Vu la requête, enregistrée le 14 octobre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Monia A, demeurant au ...; Mme A demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision implicite par laquelle le consul général de France à Tunis a refusé de lui délivrer un visa d'entrée et de court séjour en France ;
2°) d'enjoindre au consul de lui délivrer le visa sollicité, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, signée le 4 novembre 1950 ;
Vu la convention d'application de l'accord de Schengen, signée le 19 juin 1990 ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le décret n° 2000-1093 du 10 novembre 2000 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Béatrice Bourgeois-Machureau, Maître des Requêtes,
- les conclusions de Mme Emmanuelle Prada Bordenave, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que la requête de Mme A, bien qu'elle ne tende expressément qu'à l'annulation de la décision implicite du consul général de France à Tunis rejetant sa demande de visa d'entrée et de court séjour en France, doit, dès lors que Mme A a saisi la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France d'un recours contre cette décision, être regardée comme dirigée contre la décision de rejet par la commission de ce recours, en date du 8 décembre 2005 ;
Considérant que la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France comporte l'exposé des motifs de droit et de fait sur lesquels elle est fondée ; que, par suite, le moyen tiré de l'absence de motivation du refus de visa opposé à la demande de Mme A manque en fait ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France s'est fondée, pour confirmer le refus du consul général de France à Tunis de délivrer un visa de court séjour à Mme A, d'une part, sur ce que l'intéressée ne justifiait pas disposer de ressources suffisantes pour subvenir à ses besoins durant ce séjour et sur ce que sa mère, Mme Fatma A, qui s'était engagée à la prendre en charge, n'établissait pas elle-même avoir ces ressources, d'autre part, sur le risque de détournement de l'objet du visa ;
Considérant, d'une part, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en retenant le premier de ces motifs, eu égard au fait que la mère de l'intéressée s'est bornée à produire une attestation d'accueil sans justifier de ses revenus et que Mme A a produit un relevé de compte bancaire dont le solde positif s'élève seulement à 120,31 euros, la commission de recours ait fait une inexacte application des articles 5 et 15 de la convention d'application de l'accord de Schengen, en date du 19 juin 1990 ;
Considérant, d'autre part, que, compte tenu du large pouvoir d'appréciation dont elle dispose, la commission a pu, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation, fonder sa décision sur un second motif tiré de ce que l'intéressée, qui n'a pas de charge de famille en Tunisie, dont les parents et les trois frères résident en France, et qui déclare vouloir s'occuper de son plus jeune frère et de sa mère, dont la maladie de longue durée est alléguée pouvait avoir un projet d'installation durable dans ce pays ;
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme A serait isolée en Tunisie ; que Mme A, qui ne produit aucun certificat de santé concernant sa mère, n'établit pas que l'état de santé de cette dernière mettrait celle-ci dans l'impossibilité de lui rendre visite dans ce pays ; que, dans les circonstances de l'espèce, la décision attaquée n'a pas porté au droit de la requérante au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et n'a, par suite, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant que, si Mme A fait valoir qu'elle s'est mariée, qu'un enfant est né de cette union le 4 octobre 2006 et qu'elle dispose désormais de revenus suffisants pour assurer le financement de son voyage et de son séjour en France, ces différents éléments, postérieurs à la décision attaquée, sont sans incidence sur sa légalité, qui s'apprécie à la date à laquelle la décision a été prise ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision implicite de rejet de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
Considérant que la présente décision, qui rejette la requête de Mme A, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de Mme A tendant à ce que le Conseil d'Etat enjoigne, sous astreinte, au consul général de France à Tunis de délivrer le visa sollicité doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme A demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme Monia A et au ministre des affaires étrangères.