Vu la requête, enregistrée le 17 mai 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DES ALPES-MARITIMES ; le PREFET DES ALPES-MARITIMES demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 13 avril 2002 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Nice a annulé son arrêté du 10 avril 2002 décidant la reconduite à la frontière de M. Lyes X... et lui a prescrit de réexaminer la situation de l'intéressé dans les deux mois suivant la notification de ce jugement pendant lesquels ce dernier devait être mis en possession d'une autorisation provisoire de séjour et de travail ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le président du tribunal administratif ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;
Vu l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République algérienne du 27 décembre 1968 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Devys, Maître des Requêtes,
- les conclusions de Mme de Silva, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale ... 2. Il ne peut y avoir ingérence d'un autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les parents de M. X... ont vécu en France de 1956 à 1976, année au cours de laquelle ils sont retournés en Algérie ; que son père est revenu en 1983 en France, où il est décédé en 1989 ; que M. X..., né en Algérie en 1978, est entré en France en 2000 pour rejoindre sa mère, qui y vivait depuis 1990 dans des conditions régulières, ainsi que ses huit frères et s.urs, dont sept étaient de nationalité française ; que, dans les circonstances particulières de l'espèce, en refusant à M. X..., par un arrêté du 19 décembre 2000, la délivrance d'un titre de séjour, le PREFET DES ALPES-MARITIMES a porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette mesure a été prise et a ainsi méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par suite, l'arrêté préfectoral du 10 avril 2002 décidant la reconduite à la frontière de M. X... est dépourvu de base légale ; que, dès lors, le PREFET DES ALPES-MARITIMES n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Nice en a prononcé l'annulation ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner l'Etat à payer à M. X... la somme de 900 euros pour les frais exposés par celui-ci et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête du PREFET DES ALPES-MARITIMES est rejetée.
Article 2 : L'Etat est condamné à payer à M. X... la somme de 900 euros.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DES ALPES-MARITIMES, à M. Lyes X... et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.