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26/02/2003 | FRANCE | N°238599

France | France, Conseil d'État, 1ere et 2eme sous-sections reunies, 26 février 2003, 238599


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 1er octobre 2001 et 1er février 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la FEDERATION NATIONALE DES TRANSPORTS FORCE OUVRIERE, dont le siège est ..., représentée par ses représentants légaux en exercice ; la FEDERATION NATIONALE DES TRANSPORTS FORCE OUVRIERE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2001-679 du 30 juillet 2001 relatif à la durée du travail dans les entreprises de transport sanitaire ;

2°) de condamner l'Etat à l

ui verser la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code d...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 1er octobre 2001 et 1er février 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la FEDERATION NATIONALE DES TRANSPORTS FORCE OUVRIERE, dont le siège est ..., représentée par ses représentants légaux en exercice ; la FEDERATION NATIONALE DES TRANSPORTS FORCE OUVRIERE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2001-679 du 30 juillet 2001 relatif à la durée du travail dans les entreprises de transport sanitaire ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mlle Landais, Auditeur,

- les observations de la SCP Bouzidi, avocat de la FEDERATION NATIONALE DES TRANSPORTS FORCE OUVRIERE,

- les conclusions de Mlle Fombeur, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 212-1 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail : Dans les établissements ou professions mentionnées à l'article L. 200-1 (...), la durée légale du travail effectif est fixée à trente-cinq heures par semaine ; qu'aux termes de l'article L. 212-2 du même code : Des décrets en conseil des ministres déterminent les modalités d'application de l'article L. 212-1 pour l'ensemble des branches d'activité ou des professions ou pour une branche ou une profession particulière. (...)/ Il peut être dérogé par convention ou accord collectif ou par convention ou accord d'entreprise ou d'établissement à celles des dispositions de ces décrets qui sont relatives à l'aménagement et à la répartition des horaires de travail à l'intérieur de la semaine, aux périodes de repos, aux conditions de recours aux astreintes, ainsi qu'aux modalités de récupération des heures de travail perdues lorsque la loi permet cette récupération ; qu'aux termes de l'article L. 212-4 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi précitée du 19 janvier 2000 : La durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et doit se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles. Le temps nécessaire à la restauration ainsi que les temps consacrés aux pauses sont considérés comme du temps de travail effectif lorsque les critères définis au premier alinéa sont réunis. (...)/ Une durée équivalente à la durée légale peut être instituée dans les professions et pour des emplois déterminés comportant des périodes d'inaction soit par décret pris après conclusion d'une convention ou d'un accord de branche, soit par décret en Conseil d'Etat. Ces périodes sont rémunérées conformément aux usages ou aux conventions ou accords collectifs ;

Considérant qu'il résulte des dispositions précitées que les modalités d'application de l'article L. 212-1 du code du travail doivent faire l'objet de décrets en conseil des ministres ; que, toutefois, par les dispositions de l'article L. 212-4 du même code, le législateur a entendu fixer des règles de compétence et de procédure particulières pour la création des régimes d'équivalence et écarter ainsi les règles générales prévues par l'article L. 212-2 précité ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que le décret du 30 juillet 2001, relatif à la durée du travail dans les entreprises de transport sanitaire et qui institue un régime d'équivalence dans cette profession, serait entaché d'incompétence faute d'avoir été pris en conseil des ministres doit être écarté ;

Considérant que le décret attaqué a été pris, en application des dispositions précitées de l'article L. 212-4 du code du travail, après conclusion d'une convention ou d'un accord de branche ; que, dès lors, il appartient au juge administratif, lorsqu'un moyen en ce sens est présenté à l'appui de conclusions tendant à l'annulation d'un tel décret, de vérifier que la conclusion de l'accord au vu duquel le décret a été pris n'est pas entachée d'une irrégularité telle qu'elle mettrait en cause l'existence même de l'acte conventionnel ; qu'en revanche, la requérante ne peut utilement invoquer, à l'appui de sa demande d'annulation du décret, l'illégalité de celles des stipulations de l'accord qui n'ont pas été reprises par le décret, faute d'avoir pour objet l'institution d'un régime d'équivalence ; que la légalité du décret n'est pas plus subordonnée à celle de l'arrêté du 30 juillet 2001 portant extension de cet accord-cadre, dès lors, en tout état de cause, que l'article L. 212-4 n'impose pas que le décret créant un régime d'équivalence soit pris au vu d'une convention ou d'un accord de branche étendu ; que, par suite, le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité de l'accord-cadre et de l'arrêté procédant à son extension doit être écarté en ses deux branches ;

