Vu la requête, enregistrée le 27 septembre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par l'UNION SYNDICALE SOLIDAIRES DE L'ISERE, dont le siège est 12 bis, rue des Trembles à Grenoble (38100) ; l'UNION SYNDICALE SOLIDAIRES DE L'ISERE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2005-1041 du 26 août 2005 relatif au service chèque-emploi pour les très petites entreprises, en tant qu'il limite la protection des salariés sous contrat à durée déterminée et sous contrat à temps partiel ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la sécurité sociale, notamment son article L. 133-5-5 ;
Vu le code du travail ;
Vu la loi n° 2005-846 du 26 juillet 2005, notamment le 7° de son article 1er ;
Vu l'ordonnance n° 2005-903 du 2 août 2005 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Sébastien Veil, Auditeur,
- les conclusions de M. Christophe Devys, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que le 7° de l'article 1er de la loi du 26 juillet 2005 a habilité le Gouvernement à prendre par ordonnance toute mesure visant à « permettre aux très petites entreprises d'utiliser un dispositif simplifié pour leurs déclarations d'embauche ainsi que pour leurs déclarations relatives au paiement des cotisations et contributions sociales de leurs salariés, et pouvant, le cas échéant, tenir lieu de contrat de travail et de bulletin de paie et servir de titre de paiement » ; que sur ce fondement est intervenue l'ordonnance du 2 août 2005, qui a inséré dans le code de la sécurité sociale l'article L. 133-5-5 aux termes duquel : « Toute entreprise (...) dont l'effectif ne peut être supérieur à cinq salariés, peut adhérer à un service d'aide à l'accomplissement de ses obligations en matière sociale, proposé par l'organisme habilité par l'Etat et dénommé « service chèque-emploi pour les très petites entreprises ». (...) L'employeur qui utilise ce service est réputé satisfaire aux obligations prévues par les articles L. 121-1, L. 122-3-1, L. 122-16 et L. 212-4-3 du code du travail par la remise au salarié des éléments du chèque-emploi qui lui sont destinés » ; qu'en vertu du dernier alinéa du même article, ses modalités d'application sont définies par décret ;
Considérant que l'article 1er du décret attaqué du 26 août 2005, pris pour l'application de ces dispositions, a introduit dans le code de la sécurité sociale un article D.133-7 dont le premier alinéa dispose que : « préalablement à l'utilisation du « service chèque-emploi pour les très petites entreprises », l'employeur doit remplir un volet d'identification du salarié délivré par un centre national de traitement (...) » ; que les alinéas suivants du même article définissent les mentions que doit comporter le volet d'identification, sans reprendre l'ensemble de celles que prévoient les articles L. 122-3-1 et L. 212-4-3 du code du travail relatives, respectivement, au contenu minimal d'un contrat de travail à durée déterminée et d'un contrat de travail à temps partiel ; que doivent notamment figurer sur ce volet en application du décret attaqué la nature du contrat, en cas de contrat à durée déterminée, le motif du recours à un tel contrat, la durée du travail, celle de la période d'essai, la catégorie d'emploi, sa nature et son niveau, ainsi que les éléments composant sa rémunération ;
Considérant, d'une part, qu'eu égard à l'objectif de simplification poursuivi par la loi du 26 juillet 2005, les dispositions de l'article L. 133-5-5 suivant lesquelles l'employeur qui utilise le chèque-emploi est réputé satisfaire aux obligations prévues, notamment, par les articles L. 122-3-1 et L. 212-4-3 du code du travail doivent s'entendre, non comme permettant de dispenser l'employeur de faire figurer aucune des mentions prévues par ces articles sur le volet d'identification tenant lieu de contrat de travail, mais comme invitant le décret chargé d'en préciser les modalités d'application à déterminer celles de ces mentions qui, compte tenu de ce qu'elles constituent des garanties essentielles pour le salarié, doivent néanmoins figurer sur ce document simplifié ; que, contrairement à ce que soutient le syndicat requérant, les mentions ci-dessus énumérées figurant à l'article D. 133-7 satisfont à cette exigence ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le décret attaqué priverait les salariés concernés des garanties découlant des articles L. 122-3-1 et L. 212-4-3 du code du travail doit être écarté ;
Considérant, d'autre part, que si l'allègement des obligations pesant sur les employeurs recourant au « service chèque-emploi pour les très petites entreprises » aura pour conséquence qu'ils seront dispensés de présenter aux inspecteurs du travail plusieurs des documents que les employeurs doivent en règle générale tenir à la disposition de ces derniers, cette dispense ne résulte pas des dispositions du décret, mais de celles de l'article L. 133-5-5 du code de la sécurité sociale ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'UNION SYNDICALE SOLIDAIRES DE L'ISERE n'est pas fondée à demander l'annulation du décret du 26 août 2005 ; que, dès lors, ses conclusions tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de l'UNION SYNDICALE SOLIDAIRES DE L'ISERE est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'UNION SYNDICALE SOLIDAIRES DE L'ISERE, au Premier ministre, au ministre de la santé et des solidarités, au ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement et au ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et des professions libérales.