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24/05/2006 | FRANCE | N°280942

France | France, Conseil d'État, 3eme et 8eme sous-sections reunies, 24 mai 2006, 280942


Vu le recours, enregistré le 27 mai 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler les articles 2 et 3 de l'arrêt du 2 février 2005 par lesquels la cour administrative d'appel de Nantes, faisant partiellement droit à l'appel formé par M. et Mme A contre le jugement du 26 janvier 2001 du tribunal administratif de Nantes, a déchargé les intéressés des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auquel ils

ont été assujettis au titre des années 1992 et 1993 résultant de l...

Vu le recours, enregistré le 27 mai 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler les articles 2 et 3 de l'arrêt du 2 février 2005 par lesquels la cour administrative d'appel de Nantes, faisant partiellement droit à l'appel formé par M. et Mme A contre le jugement du 26 janvier 2001 du tribunal administratif de Nantes, a déchargé les intéressés des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auquel ils ont été assujettis au titre des années 1992 et 1993 résultant de la prise en compte dans leur revenu imposable de la pension de retraite versée par l'Etat italien à M. A ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses précédentes écritures ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention signée le 5 octobre 1989 entre la France et l'Italie en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscale en matière d'impôt sur le revenu et sur la fortune ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Anne Egerszegi, Auditeur,

- les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de M. A,

- les conclusions de M. Emmanuel Glaser, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE se pourvoit en cassation contre l'arrêt rendu le 2 février 2005 par la cour administrative d'appel de Nantes en tant qu'il a ordonné la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles M. et Mme A ont été assujettis au titre des années 1992 et 1993 résultant de la prise en compte dans la détermination de leur revenu imposable, des pensions de retraite versées par l'Italie à M. A, ressortissant de cet Etat ;

Considérant qu'aux termes du a) du 2 de l'article 19 de la convention fiscale signée le 5 octobre 1989 entre la France et l'Italie : Les pensions versées par un Etat ou l'une de ses subdivisions politiques ou administratives ou collectivités locales (dans le cas de l'Italie) ou collectivités territoriales (dans le cas de la France), soit directement, soit par prélèvement sur des fonds qu'ils ont constitués, à une personne physique au titre de services rendus à cet Etat ou à cette subdivision ou collectivité, ne sont imposables que dans cet Etat ; que l'article 24 de la même convention prévoit : La double imposition est évitée de la manière suivante : 1. Dans le cas de la France : a) Les bénéfices et autres revenus positifs qui proviennent de l'Italie et qui sont imposables conformément aux dispositions de la convention, sont également imposables en France lorsqu'ils reviennent à un résident de France. L'impôt italien n'est pas déductible pour le calcul du revenu imposable en France. Mais le bénéficiaire a droit à un crédit d'impôt imputable sur l'impôt français dans la base duquel ces revenus sont compris. Ce crédit d'impôt est égal : /- pour les revenus visés aux articles 10, 11, 12, 16 et 17 et au paragraphe 8 du protocole annexé à la convention, au montant de l'impôt en Italie, conformément aux dispositions de ces articles. Il ne peut toutefois excéder le montant de l'impôt français correspondant à ces revenus ; / - pour les autres revenus, au montant de l'impôt français correspondant. Cette disposition est également applicable aux rémunérations visées aux articles 8, 13, paragraphe 3 et 19 ; qu'il résulte de ces stipulations que si la convention réserve à l'Italie le droit d'imposer une pension de retraite versée par l'Etat italien à un ressortissant italien résidant en France, elle n'exclut pas que, pour le calcul de l'impôt sur le revenu dont l'intéressé est, par ailleurs, redevable en France, sa capacité contributive soit déterminée au regard de la totalité des revenus qu'il perçoit, quelle que soit leur origine nationale ou étrangère ; que la France et l'Italie ont entendu éliminer la double imposition susceptible d'affecter une telle pension, par l'attribution d'un crédit d'impôt imputable sur le montant de l'impôt français ; qu'ainsi, la pension versée par l'Etat italien à un résident français doit être prise en compte dans le revenu imposable de ce contribuable, lequel bénéficie par ailleurs d'un crédit d'impôt égal au montant de l'impôt français correspondant à ce revenu ; que, dès lors, la cour administrative d'appel de Nantes a commis une erreur de droit en jugeant que les pensions de retraite versées par l'Etat italien à un de ses ressortissants résidant en France ne devaient pas être comprises dans le revenu imposable déterminé selon la législation fiscale française ; qu'en conséquence, l'arrêt attaqué doit être annulé en ce qu'il a ordonné la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles M. et Mme A ont été assujettis au titre des années 1992 et 1993 résultant de la prise en compte pour la détermination du revenu imposable desdites années, de la pension de retraite versée par l'Etat italien à M. A ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative et de régler l'affaire au fond ;

