Vu la requête, enregistrée le 11 février 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE ; le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 3 janvier 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Toulouse a annulé son arrêté du 31 décembre 2002 décidant la reconduite à la frontière de M. Slah YX ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. YX devant le tribunal administratif de Toulouse ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988, dans sa rédaction issue de l'avenant signé le 19 décembre 1991 ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme de Clausade, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Roger, Sevaux, avocat de M. YX,
- les conclusions de M. Devys, Commissaire du gouvernement ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : « Le représentant de l'Etat dans le département et à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée sur le territoire sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré (...) » ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. YX, de nationalité tunisienne, est entré en France le 1er juin 2000 sous couvert d'un visa touristique ; qu'il s'est maintenu sur le territoire au-delà d'un délai de trois mois à compter de son entrée sur le territoire, sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré ; qu'il se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 2° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant, toutefois, qu'aux termes de l'article 10 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 : « Un titre de séjour pour une durée de dix ans est délivré de plein droit a) au conjoint tunisien d'un ressortissant français (...) » ; que ces stipulations, qui prescrivent que le ressortissant tunisien remplissant les conditions prévues doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, font obstacle à ce que l'intéressé puisse légalement faire l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière, alors même qu'il n'aurait pas sollicité la délivrance d'un tel titre ;
Considérant que M. YX s'est marié le 29 octobre 2002 avec une ressortissante française ; que, dès lors, il remplissait à la date de l'arrêté attaqué les conditions prévues par les stipulations précitées et ne pouvait donc faire l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE LA HAUTE-GARONNE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Toulouse a annulé son arrêté du 31 décembre 2002, ordonnant la reconduite à la frontière de M. YX ;
Sur les conclusions présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que M. YX a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Roger, Sevaux, avocat de M. YX, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros qu'elle demande à ce titre ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête du PREFET DE LA HAUTE-GARONNE est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera à la SCP Roger, Sevaux, avocat de M. YX, une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que ladite société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE LA HAUTE-GARONNE, à M. Slah YX et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.