Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 15 février et 21 mai 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE D'ARCACHON, Hôtel de ville, boîte postale 133, à Arcachon (33311) ; la COMMUNE D'ARCACHON demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler un arrêt du 20 décembre 2001 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux, annulant un jugement du 7 avril 1998 du tribunal administratif de Bordeaux, a annulé l'arrêté du 27 juin 1997 du maire d'Arcachon accordant un permis de construire à la société anonyme E.R. Finances pour l'édification d'une station-service sur un terrain sis boulevard du Maréchal-Leclerc ;
2°) de rejeter la requête présentée par la S.A.R.L. S.A.A.G. devant la cour administrative d'appel de Bordeaux ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme von Coester, Auditeur,
- les observations de Me Odent, avocat de la COMMUNE D'ARCACHON,
- les conclusions de Mme de Silva, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que, pour annuler l'arrêté du maire d'Arcachon en date du 27 juin 1997 accordant un permis de construire à la société anonyme E.R. Finances, la cour administrative d'appel de Bordeaux a notamment retenu un moyen invoqué par la S.A.R.L. S.A.A.G. et tiré de ce que cet arrêté avait été pris en méconnaissance des dispositions de l'article R. 421-2 du code de l'urbanisme relatives à la composition du dossier devant être joint à une demande de permis de construire ; qu'il ressort des pièces du dossier soumis à la cour que ce moyen avait été soulevé pour la première fois dans un mémoire produit le 28 octobre 1998 qui n'avait été communiqué ni à la COMMUNE D'ARCACHON, ni à la société anonyme E.R. Finances ; qu'ainsi, l'arrêt attaqué a été rendu en violation du principe du caractère contradictoire de l'instruction ; que, dès lors, la COMMUNE D'ARCACHON est fondée à en demander, pour ce motif, l'annulation ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, lorsqu'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, le Conseil d'Etat peut régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;
Sur la fin de non-recevoir opposée par la COMMUNE D'ARCACHON :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la S.A.R.L. S.A.A.G. est établie sur une parcelle située à proximité immédiate du terrain d'assiette de la construction autorisée par l'arrêté du 27 juin 1997 ; qu'en cette seule qualité, elle justifie d'un intérêt lui donnant qualité pour demander l'annulation dudit arrêté ; que, dès lors, la fin de non-recevoir opposée par la COMMUNE D'ARCACHON doit être écartée ;
Sur la légalité du permis de construire :
Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article R. 421-2 du code de l'urbanisme : Le dossier joint à la demande de permis de construire comporte : ... 5° Deux documents photographiques au moins permettant de situer le terrain respectivement dans le paysage proche et lointain et d'apprécier la place qu'il y occupe. Les points et les angles de prises de vue seront reportés sur le plan de situation et le plan de masse ; 6° Un document graphique au moins permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction dans l'environnement, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et des abords. Lorsque le projet comporte la plantation d'arbres de haute tige, les documents graphiques devront faire apparaître la situation à l'achèvement des travaux et la situation à long terme ; 7° Une notice permettant d'apprécier l'impact visuel du projet. A cet effet, elle décrit le paysage et l'environnement existants et expose et justifie les dispositions prévues pour assurer l'insertion dans ce paysage de la construction, de ses accès et de ses abords ; qu'il ressort des pièces du dossier, et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté, que le dossier joint à la demande de permis de construire, présentée par la société anonyme E.R. Finances, ne comportait ni un plan de situation et un plan de masse faisant ressortir les points et angles de vue des documents photographiques, ni les documents graphiques faisant apparaître la situation à l'achèvement des travaux et à long terme, ni la notice permettant d'apprécier l'impact visuel du projet ; que, par suite, en accordant le permis sollicité, le maire d'Arcachon a méconnu les dispositions de l'article R. 421-2 du code de l'urbanisme ;
Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article UV 13 du règlement du plan d'occupation des sols de la COMMUNE D'ARCACHON : 35 % de la superficie de l'unité foncière doivent être aménagés en espaces verts plantés d'arbres de haute tige. - L'unité foncière doit comporter au moins un arbre de haute tige par 100 m2 de surface non construite ; que la légalité d'un permis de construire est subordonnée au respect de chacune des deux règles édictées par ces dispositions ; qu'il ressort des pièces du dossier que, la superficie du terrain d'assiette de la construction autorisée s'élevant à 1 474 m2 et la surface hors oeuvre brute de cette construction à 98 m2, la surface non construite de l'unité foncière doit être de 1 376 m2 ; qu'en application des dispositions précitées, cette unité foncière devrait ainsi comporter, pour la réalisation du projet envisagé, au moins treize arbres de haute tige ; qu'alors qu'elle est dépourvue de tout arbre de haute tige, l'arrêté attaqué se borne à prévoir que quatre arbres devront être plantés en remplacement de quatre arbres à abattre sur le domaine public en bordure dudit terrain ; qu'ainsi, il a été pris en méconnaissance des dispositions de l'article UV 13 du règlement du plan d'occupation des sols ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la S.A.R.L. S.A.A.G. est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 juin 1997 ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la COMMUNE D'ARCACHON à payer la somme de 1 500 euros à la S.A.R.L. S.A.A.G. pour les frais exposés par celle-ci et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la S.A.R.L. S.A.A.G., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à payer les sommes demandées par la COMMUNE D'ARCACHON et la société anonyme E.R. Finances ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux en date du 20 décembre 2001 et le jugement du tribunal administratif de Bordeaux en date du 7 avril 1998 sont annulés.
Article 2 : L'arrêté du maire d'Arcachon en date du 27 juin 1997 accordant un permis de construire à la société anonyme E.R. Finances est annulé.
Article 3 : La COMMUNE D'ARCACHON paiera à la S.A.R.L. S.A.A.G. la somme de 1 500 euros.
Article 4 : Les conclusions de la COMMUNE D'ARCACHON et de la société anonyme E.R. Finances tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE D'ARCACHON, à la S.A.R.L. S.A.A.G., à la société anonyme E.R. Finances et au ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.