Vu la requête, enregistrée le 10 mai 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE L'ESSONNE ; le PREFET DE L'ESSONNE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 12 avril 2001 par lequel par le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté du 2 avril 2001 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Mohamed X... et fixant le pays à destination duquel il doit être reconduit ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Versailles ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Dumortier, Auditeur ;
- les conclusions de Mme Roul, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (.) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire français au-delà du délai d'un mois à compter de la notification ou du retrait ( ...) ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X..., de nationalité algérienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 6 décembre 2000, de la décision du 4 décembre 2000 du PREFET DE L'ESSONNE, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il était ainsi dans le cas prévu par le 3° de l'article 22-I de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X... qui était resté en Algérie auprès d'une grand-mère jusqu'au décès de cette dernière, d'une part, apporte la preuve du décès de ses oncles ainsi que de son père , qui a été officiellement reconnu victime du terrorisme, d'autre part, établit la présence en France de sa mère, de nationalité française, de ses trois demi-frères et soeurs et de sa soeur Nadia ainsi que des enfants français de celle-ci ; que, dans ce conditions, compte tenu des circonstances de l'espèce, et alors qu'il ne ressort pas du dossier que l'intéressé aurait conservé en Algérie des attaches familiales, l'arrêté du 2 avril 2001 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... a porté, ainsi que l'a déclaré le premier juge, au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette mesure a été prise et a méconnu, par suite, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE L'ESSONNE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté du 2 avril 2001 ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de condamner l'Etat à verser à M. X... une somme de 760 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête du PREFET DE L'ESSONNE est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera à M. X... une somme de 760 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE L'ESSONNE, à M. Mohamed X... et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.