Vu la requête, enregistrée le 9 mai 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, présentée pour M. Georges X demeurant ... et pour Mme Rosette Y demeurant ... ; M. X et Mme Y demandent au Conseil d'Etat de prononcer, en application de l'article R. 931-3 du code de justice administrative, une astreinte de 100 euros par jour en vue d'assurer l'exécution de l'arrêt du 28 juillet 1993 par lequel le Conseil d'Etat à décidé que la somme de 310 110,93 F (47 276,11 euros), que l'Etat avait été condamné à verser à M. X et à Mme Y par jugement du tribunal administratif de Nice du 27 février 1987, porterait intérêts au taux légal à compter du 6 février 1984 et que les intérêts échus les 4 mai 1987, 10 février 1989, 19 décembre 1991 et 17 mars 1993 seraient capitalisés à ces dates pour produire eux-mêmes des intérêts ;
Vu la décision du 28 juillet 1993 du Conseil d'Etat statuant au contentieux ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mlle Maud Vialettes, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Boulloche, Boulloche, avocat de M. X et de Mme Y,
- les conclusions de M. Mattias Guyomar, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que l'article L. 911-5 du code de justice administrative dispose : En cas d'inexécution d'une décision rendue par une juridiction administrative, le Conseil d'Etat peut, même d'office, prononcer une astreinte contre les personnes morales de droit public ou les organismes de droit privé chargés de la gestion d'un service public pour assurer l'exécution de cette décision ; qu'aux termes de l'article R. 931-3 du même code : Il peut être demandé au Conseil d'Etat de prononcer une astreinte pour assurer l'exécution d'une décision rendue par le Conseil d'Etat ou par une juridiction administrative spéciale./ Ces demandes ne peuvent être présentées, sauf décision explicite de refus d'exécution opposée par l'autorité administrative, qu'après l'expiration d'un délai de six mois à compter de la date de notification des décisions juridictionnelles ;
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 1153-1 du code civil : En toute matière, la condamnation à une indemnité emporte intérêts au taux légal même en l'absence de demande ou de disposition spéciale du jugement. Sauf disposition contraire de la loi, ces intérêts courent à compter du prononcé du jugement à moins que le juge n'en décide autrement ; qu'aux termes de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1975 relative au taux légal, désormais codifié à l'article L. 313-3 du code monétaire et financier, le taux d'intérêt légal est majoré de cinq points à l'expiration d'un délai de deux mois à compter du jour où le jugement prononçant une condamnation pécuniaire est devenu exécutoire ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions que, même en l'absence de demande en ce sens et même lorsque le juge ne l'a pas explicitement prévu, tout jugement prononçant une condamnation à une indemnité fait courir les intérêts du jour de son prononcé jusqu'à son exécution, au taux légal puis au taux majoré s'il n'est pas exécuté dans les deux mois de sa notification ;
Considérant que, par un jugement du 27 février 1987, notifié le 12 mars suivant, le tribunal administratif de Nice a condamné l'Etat à verser à M. X et à Mme Y, en réparation du préjudice subi du fait du retrait irrégulier d'un permis de construire qui leur avait été accordé en 1979, la somme de 310 110,93 F (47 276,11 euros) ; qu'en application des dispositions citées plus haut, cette somme a produit des intérêts au taux légal à compter du 27 février 1987 et au taux majoré à compter du 13 mai 1987 ;
Considérant, que, par une décision du 28 juillet 1993, notifiée le 12 août 1993, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a notamment décidé que la somme de 310 110,93 F (47 276,11 euros) allouée par le jugement du tribunal administratif de Nice à M. X et à Mme Y, porterait intérêts au taux légal à compter du 6 février 1984 et que les intérêts échus les 4 mai 1987, 10 février 1989, 19 décembre 1991 et 17 mars 1993 seraient capitalisés à ces dates pour produire eux-mêmes des intérêts ; qu'il est constant que cette décision du Conseil d'Etat n'a pas été exécutée dans un délai de deux mois à compter de sa notification ; que dès lors, il résulte des dispositions citées que les intérêts attribués par la décision du Conseil d'Etat devaient être calculés au taux majoré à compter de deux mois suivant la notification de cette décision, soit à partir du 13 octobre 1993, et non, comme le soutiennent M. X et Mme Y, à compter de deux mois suivant la décision du tribunal administratif de Nice ;
Considérant qu'il n'est pas contesté que l'Etat a procédé au paiement, le 20 août 1987 de 327 251,98 F (49 889,24 euros), le 21 mars 1995 de 93 697,57 F (14 284,10 euros) et le 26 mai 1998 de 125 716,44 F (19 165,35 euros), au bénéfice de M. X et de Mme Y ; que la somme de ces trois versements, d'un montant de 545 665,99 F (83 186,69 euros), est supérieure à l'indemnité de 310 110,93 F (47 276,11 euros) allouée par le tribunal administratif de Nice augmentée des intérêts au taux légal et au taux majoré calculés conformément aux modalités qui ont été détaillées ci-dessus ; qu'il suit de là que l'arrêt du 28 juillet 2003 du Conseil d'Etat a été entièrement exécuté et que la requête de M. X et de Mme Y, tendant à ce que le Conseil d'Etat prononce une astreinte de 100 euros par jour à l'encontre de l'Etat pour assurer l'exécution de sa décision, doit être rejetée ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : La requête de M. X et de Mme Y est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Georges X, à Mme Rosette Y et au ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer.