Vu le recours, enregistré le 24 juin 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le ministre demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 28 mars 2002 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon, faisant droit aux conclusions de l'appel interjeté par la SA Bresse auto sport, a, en premier lieu, annulé l'article 3 du jugement du 30 avril 1997 par lequel le tribunal administratif de Lyon, après avoir substitué les intérêts de retard aux pénalités de mauvaise foi assignées à cette société, a rejeté les conclusions de l'intéressée tendant à la décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés auxquelles elle avait été assujettie au titre des exercices clos de 1986 à 1988 et des intérêts de retard afférents à ces suppléments, en deuxième lieu, prononcé la décharge de ces droits supplémentaires et intérêts d'impôt sur les sociétés, en troisième et dernier lieu, assorti des intérêts moratoires prévus à l'article L. 208 du livre des procédures fiscales le remboursement, par l'administration fiscale, des sommes correspondant aux impositions dont la société était ainsi déchargée ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Bereyziat, Auditeur,
- les observations de Me Choucroy, avocat de la SA Bresse auto sport,
- les conclusions de M. Collin, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que la SA Bresse auto sport, créée le 22 février 1984 et ayant pour objet les réparations, vente et locations de tous véhicules à moteur, a conclu le 2 avril 1984 avec la société BMW France un contrat de concession relatif à la commercialisation des véhicules neufs de cette marque dans le département de l'Ain ; que la SA Bresse auto sport a fait l'objet d'une vérification de comptabilité, à l'issue de laquelle l'administration fiscale a estimé que la contribuable avait repris l'activité préexistante d'un précédent concessionnaire de la même marque automobile et ne pouvait, dès lors, bénéficier du bénéfice du régime de faveur prévu par l'article 44 quater du code général des impôts, sous l'empire duquel l'intéressée avait entendu se placer ; que cette dernière a ainsi été assujettie à des suppléments d'impôt sur les sociétés au titre de chacun des exercices clos de 1986 à 1988, assortis des pénalités exclusives de bonne foi ; que sa réclamation ayant été rejetée, la SA Bresse auto sport a saisi le tribunal administratif de Lyon d'une demande en décharge de ces impositions ; que, par l'article 3 de son jugement du 30 avril 1997, le tribunal administratif de Lyon, après avoir substitué les intérêts de retard à ces pénalités de mauvaise foi et prononcé, dans cette mesure, la décharge des majorations dont les suppléments d'impôt susmentionnés avaient été assortis, a rejeté le surplus des conclusions de cette demande ; que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 28 mars 2002 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon, faisant droit aux conclusions de l'appel interjeté par la SA Bresse auto sport, a, en premier lieu, annulé l'article 3 dudit jugement, en deuxième lieu, prononcé la décharge de l'ensemble des droits supplémentaires et intérêts de retard restant en litige, en troisième et dernier lieu, assorti des intérêts moratoires prévus à l'article L. 208 du livre des procédures fiscales le remboursement, par l'administration fiscale, des sommes correspondant à ces droits et intérêts ;
Sur les conclusions tendant à la décharge des impositions restant en litige en cause d'appel :
Considérant qu'il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué, que, pour juger irrégulière la procédure d'imposition dont la SA Bresse auto sport avait fait l'objet, la cour administrative d'appel de Lyon a jugé qu'était insuffisamment motivée la réponse donnée le 25 septembre 1989 par l'administration fiscale aux observations formulées le 30 août 1989 par la société contribuable, faute pour le vérificateur d'avoir répondu à la principale de ces observations selon laquelle, à le supposer établi, le transfert de clientèle existant entre cette société et la société Sodimat n'était pas résulté de la commune intention des intéressées de procéder à un tel transfert, qu'aurait seule pu révéler la conclusion entre elles d'un contrat à cette fin, mais du seul fait de la société BMW France, dans la mesure où celle-ci avait mis fin au contrat de concession exclusif qui la liait à son ancien concessionnaire, la société Sodimat, puis conclu ultérieurement un nouveau contrat de concession avec la SA Bresse auto sport ; qu'en statuant ainsi, la cour s'est livrée à une appréciation souveraine des pièces du dossier qui lui était soumis, exempte de dénaturation ; qu'il suit de là que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE n'est pas fondé à demander l'annulation des articles 1er et 2 de l'arrêt attaqué par lesquels la cour a prononcé la décharge des droits supplémentaires d'impôt sur les sociétés et intérêts de retard auxquels la SA Bresse auto sport restait assujettie ;
Sur les conclusions tendant au paiement des intérêts moratoires :
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales : Quand l'Etat est condamné à un dégrèvement d'impôt par un tribunal ou quand un dégrèvement est prononcé par l'administration à la suite d'une réclamation tendant à la réparation d'une erreur commise dans l'assiette ou le calcul des impositions, les sommes déjà perçues sont remboursées au contribuable et donnent lieu au paiement d'intérêts moratoires dont le taux est celui de l'intérêt légal. Les intérêts courent du jour du paiement. Ils ne sont pas capitalisés ; qu'en vertu du troisième alinéa de l'article R. 208-1 du même livre, les intérêts moratoires prévus à l'article L. 208 précité sont payés d'office en même temps que les sommes remboursées par le comptable chargé du recouvrement des impôts ;
Considérant qu'il ne ressort d'aucune des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le comptable chargé du remboursement, à la SA Bresse auto sport, des sommes correspondant à la fraction des majorations d'impôt sur les sociétés initialement mises à la charge de l'intéressée et dont le tribunal administratif de Lyon avait prononcé la décharge, se soit refusé à payer d'office les intérêts moratoires dus sur ces sommes en application des dispositions législatives et réglementaires précitées ni, a fortiori, que la société contribuable ait contesté ce refus devant l'autorité administrative compétente ; qu'il suit de là que, faute qu'aucun litige, né et pendant en cause d'appel, opposât la SA Bresse auto sport au comptable dont s'agit au sujet du paiement des intérêts moratoires visés à l'article L. 208 précité, les conclusions présentées par cette société devant la cour et tendant au paiement de ces intérêts étaient irrecevables ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est seulement fondé à demander l'annulation de l'article 3 de l'arrêt attaqué par lequel la cour a accueilli lesdites conclusions ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu pour le Conseil d'Etat de faire application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative et de régler l'affaire au fond ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, faute de litige né et actuel opposant la SA Bresse auto sport au comptable chargé du recouvrement des impositions dont le juge de première instance a prononcé le dégrèvement, les conclusions présentées par cette société devant la cour administrative d'appel de Lyon et tendant au paiement des intérêts moratoires visés à l'article L. 208 du livre des procédures fiscales sont irrecevables et ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de condamner l'Etat à payer à la SA Bresse auto sport une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par elle devant le Conseil d'Etat et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'article 3 de l'arrêt du 28 mars 2002 de la cour administrative d'appel de Lyon est annulé.
Article 2 : Les conclusions présentées par la SA Bresse auto sport devant la cour administrative d'appel de Lyon et tendant au paiement des intérêts moratoires visés à l'article L. 208 du livre des procédures fiscales sont rejetées.
Article 3 : Le surplus des conclusions du recours est rejeté.
Article 4 : L'Etat paiera à la SA Bresse auto sport une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE et à la SA Bresse auto sport.