Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 25 août 2004, présentée par Mlle Jivamani X demeurant ... ; Mlle X demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 20 juillet 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 mai 2004 du préfet de la Seine-Saint-Denis décidant sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 500 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- les conclusions de Mme Emmanuelle Prada Bordenave, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé à Mlle X, de nationalité mauricienne, par une décision en date du 1er avril 2004, notifiée à l'intéressé le 6 avril 2004, la délivrance d'un titre de séjour ; que, par suite, Mlle X, qui s'était maintenue sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la notification de cette décision, se trouvait dans le cas où le préfet peut décider la reconduite à la frontière d'un étranger sur le fondement des dispositions précitées de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : ( ... ) 3° A l'étranger, (...) qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant. ( ... ) ; que si un étranger se trouve, à la date de l'arrêté décidant sa reconduite à la frontière, dans un cas où il doit bénéficier de plein droit d'un titre de séjour, il ne peut faire légalement l'objet d'une telle mesure ;
Considérant que Mlle X fait valoir qu'elle réside habituellement en France depuis 1993 ; que les documents qu'elle produit, notamment pour les années 1994 et 1995, pour lesquelles elle produit des certificats de deux médecins indiquant qu'elle a fait l'objet de soins à plusieurs reprises durant les années 1994 à 1997, ainsi que des attestations circonstanciées de membres de sa famille en France, sont suffisants pour établir la réalité d'un séjour habituel de dix ans en France ; que, par suite, Mlle X est fondée à soutenir que l'arrêté décidant sa reconduite à la frontière est entaché d'illégalité pour avoir été pris en méconnaissance des dispositions précitées du 3° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mlle X est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 8 avril 2004 décidant sa reconduite à la frontière ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 500 euros que Mlle X demande au titre des frais qu'elle a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du 20 juilllet 2004 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise et l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 14 mai 2004 décidant la reconduite à la frontière de Mlle X sont annulés.
Article 2 : L'Etat versera à Mlle X la somme de 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mlle Jivamani X, au préfet de la Seine-Saint-Denis et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.