Vu, avec les pièces qui y sont visées, la décision en date du 30 mars 2005 par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux, saisi de la requête présentée par la SCP DE MEDECINS REICHHELD ET STURTZER à Wissembourg (Bas-Rhin) tendant, d'une part, à l'annulation du jugement du 21 octobre 2003 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg, sur la demande du centre hospitalier général de Wissembourg faisant suite au renvoi préjudiciel ordonné le 3 octobre 2001 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Strasbourg, a déclaré non valides les conventions des 14 septembre 1999 et 10 décembre 1999 conclues par le centre hospitalier général, la première avec l'hôpital allemand de psychiatrie et neurologie du Palatinat et le cabinet allemand de radiologie Benken, Schreyer et Sundermeyer, la seconde avec la SCP DE MEDECINS REICHHELD ET STURTZER à Wissembourg, et, d'autre part, à ce que ces conventions soient déclarées légales, a sursis à statuer jusqu'à ce que le Tribunal des conflits ait tranché la question de savoir quel est l'ordre de juridiction compétent pour connaître de ce litige ;
Vu la décision en date du 24 avril 2006 par laquelle le Tribunal des conflits a déclaré la juridiction administrative seule compétente pour connaître de la question préjudicielle relative aux conventions conclues le 14 septembre 1999 et le 10 décembre 1999, par le centre hospitalier général de Wissembourg et la SCP DE MEDECINS REICHHELD ET STURTZER ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié par le décret n° 60 ;728 du 25 juillet 1960 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mlle Anne Courrèges, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la SCP DE MEDECINS REICHHELD ET STURTZER et de Me Foussard, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Alsace du Nord et de la caisse primaire d'assurance maladie de Strasbourg,
- les conclusions de M. Luc Derepas, Commissaire du gouvernement ;
Sur la demande en appréciation de légalité :
Considérant qu'aux termes de l'article 34 ajouté au décret du 26 octobre 1849 par l'article 6 du décret du 25 juillet 1960 portant réforme de la procédure des conflits d'attribution reproduit à l'article R. 771 ;1 du code de justice administrative : « Lorsqu'une juridiction de l'ordre judiciaire ou de l'ordre administratif a, par une décision qui n'est plus susceptible de recours, décliné la compétence de l'ordre de juridiction auquel elle appartient au motif que le litige ne ressortit pas à cet ordre, toute juridiction de l'autre ordre, saisie du même litige, si elle estime que ledit litige ressortit à l'ordre de juridiction primitivement saisi, doit, par un jugement motivé qui n'est susceptible d'aucun recours même en cassation, renvoyer au Tribunal des conflits le soin de décider sur la question de compétence ainsi soulevée et surseoir à toute procédure jusqu'à la décision de ce tribunal » ; qu'aux termes de l'article 39 du même décret du 26 octobre 1849, également issu de l'article 6 du décret du 25 juillet 1960 : « La décision du Tribunal des conflits rendue sur renvoi s'impose à toutes les juridictions de l'ordre judiciaire et administratif (…) » ;
Considérant que le 14 septembre 1999, le centre hospitalier général de Wissembourg, établissement public de santé, l'hôpital allemand de psychiatrie et de neurologie du Palatinat et le cabinet allemand de radiologie Benken, Schreyer et Sundermeyer ont conclu une convention, dite de coopération, afin d'acquérir et d'exploiter, selon une plage horaire hebdomadaire définie, un appareil d'imagerie par résonance magnétique à Landau (Allemagne), en stipulant que leur contrat était régi par le droit allemand ; qu'une seconde convention est intervenue le 10 décembre 1999 entre le même établissement public de santé et la SCP DE MEDECINS REICHHELD ET STURTZER, dont le siège est à Wissembourg, en vue d'une utilisation conjointe de ce matériel ; que, saisi par le centre hospitalier général à la suite du refus de prise en charge, par la caisse primaire d'assurance maladie, des forfaits techniques relatifs à l'appareil, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Strasbourg a sursis à statuer et a renvoyé à la juridiction administrative une question préjudicielle relative à ces deux conventions ;
