale ; qu'ainsi, et nonobstant la circonstance qu'il n'ait pas supprimé en totalité cette participation, les associations requérantes ne sont pas fondées à soutenir que ce décret méconnaîtrait l'objectif constitutionnel d'accessibilité et d'intelligibilité de la norme ; qu'en outre, la circonstance, à la supposer établie, que le dispositif mis en place par le décret attaqué ne procurerait pas les bénéfices qui en sont attendus par le Gouvernement, est sans incidence sur sa légalité ;

Considérant, en cinquième lieu, que, contrairement à ce qui est soutenu, aucune disposition législative ou réglementaire ne fait obstacle à ce que la participation forfaitaire de 18 euros prévue à l'article R. 322-8 du code de la sécurité sociale puisse, à la différence de la contribution forfaitaire prévue au II de l'article L. 322-2 du même code, faire l'objet d'une prise en charge au titre de la protection complémentaire en matière de santé, le cas échéant, pour les personnes modestes, dans le cadre du dispositif prévu par l'article L. 861-3 du code de la sécurité sociale ou des contrats mentionnés à l'article L. 863-1 du même code ; qu'en outre, l'article R. 322-8 du code de la sécurité sociale n'a pas pour objet et ne saurait avoir légalement pour effet de déroger aux dispositions qui suppriment, pour certaines catégories d'assurés sociaux, la participation prévue à l'article L. 322-2 de ce code ; qu'ainsi, eu égard aux garanties qui entourent le dispositif de participation forfaitaire des assurés sociaux aux actes dits coûteux, et nonobstant la circonstance, à la supposer établie, que le Gouvernement ne serait pas en mesure de contrôler l'augmentation des tarifs pratiqués par les organismes d'assurance maladie complémentaire, l'autorité réglementaire n'a pas méconnu les dispositions du onzième alinéa du préambule de la Constitution de 1946 en vertu duquel la nation garantit, notamment à l'enfant et à la mère, la protection de la santé ;

Considérant, en sixième et dernier lieu, que si, en règle générale, le principe d'égalité impose de traiter de la même façon les personnes placées dans des situations identiques, il n'en résulte pas pour autant qu'il oblige à traiter différemment des personnes se trouvant dans des situations différentes ; qu'en réduisant à une somme forfaitaire et unique le montant de la participation due par les assurés sociaux pour certains actes, l'autorité réglementaire n'a donc pas méconnu ce principe ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requête de l'ASSOCIATION FNATH, ASSOCIATION DES ACCIDENTES DE LA VIE et de l'ASSOCIATION CISS - COLLECTIF INTERASSOCIATIF SUR LA SANTE doit être rejetée, y compris, par voie de conséquence, les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

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Article 1er : La requête de l'ASSOCIATION FNATH, ASSOCIATION DES ACCIDENTES DE LA VIE et de l'ASSOCIATION CISS - COLLECTIF INTERASSOCIATIF SUR LA SANTE est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'ASSOCIATION FNATH, ASSOCIATION DES ACCIDENTES DE LA VIE, à l'ASSOCIATION CISS - COLLECTIF INTERASSOCIATIF SUR LA SANTE, au Premier ministre et au ministre de la santé, de la jeunesse et des sports.


Synthèse
Formation : 1ère et 6ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 295685
Date de la décision : 02/07/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 02 jui. 2007, n° 295685
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Alexandre Lallet
Rapporteur public ?: M. Derepas

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2007:295685.20070702
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