Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 5 juin et 6 octobre 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Mahi Kader X..., ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler un décret du 22 novembre 1982 en tant qu'il le libère de son allégeance envers la France ;
2°) d'annuler la décision du 4 juin 1999 par laquelle le ministre de l'emploi et de la solidarité a refusé de rapporter ce décret ;
3°) de condamner l'Etat à payer à la SCP Bachellier, Potier de La Varde, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, la somme de 8 000 F (1 219,59 euros) en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mlle Bourgeois, Auditeur,
- les observations de la SCP Bachellier, Potier de La Varde, avocat de M. X...,
- les conclusions de Mme de Silva, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que, si le décret du 22 novembre 1982 libérant M. X... de son allégeance envers la France a été publié au "Journal officiel" de la République française le 7 décembre 1982, il ressort des pièces du dossier que le requérant n'en a jamais reçu la notification ; que, le délai du recours contentieux n'ayant pas couru à l'encontre de l'intéressé, celui-ci est recevable à demander l'annulation dudit décret sur ce point ;
Considérant qu'aux termes de l'article 91 du code de la nationalité française, en vigueur à la date du décret attaqué : "Perd la nationalité française, le Français même mineur, qui, ayant une nationalité étrangère, est autorisé sur sa demande, par le Gouvernement français, à perdre la qualité de Français. Cette autorisation est accordée par décret" ; qu'il ressort des pièces du dossier, et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté, que le décret attaqué a été pris au vu d'une demande présentée non par M. Mahi X..., mais par son père, agissant à l'insu de son fils majeur, à l'aide d'un faux document ; que, dès lors, M. X... est fondé à demander l'annulation du décret du 22 novembre 1982 en tant qu'il le libère de son allégeance à l'égard de la France, ainsi que de la décision du 4 juin 1999 par laquelle le ministre de l'emploi et de la solidarité a refusé de rapporter ce décret ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que M. X... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir de ces dispositions ; que, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Bachellier, Potier de La Varde, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, il y a lieu de condamner celui-ci à lui payer la somme de 1 200 euros pour les frais que M. X... aurait exposés s'il n'avait pas bénéficié de l'aide juridictionnelle ;
Article 1er : Le décret du 22 novembre 1982 en tant qu'il libère M. X... de son allégeance à l'égard de la France et la décision du 4 juin 1999 du ministre de l'emploi et de la solidarité sont annulés.
Article 2 : L'Etat est condamné à verser à la SCP Bachellier, Potier de La Varde, avocat de M. X..., la somme de 1 200 euros, sous réserve qu'elle renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Mahi Kader X... et au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.