Considérant que, saisi, en application de l'article 34 du décret du 26 octobre 1849 précité, par une décision de renvoi en date du 30 mars 2005 du Conseil d'Etat statuant au contentieux sur l'appel de la SCP DE MEDECINS REICHHELD ET STURTZER dirigé contre le jugement en date du 21 octobre 2003 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg s'est prononcé en exécution du jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale, le Tribunal des conflits a déclaré, dans une décision en date du 24 avril 2006, que « la juridiction administrative est compétente pour connaître de la question préjudicielle relative aux conventions conclues le 14 septembre 1999 et le 10 décembre 1999, par le centre hospitalier général de Wissembourg et la SCP DE MEDECINS REICHHELD ET STURTZER » ; qu'il résulte du rapprochement de ce dispositif et du motif qui en est le soutien nécessaire, qui s'imposent à la juridiction administrative en application de l'article 39 du décret du 26 octobre 1849, que la question préjudicielle posée par le juge judiciaire doit s'entendre comme celle de savoir si l'établissement hospitalier français pouvait légalement conclure la convention de coopération du 14 septembre 1999 et la convention d'utilisation conjointe du 10 décembre 1999 qui en constitue l'accessoire ; que, par suite, en rejetant comme irrecevables les conclusions du centre hospitalier général de Wissembourg tendant à ce que le juge administratif se prononce sur la validité des délibérations de son conseil d'administration en date des 23 juin et 12 octobre 1999 autorisant et approuvant la passation de la convention de coopération et en déclarant non valides cette convention et la convention d'utilisation conjointe, le tribunal administratif de Strasbourg s'est mépris sur les limites de sa saisine ; que son jugement doit, dès lors, être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu, pour le Conseil d'Etat, d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande d'appréciation en validité présentée devant le tribunal administratif de Strasbourg ;
Considérant que, par un autre jugement en date du 21 octobre 2003, passé en force de chose jugée à la suite du donné acte du désistement de l'appel de la SCP DE MEDECINS REICHHELD ET STURTZER par une ordonnance du président de la troisième chambre de la cour administrative d'appel de Nancy en date du 31 mars 2004, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé la délibération du conseil d'administration du centre hospitalier général de Wissembourg du 12 octobre 1999 approuvant la conclusion de la convention de coopération du 14 septembre 1999 avec l'hôpital allemand de psychiatrie et de neurologie du Palatinat et le cabinet allemand de radiologie Benken, Schreyer et Sundermeyer, afin d'acquérir et d'exploiter l'appareil d'imagerie par résonance magnétique implanté en Allemagne au motif que l'établissement public de santé ne pouvait légalement décider d'acquérir cet équipement matériel lourd sans avoir obtenu l'autorisation administrative préalable requise par l'article L. 6122 ;1 du code de la santé publique ;
Considérant, d'une part, qu'en raison de cette annulation, qui est revêtue de l'autorité absolue de la chose jugée, la délibération du 12 octobre 1999 est réputée n'avoir jamais existé ; qu'il s'ensuit que la demande en appréciation de légalité est dépourvue d'objet en tant qu'elle porte sur cette délibération ;
Considérant, d'autre part, que l'autorité absolue de la chose jugée qui s'attache également au motif unique qui constitue le soutien nécessaire du jugement annulant la délibération du 12 octobre 1999, fait obstacle à ce que puissent être déclarées légales la délibération du 23 juin 1999 du centre hospitalier de Wissembourg autorisant la conclusion de la convention de coopération du 14 septembre 1999 et, par voie de conséquence, la décision de cet établissement de conclure la convention d'utilisation conjointe du 10 décembre 1999 ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la caisse primaire d'assurance maladie d'Alsace du Nord, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que la SCP requérante demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette société la somme demandée par la caisse primaire d'assurance maladie de l'Alsace du Nord et la caisse primaire d'assurance maladie de Strasbourg au même titre ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Strasbourg en date du 21 octobre 2003 est annulé.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions tendant à ce que soit déclarée illégale la délibération du conseil d'administration du centre hospitalier général de Wissembourg en date du 12 octobre 1999.
Article 3 : La délibération du conseil d'administration du centre hospitalier général de Wissembourg en date du 23 juin 1999 et la décision de cet établissement de conclure la convention du 10 décembre 1999 sont déclarées illégales.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la SCP DE MEDECINS REICHHELD ET STURTZER et les conclusions présentées devant le Conseil d'Etat par la caisse primaire d'assurance maladie de l'Alsace du Nord et la caisse primaire d'assurance maladie de Strasbourg au titre de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative sont rejetés.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la SCP DE MEDECINS REICHHELD ET STURTZER, à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Alsace du Nord, à la caisse primaire d'assurance maladie de Strasbourg, au centre hospitalier général de Wissembourg, à l'hôpital de psychiatrie et de neurologie du Palatinat, au cabinet de radiologie des docteurs Benken, Schreyer et Sundermeyer, à l'agence régionale d'hospitalisation d'Alsace et au ministre de la santé et des solidarités.