Vu la requête, enregistrée le 28 juillet 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Dorjee X, demeurant ... ; M. X demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 17 juin 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 avril 2003 par lequel le préfet de police a décidé sa reconduite à la frontière et a désigné le pays de destination de la reconduite ;
2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention de Genève du 28 juillet 1951 ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu la loi n° 52-893 du 25 juillet 1952 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- les conclusions de Mme Boissard, Commissaire du gouvernement ;
Sur la légalité de la mesure de reconduite à la frontière :
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité chinoise, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 13 février 2002, de la décision du préfet de police du même jour, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il entrait ainsi dans le champ d'application de la disposition précitée ;
Considérant que si l'arrêté attaqué fait état de ce que M. X est de nationalité tibétaine, cette erreur matérielle est sans incidence sur sa légalité ;
Considérant que les stipulations du 2 de l'article 31 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 et les dispositions de la loi du 25 juillet 1952 modifiée impliquent nécessairement que l'étranger qui sollicite la reconnaissance de la qualité de réfugié soit autorisé à demeurer provisoirement sur le territoire jusqu'à ce qu'il ait été statué sur sa demande ;
Considérant qu'aux termes de l'article 10 de la loi du 25 juillet 1952 modifiée : (...) l'admission en France d'un demandeur d'asile ne peut être refusée que si (...) 4° La demande d'asile repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures d'asile ou n'est présentée qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement prononcée ou imminente ; qu'aux termes de l'article 12 de la loi du 25 juillet 1952, (...) L'étranger présent sur le territoire français dont la demande d'asile entre dans l'un des cas visés aux 2° et 4° de l'article 10 bénéficie du droit à se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides, lorsqu'il s'agit d'une décision de rejet. En conséquence, aucune mesure d'éloignement mentionnée aux articles 19, 22, 23 ou 26 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 ne peut être mise à exécution avant la décision de l'office (...) ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la demande d'admission au statut de réfugié présentée par M. X a été rejetée le 13 février 2001 par une décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides confirmée le 14 décembre 2001 par la commission des recours des réfugiés ; que si M. X a saisi l'office français de protection des réfugiés et apatrides d'une demande de réexamen de sa qualité de réfugié le 6 décembre 2002, qui a été rejetée par une décision du 14 janvier 2003 qu'il a contestée par un recours formé le 25 février 2003 auprès de la commission des recours des réfugiés, il ne ressort pas des pièces du dossier que la nouvelle demande de M. X ferait état de faits nouveaux portés à la connaissance de l'office français de protection des réfugiés et apatrides et de la commission des recours des réfugiés ; qu'elle devait dès lors être regardée comme ayant manifestement pour seul objet de faire échec, dans un but dilatoire, à la mesure d'éloignement susceptible d'être prise à son encontre ; que, dans ces conditions, le préfet de police n'était pas tenu de délivrer à M. X un nouveau titre provisoire lui permettant de séjourner régulièrement en France jusqu'à ce que la commission des recours des réfugiés ait statué sur sa nouvelle demande, et qu'il a pu légalement ordonner sa reconduite à la frontière par l'arrêté attaqué ;
Sur la légalité de la mesure fixant le pays de destination de la reconduite :
Considérant que si l'arrêté attaqué fait état de ce que M. X est de nationalité tibétaine, cette erreur matérielle n'est pas, ainsi que l'a jugé à bon droit le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris, de nature à entacher d'illégalité la mesure fixant comme pays de destination le pays dont il a la nationalité ou qui lui a délivré un titre de voyage en cours de validité, ou encore à destination de tout autre pays dans lequel il établit être légalement admissible ;
Considérant que si M. X, dont la nouvelle demande de reconnaissance de la qualité de réfugié a d'ailleurs été rejetée par une décision du directeur de l'office français de protection des réfugiés et apatrides du 14 janvier 2003, fait état de craintes pour sa sécurité en cas de retour dans son pays d'origine en raison de son origine tibétaine, ses allégations ne sont assorties d'aucune précision de nature à établir la réalité des risques auxquels il serait personnellement exposé ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que le préfet de police n'aurait pu légalement fixer le pays dont il a la nationalité comme pays de destination doit être écarté ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de M. X est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Dorjee X, au préfet de police et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.