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28/06/2006 | FRANCE | N°273979

France | France, Conseil d'État, 6eme sous-section jugeant seule, 28 juin 2006, 273979


Vu la requête, enregistrée le 9 novembre 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE MEURTHE-ET-MOSELLE ; le PREFET DE MEURTHE-ET-MOSELLE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 12 octobre 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Nancy a annulé son arrêté du 9 octobre 2004 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... A et fixant l'Algérie comme pays de destination ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A devant ce tribunal ;

Vu les autres pièces du

dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des li...

Vu la requête, enregistrée le 9 novembre 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE MEURTHE-ET-MOSELLE ; le PREFET DE MEURTHE-ET-MOSELLE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 12 octobre 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Nancy a annulé son arrêté du 9 octobre 2004 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... A et fixant l'Algérie comme pays de destination ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A devant ce tribunal ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mlle Maud Vialettes, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Mattias Guyomar, Commissaire du gouvernement ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par M. A :

Considérant que la requête du PREFET DE MEURTHE-ET-MOSELLE contient l'exposé de faits et de moyens ainsi que l'énoncé de conclusions ; qu'elle est, dès lors, recevable ;

Sur la légalité de la décision de reconduite à la frontière :

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 en vigueur à la date à laquelle a été pris l'arrêté ordonnant la reconduite à la frontière de M. A : « Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (…) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré s'est maintenu sur le territoire au delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (…) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, de nationalité algérienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 21 février 2002, de la décision du PREFET DE MEURTHE-ET-MOSELLE du 20 février 2002 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire français ; qu'il se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite à la frontière d'un étranger ;

Considérant que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Nancy s'est fondé, pour annuler l'arrêté du 9 octobre 2004 ordonnant la reconduite à la frontière de M. A, sur ce qu'il n'était pas établi que le préfet avait, avant de prendre cet arrêté, procédé à un nouvel examen de la situation de M. A ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que M. A a été entendu par les services de police les 8 et 9 octobre 2004, notamment sur sa situation personnelle et que le préfet ainsi qu'il l'a, d'ailleurs, indiqué dans son arrêté, a pris en compte cette situation avant d'ordonner la reconduite de M. A à la frontière ; que, par suite, le PREFET DE MEURTHE-ET-MOSELLE est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Nancy a retenu ce motif pour annuler l'arrêté de reconduite à la frontière ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A devant le tribunal administratif de Nancy et devant le Conseil d'Etat ;

Sur la légalité externe :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté de reconduite attaqué a été signé au nom du PREFET DE MEURTHE-ET-MOSELLE par M. Y... B, sous-préfet de Briey, titulaire d'une délégation de signature du 20 juin 2003 régulièrement publiée le 24 juin 2003 ; que, dès lors, cet arrêté n'est pas entaché d'incompétence ;

Sur la légalité interne :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A est célibataire et sans enfant ; qu'il n'apporte pas la preuve qu'il serait dépourvu d'attaches familiales en Algérie où résident sa mère et quatre de ses frères et soeurs ; que, dès lors, l'arrêté attaqué n'a pas porté atteinte à son droit au respect de sa vie privée et familiale et n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

Considérant que si M. A soutient que l'un de ses frères a été assassiné à Chlef en 1997 par des terroristes et qu'il pouvait craindre de subir le même sort, il n'apporte aucune précision ni justification susceptible d'établir la réalité des risques auxquels il serait personnellement exposé ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance, par la décision fixant le pays de destination, des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE MEURTHE-ET-MOSELLE est fondé à demander l'annulation du jugement du 12 octobre 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Nancy a annulé son arrêté du 9 octobre 2004 ordonnant la reconduite à la frontière de M. A et fixant l'Algérie comme pays de destination ;

Sur les conclusions à fin d'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par M. A au titre des frais engagés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 12 octobre 2004 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Nancy est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A devant ce tribunal et les conclusions présentées par M. A devant le Conseil d'Etat sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE MEURTHE-ET-MOSELLE, à M. X... A et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.


Synthèse
Formation : 6eme sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 273979
Date de la décision : 28/06/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 28 jui. 2006, n° 273979
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Bonichot
Rapporteur ?: Mlle Maud Vialettes
Rapporteur public ?: M. Guyomar

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2006:273979.20060628
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