Vu la requête, enregistrée le 8 août 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 20 juin 2002 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 26 décembre 2001 décidant la reconduite à la frontière de M. X... en tant que cet arrêté fixe Haïti comme pays à destination duquel M. doit être éloigné ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. devant le président du tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Artaud-Macari, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de M. ,
- les conclusions de Mme Prada Bordenave, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 27 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée relative à l'entrée et au séjour des étrangers en France : Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie et sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ; que, selon l'article 3 de cette convention, nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. , de nationalité haïtienne, qui appartient à un parti d'opposition, a fait l'objet de menaces contre sa personne ; que son père a été assassiné ; que sa mère a été emprisonnée pour complot contre la sûreté de l'Etat ; qu'ainsi, l'intéressé établit qu'il serait exposé à de graves risques en cas de retour en Haïti ; que, dès lors, la décision par laquelle le PREFET DE POLICE a fixé Haïti comme pays à destination duquel M. sera reconduit est intervenue en méconnaissance des dispositions de l'article 27 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE POLICE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 26 décembre 2001 en tant qu'il fixe Haïti comme pays à destination duquel M. sera reconduit à la frontière ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que M. a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Delaporte, Briard, Trichet renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de condamner l'Etat à lui payer la somme de 1 500 euros ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête du PREFET DE POLICE est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera à la SCP Delaporte, Briard, Trichet avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, la somme de 1 500 euros sous réserve que ladite société renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à M. X... et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.