Vu la requête, enregistrée le 30 mars 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DU VAL-D'OISE ; le PREFET DU VAL-D'OISE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 2 mars 2000 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté du 28 janvier 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Erilus X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Versailles ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu la loi n° 98-349 du 11 mai 1998 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Aubert, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mme Bergeal, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Erilus X..., de nationalité haïtienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois à compter de la notification, le 2 janvier 1998, de l'arrêté du 22 décembre 1997 par lequel le PREFET DU VAL-D'OISE lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ; qu'il se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant que, si M. X... fait valoir, qu'entré en France en 1989, il s'est marié en 1998 avec une ressortissante haïtienne résidant régulièrement sur le territoire français dont il avait eu un enfant et qu'il vit avec son épouse et cet enfant ainsi qu'avec les trois enfants de son épouse issus d'un premier mariage, il ne ressort pas des pièces du dossier que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions de séjour en France de M. X..., qui n'apporte aucun élément de nature à prouver la perte d'attaches affectives dans son pays d'origine, ainsi que de la possibilité ouverte à son épouse de solliciter le bénéfice du regroupement familial, l'arrêté attaqué ait porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que c'est, dès lors, à tort que, pour annuler l'arrêté attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles s'est fondé sur ce qu'il méconnaissait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat saisi par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentées par M. X... devant le tribunal administratif de Versailles ;
Considérant qu'il ne ressort d'aucune pièce du dossier que le PREFET DU VAL-D'OISE ait commis une erreur manifeste dans son appréciation des conséquences de son arrêté du 28 janvier 2000 sur la situation personnelle de M. X... ; que celui-ci ne peut utilement se prévaloir des dispositions de la circulaire prise pour l'application de la loi du 11 mai 1998, dépourvue de valeur réglementaire ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DU VAL-D'OISE est fondé à demander l'annulation du jugement du 2 mars 2000 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté du 28 janvier 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : "Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie le cas échéant, d'un délai d'exécution" ;
Considérant que la présente décision, qui rejette la demande d'annulation de M. X..., n'appelle aucune mesure d'exécution ; que les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de délivrer à l'intéressé un titre de séjour ne peuvent, dès lors, qu'être écartées ;
Article 1er : Le jugement du 2 mars 2000 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles est annulé.
Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif de Versailles par M. X... et les conclusions tendant à ce qu'une injonction soit adressée au PREFET DU VAL-D'OISE sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DU VAL-D'OISE, à M. Erilus X... et au ministre de l'intérieur.