Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 13 mai et 13 septembre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par la SOCIETE KERAN, dont le siège social est à La Gacilly (56200), représentée par son président directeur général en exercice ; la SOCIETE KERAN demande au Conseil d'Etat :
1°) d'ordonner avant-dire-droit à la commission nationale d'équipement commercial de communiquer à la requérante les éléments sur lesquels elle a fondé sa décision ;
2°) d'annuler la décision du 27 janvier 2005 de la commission nationale d'équipement commercial accordant à la SAS Morcia l'autorisation requise en vue de la création d'un supermarché de type maxidiscompte d'une surface de 570 m2 à l'enseigne Netto à La Gacilly (Morbihan) ;
3°) de mettre à la charge de la commission nationale d'équipement commercial la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de commerce ;
Vu la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 modifiée ;
Vu le décret n° 93-306 du 9 mars 1993 modifié ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Bernard Pignerol, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Yves Struillou, Commissaire du gouvernement ;
Sur les conclusions de la SOCIETE KERAN tendant à ce que soit ordonnée la communication de documents :
Considérant que la communication des documents demandés n'est pas nécessaire à la solution du litige ; que les conclusions de la SOCIETE KERAN doivent donc être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision de la commission nationale d'équipement commercial en date du 27 janvier 2005 délivrant à la SAS Morcia l'autorisation de créer un supermarché à La Gacilly :
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant que, pour l'application des dispositions combinées de l'article 1er de la loi du 27 décembre 1973 et des articles L. 720 ;1 à L. 720 ;3 du code de commerce, dans leur rédaction issue de la loi du 13 décembre 2000, il appartient aux commissions d'équipement commercial, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, d'apprécier si un projet soumis à autorisation est de nature à compromettre, dans la zone de chalandise intéressée, l'équilibre recherché par le législateur entre les diverses formes de commerce et, dans l'affirmative, de rechercher si cet inconvénient est compensé par les effets positifs du projet appréciés, d'une part, en tenant compte de sa contribution à l'emploi, à l'aménagement du territoire, à la concurrence, à la modernisation des équipements commerciaux et, plus généralement, à la satisfaction des besoins des consommateurs et, d'autre part, en évaluant son impact sur les conditions de circulation et de stationnement aux abords du site envisagé ; que, pour l'application de ces dispositions, la zone de chalandise de l'équipement commercial faisant l'objet d'une demande d'autorisation, qui correspond à la zone d'attraction que cet équipement est susceptible d'exercer sur la clientèle, doit être délimitée en tenant compte des conditions d'accès au site d'implantation du projet et des temps de déplacement nécessaires pour y accéder ; que, dans un second temps, l'inventaire des équipements commerciaux ou artisanaux de la zone de chalandise ainsi délimitée doit être effectué en retenant l'ensemble de ceux qui relèvent du même secteur d'activité que celui du projet, y compris ceux qui sont exploités sous la même enseigne que celle sous laquelle le projet, objet de l'autorisation, a été présenté ; que l'inventaire doit également inclure les projets autorisés à la date à laquelle statue la commission ;
Considérant que, pour délivrer l'autorisation sollicitée par la SAS Morcia, la commission nationale d'équipement commercial a évalué la surface de vente existant dans la zone de chalandise avant réalisation du projet, dans le secteur d'activité des grandes et moyennes surfaces de distribution à dominante alimentaire, en tenant compte, d'une part, de deux supermarchés existants de 3 063 m2, d'autre part, d'un supermarché en cours de création de 827 m2 ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que cette évaluation était inexacte, en raison de l'omission de 700 m2 de surface de vente, dans le même secteur d'activité, résultant d'une autorisation délivrée par la commission départementale d'équipement commercial le 7 février 2001 à la SOCIETE KERAN, toujours en vigueur à la date de la décision attaquée, en vue d'étendre son supermarché à La Gacilly ; qu'ainsi, la décision attaquée a été prise sur le fondement de faits matériellement inexacts ; que, par suite, la SOCIETE KERAN est fondée à en demander l'annulation ;
Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros que demande la SOCIETE KERAN, au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : La décision de la commission nationale d'équipement commercial du 27 janvier 2005 délivrant à la SAS Morcia l'autorisation d'ouvrir un supermarché à La Gacilly est annulée.
Article 2 : L'Etat versera à la SOCIETE KERAN la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la SOCIETE KERAN est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE KERAN, à la société SAS Morcia, à la commission nationale d'équipement commercial et au ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et des professions libérales.