Vu la requête, enregistrée le 24 mai 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Mahmut X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 22 avril 2002 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Rennes a renvoyé à une formation de jugement du tribunal administratif le jugement de ses conclusions dirigées contre l'arrêté du 19 avril 2002 le plaçant en rétention administrative et rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du 18 mai 2001 du préfet d'Ille-et-Vilaine décidant sa reconduite à destination de la Turquie, pays dont il a la nationalité ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 808,35 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, adoptée à New York le 10 décembre 1984 ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Desrameaux, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Keller, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ... 3°) Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité turque, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 13 avril 2001, de la décision du préfet d'Ille-et-Vilaine du même jour lui refusant un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il était ainsi dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant que, par arrêtés du 18 mai 2001, dont il n'est pas contesté qu'ils sont devenus définitifs le préfet d'Ille-et-Vilaine a ordonné la reconduite à la frontière de M. X et a fixé la Turquie, comme pays de destination de la reconduite ; que, par décision en date du 19 avril 2002, le préfet d'Ille-et-Vilaine a ordonné le placement en rétention administrative de M. X, en vue d'exécuter les arrêtés du 18 mai 2001 ;
Considérant que, lorsqu'un arrêté de reconduite à la frontière a été dépourvu de mesure d'exécution pendant une durée anormalement longue, caractérisée par un changement de circonstances de fait ou de droit, et que ce retard est exclusivement imputable à l'administration, l'exécution d'office d'une reconduite à la frontière doit être regardée comme fondée non sur l'arrêté initial, même si celui-ci est devenu définitif faute d'avoir été contesté dans les délais, mais sur un nouvel arrêté de reconduite à la frontière, dont l'existence est révélée par la mise en oeuvre de l'exécution d'office elle-même et qui doit être regardé comme s'étant substitué à l'arrêté initial ;
Considérant qu'en l'espèce, la durée qui s'est écoulée entre la date des arrêtés ordonnant la reconduite à la frontière et fixant le pays de renvoi de M. X et la décision ordonnant son placement en rétention administrative, en vue d'assurer l'exécution d'office desdits arrêtés n'est pas une durée anormalement longue de nature à révéler l'existence d'une nouvelle décision ; que le préfet d'Ille-et-Vilaine s'est en vérité, borné le 19 avril 2002 à mettre à exécution ses arrêtés du 18 mai 2001 ; que, dès lors, les conclusions de la requête tendant à l'annulation de ces arrêtés dont ainsi qu'il a été dit, il n'est pas contesté qu'ils n'avaient pas été attaqués dans le délai de recours, sont tardives et à ce titre irrecevables ;
Considérant enfin que c'est à bon droit que le magistrat délégué s'est estimé incompétent pour statuer sur les conclusions dirigées contre le placement en rétention administrative ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande d'annulation des arrêtés du 18 mai 2001 et renvoyé à une formation de jugement du tribunal le litige relatif à ses conclusions dirigées contre l'arrêté du 19 avril 2002 le plaçant en rétention administrative ;
Sur les conclusions de M. X tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. AYDIN demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de M. X est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Mahmut X, au préfet d'Ille-et-Vilaine et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.