Considérant, enfin, que le régime d'équivalence prévu à l'article L. 212-4 du code du travail constitue un mode particulier de comptabilisation du travail effectif, qui tient compte des temps d'inaction propres à certaines professions et à certains emplois ; qu'ainsi, la circonstance que les permanences effectuées par les personnels ambulanciers, de même que leur temps de repas et de pause, correspondent à du travail effectif dans la mesure où les personnels restent, au cours de ces périodes, à la disposition de leur employeur sans possibilité de vaquer à des occupations personnelles, n'interdit pas que ces périodes fassent l'objet d'une comptabilisation dans le cadre d'un régime d'équivalence ; que, par suite, doit être écarté le moyen tiré de ce que le décret attaqué serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation et de violation de l'article L. 212-4 précité du code du travail en ce qu'il appliquerait un régime d'équivalence à du temps de travail effectif ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la FEDERATION NATIONALE DES TRANSPORTS FORCE OUVRIERE n'est pas fondée à demander l'annulation du décret du 30 juillet 2001 relatif à la durée du travail dans les entreprises de transport sanitaire ;

Sur les conclusions aux fins d'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à verser à la fédération requérante la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de la FEDERATION NATIONALE DES TRANSPORTS FORCE OUVRIERE est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la FEDERATION NATIONALE DES TRANSPORTS FORCE OUVRIERE, au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité et au ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.


Synthèse
Formation : 1ere et 2eme sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 238599
Date de la décision : 26/02/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

ACTES LÉGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITÉ DES ACTES ADMINISTRATIFS - COMPÉTENCE - RÉPARTITION DES COMPÉTENCES ENTRE AUTORITÉS DISPOSANT DU POUVOIR RÉGLEMENTAIRE - AUTORITÉS DISPOSANT DU POUVOIR RÉGLEMENTAIRE - PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE - OBLIGATION DE FIXER PAR DÉCRETS EN CONSEIL DES MINISTRES LES MODALITÉS D'APPLICATION DE L'ARTICLE L - 212-1 DU CODE DU TRAVAIL RELATIF À LA DURÉE LÉGALE DU TRAVAIL - ABSENCE - CRÉATION DES RÉGIMES D'ÉQUIVALENCE [RJ1].

01-02-02-01-01 En prévoyant, à l'article L. 212-4 du code du travail, des règles de compétence et de procédure particulières pour la création des régimes d'équivalence de temps de travail, le législateur a entendu faire exception à la règle posée à l'article L. 212-2 du même code selon laquelle les modalités d'application de l'article L. 212-1 doivent faire l'objet de décrets en conseil des ministres.

ACTES LÉGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITÉ DES ACTES ADMINISTRATIFS - COMPÉTENCE - RÉPARTITION DES COMPÉTENCES ENTRE AUTORITÉS DISPOSANT DU POUVOIR RÉGLEMENTAIRE - MESURES À PRENDRE PAR DÉCRET - DÉCRET EN CONSEIL DES MINISTRES - ABSENCE - CRÉATION D'UN RÉGIME D'ÉQUIVALENCE DU TEMPS DE TRAVAIL [RJ1].

01-02-02-02-005 En prévoyant, à l'article L. 212-4 du code du travail, des règles de compétence et de procédure particulières pour la création des régimes d'équivalence de temps de travail, le législateur a entendu faire exception à la règle posée à l'article L. 212-2 du même code selon laquelle les modalités d'application de l'article L. 212-1 doivent faire l'objet de décrets en conseil des ministres.

TRAVAIL ET EMPLOI - CONDITIONS DE TRAVAIL - DURÉE LÉGALE DU TRAVAIL - MODALITÉS D'APPLICATION DE L'ARTICLE L - 212-1 DU CODE DU TRAVAIL DEVANT FAIRE L'OBJET DE DÉCRETS EN CONSEIL DES MINISTRES - ABSENCE - CRÉATION DES RÉGIMES D'ÉQUIVALENCE [RJ1].

66-03 Il résulte des dispositions de l'article L. 212-2 du code du travail que les modalités d'application de l'article L. 212-1 du code du travail doivent faire l'objet de décrets en conseil des ministres. Toutefois, par les dispositions de l'article L. 212-4 du même code, le législateur a entendu, en renvoyant soit à un décret pris après conclusion d'une convention ou d'un accord de branche soit à un décret en Conseil d'Etat, fixer des règles de compétence et de procédure particulières pour la création des régimes d'équivalence et écarter ainsi les règles générales prévues par l'article L. 212-2 précité. Ainsi, le décret du 30 juillet 2001 relatif à la durée du travail dans les entreprises de transport sanitaire, qui institue un régime d'équivalence dans cette profession, n'est pas entaché d'incompétence faute d'avoir été pris en conseil des ministres.


Références :

[RJ1]

Rappr. 22 février 1995, Syndicat national des lycées et collèges, T. p. 621.


Publications
Proposition de citation : CE, 26 fév. 2003, n° 238599
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Lasserre
Rapporteur ?: Mme Claire Landais
Rapporteur public ?: Mlle Fombeur
Avocat(s) : SCP BOUZIDI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2003:238599.20030226
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