Vu le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE, enregistré le 4 mars 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 15 décembre 2004 en tant que la cour administrative d'appel de Nantes, faisant partiellement droit à l'appel de la SA Warsemann automobiles, a annulé le jugement du 4 février 2003 du tribunal administratif d'Orléans, et déchargé ladite société des compléments de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités correspondantes auxquelles elle a été assujettie au titre de la période du 31 juillet 1997 au 31 décembre 1998 par avis de mise en recouvrement du 14 septembre 2000, à raison de la remise en cause de l'application du régime de la marge à la vente de véhicules d'occasion ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la directive 77/388/CEE du Conseil du 17 mai 1977, modifiée par la directive 94/5/CE du Conseil du 14 février 1994 ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Olivier Japiot, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la SA Warsemann Automobiles,
- les conclusions de M. Stéphane Verclytte, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la SA Warsemann automobiles a été assujettie, pour la période du 31 juillet 1997 au 31 décembre 1998, à des compléments de taxe sur la valeur ajoutée au motif qu'elle avait appliqué le régime de taxation sur la marge lors de la revente de véhicules d'occasion, alors que ses fournisseurs, situés en Italie et en Espagne, n'avaient pas la qualité d'assujettis revendeurs au sens des dispositions de l'article 256 bis du code général des impôts ; que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 15 décembre 2004 en tant que la cour administrative d'appel de Nantes, faisant partiellement droit à l'appel de la SA Warsemann automobiles, a annulé le jugement du 4 février 2003 du tribunal administratif d'Orléans, et déchargé ladite société des impositions et pénalités en litige ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 256 bis du code général des impôts : 1° Sont également soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les acquisitions intracommunautaires de biens meubles corporels effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel ou par une personne morale non assujettie lorsque le vendeur est un assujetti agissant en tant que tel et qui ne bénéficie pas dans son Etat du régime particulier de franchise des petites entreprises (...) / 2° bis Les acquisitions intracommunautaires de biens d'occasion (...) effectuées à titre onéreux par un assujetti (...) ne sont pas soumises à la taxe sur la valeur ajoutée lorsque le vendeur ou l'assujetti est un assujetti revendeur qui a appliqué dans l'Etat membre de départ de l'expédition ou du transport du bien les dispositions de la législation de cet Etat prises pour la mise en oeuvre des B ou C de l'article 26 bis de la directive n° 77/388/C.E.E. du Conseil des Communautés européennes du 17 mai 1977 (...) ; qu'aux termes du I de l'article 297 A du même code : 1° La base d'imposition des livraisons par un assujetti revendeur de biens d'occasion (...) qui lui ont été livrés par un non redevable de la taxe sur la valeur ajoutée ou par une personne qui n'est pas autorisée à facturer la taxe sur la valeur ajoutée au titre de cette livraison est constituée de la différence entre le prix de vente et le prix d'achat (...) ; qu'aux termes de l'article 297 E du même code, dans sa rédaction applicable en l'espèce : Les assujettis qui appliquent les dispositions de l'article 297 A ne peuvent pas faire apparaître la taxe sur la valeur ajoutée sur leurs factures ou tous autres documents en tenant lieu ; que ces dispositions, issues de la loi de finances rectificative pour 1994 du 29 décembre 1994, ont pour objet de transposer l'article 26 bis de la sixième directive du 17 mai 1977, issu de l'article 1er de la septième directive du 14 février 1994 ; qu'il résulte desdites dispositions qu'une entreprise française assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée a la qualité d'assujetti revendeur et peut appliquer le régime de taxation sur marge prévu par l'article 297 A du code général des impôts, lorsqu'elle revend un bien d'occasion acquis auprès d'un fournisseur, situé dans un autre Etat membre, qui, en sa qualité d'assujetti revendeur, lui a délivré une facture conforme aux dispositions précitées de l'article 297 E du code général des impôts, et dont le fournisseur a aussi cette qualité ou n'est pas assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée ; que l'administration peut toutefois remettre en cause l'application de ce régime lorsque l'entreprise française ne pouvait ignorer la circonstance que son fournisseur n'avait pas la qualité d'assujetti revendeur et n'était pas autorisé à appliquer lui-même le régime de taxation sur marge prévu par l'article 26 bis de la directive du 17 mai 1977 ;
Considérant, ainsi, qu'après avoir relevé que les factures adressées à la SA Warsemann Automobiles mentionnaient explicitement que ses fournisseurs avaient appliqué la taxe sur la valeur ajoutée selon le régime de taxation sur marge, en application de la septième directive et des dispositions précitées du code général des impôts, et estimé, par une appréciation souveraine qui n'est pas arguée de dénaturation, qu'il n'était pas manifeste que ces fournisseurs n'auraient pas été autorisés à revendiquer la qualité d'assujetti revendeur, la cour a pu, sans commettre d'erreur de droit, en déduire que l'administration n'était pas fondée à remettre en cause l'application par la SA Warsemann Automobiles du régime de taxation sur marge ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros demandée par la SA Warsemann Automobiles au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est rejeté.
Article 2 : L'Etat versera à la SA Warsemann automobiles la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE et à la SA Warsemann automobiles.