Considérant qu'en vertu de l'article 4A du code général des impôts, seules les personnes qui ont en France leur domicile fiscal au sens de l'article 4B de ce code sont passibles de l'impôt sur le revenu sur l'ensemble de leurs revenus, alors que les autres ne sont passibles de cet impôt qu'à raison de leurs seuls revenus de source française ; qu'aux termes du 1 de l'article 4 de la convention fiscale franco-italienne du 5 octobre 1989 : Au sens de la présente convention, l'expression résident d'un Etat désigne toute personne qui, en vertu de la législation de cet Etat, est assujettie à l'impôt dans cet Etat, en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction ou de tout autre critère de nature analogue. Toutefois, cette expression ne comprend pas les personnes qui ne sont assujetties à l'impôt dans cet Etat que pour les revenus y ayant leur source ou pour la fortune qui y est située ; qu'aux termes du 1 de l'article 25 de la convention précitée : Les nationaux d'un Etat, qu'ils soient ou non résidents de l'un des Etats, ne sont soumis dans l'autre Etat à aucune imposition ou obligation y relative, qui est autre ou plus lourde que celles auxquelles sont ou pourront être assujettis les nationaux de cet autre Etat qui se trouvent dans la même situation ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. et Mme A avaient au cours des années d'imposition en litige leur foyer d'habitation principal à Beaucouzé (Maine-et-Loire) ; qu'ils n'établissent pas avoir eu le centre de leurs intérêts vitaux en Italie ; que les intéressés devaient, dès lors, être regardés comme ayant leur domicile fiscal en France au sens de l'article 4B du code général des impôts ; que la circonstance que M. A était assujetti à l'impôt en Italie à raison de la pension de retraite qu'il percevait de l'Etat italien, n'était pas de nature à lui conférer, en application des stipulations de l'article 4 de la convention précitée, la qualité de résident en Italie ; que dès lors, en application de l'article 4A du code général des impôts, M. et Mme A étaient redevables de l'impôt sur le revenu à raison de la totalité des revenus qu'ils percevaient ; qu'en application de l'article 24 de la convention précitée, les intéressés ont bénéficié d'un crédit d'impôt égal au montant de l'impôt français appliqué à la pension de retraite perçue par M. A, dont le montant, non contesté, a été imputé sur le montant de l'impôt sur le revenu français dû ; que M. et Mme A, qui n'ont d'ailleurs pas demandé à bénéficier des dispositions du 3 de l'article 26 de la convention qui prévoit la possibilité de signaler aux autorités des deux pays les anomalies fiscales résultant de son application, ne sont pas fondés à invoquer une prétendue violation de l'article 25 de la convention, cette stipulation interdisant seulement à la France d'imposer un italien plus lourdement qu'un français placé dans la même situation, ce qui n'exclut pas que cet italien soit, par ailleurs, défavorisé par l'effet de la législation de son propre pays ; que dès lors, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 26 janvier 2001, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande tendant à la réduction des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1992 et 1993 du fait de la prise en compte dans leur revenu imposable de la pension de retraite versée à M. A par l'Etat italien ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par M. et Mme A au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : Les articles 2 et 3 de l'arrêt du 2 février 2005 de la cour administrative d'appel de Nantes sont annulés.

Article 2 : Les conclusions présentées par M. et Mme A devant la cour administrative d'appel de Nantes tendant à la réduction des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1992 et 1993 et celles présentées devant le Conseil d'Etat sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE et à M. et Mme X... A.


Synthèse
Formation : 3eme et 8eme sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 280942
Date de la décision : 24/05/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 24 mai. 2006, n° 280942
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Hagelsteen
Rapporteur ?: Mme Anne Egerszegi
Rapporteur public ?: M. Glaser
Avocat(s) : SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2006:280942.20060524
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