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23/11/2001 | FRANCE | N°217165

France | France, Conseil d'État, 7 ss, 23 novembre 2001, 217165


Vu la requête, enregistrée le 7 février 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE L'AIN ; le PREFET DE L'AIN demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 20 janvier 2000 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 16 décembre 1999 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Ramadan X... et la décision du même jour fixant le pays à destination duquel il doit être reconduit ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal adminis

tratif de Lyon ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention euro...

Vu la requête, enregistrée le 7 février 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE L'AIN ; le PREFET DE L'AIN demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 20 janvier 2000 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 16 décembre 1999 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Ramadan X... et la décision du même jour fixant le pays à destination duquel il doit être reconduit ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Lyon ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Aubert, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP de Chaisemartin, Courjon, avocat de M. X...,
- les conclusions de Mme Bergeal, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X..., de nationalité Yougoslave, s'est d'abord vu refuser la qualité de réfugié par une décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides en date du 3 février 1997, confirmée le 10 février 1998 par la commission des recours des réfugiés et ensuite l'asile territorial par une décision du ministre de l'intérieur du 1er septembre 1999 que le PREFET DE L'AIN lui a notifiée le 18 septembre 1999 en même temps que sa décision du 17 septembre lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire dans le délai d'un mois ; que l'intéressé s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après ladite notification et se trouvait ainsi dans le cas prévu par le 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière ;
Considérant que, d'une part, si M. X... a fait valoir que sa soeur est venue le rejoindre en France où elle a obtenu le statut de réfugié, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'arrêté attaqué porte à la vie familiale de M. X... qui, âgé de 25 ans, est célibataire sans enfant, et qui n'établit pas être dépourvu d'attaches dans son pays d'origine, une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et a donc méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par suite, le PREFET DE L'AIN est fondé à soutenir que c'est à tort que le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Lyon s'est fondé sur une méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour annuler son arrêté du 16 décembre 1999 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... et, par voie de conséquence, la décision fixant le pays à destination duquel il sera reconduit ;
Considérant toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X... devant le tribunal administratif de Lyon et devant le Conseil d'Etat ;
Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus l'arrêté attaqué n'a pas porté aux droits de M. X... à une vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et n'a pas, dès lors, méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant, en revanche, qu'il ressort des pièces du dossier et notamment des documents produits devant le Conseil d'Etat que M. X..., dont la soeur vient d'ailleurs d'obtenir le statut de réfugié, serait personnellement exposé à de graves risques en cas de retour dans son pays d'origine ; que ce pays ne peut donc être légalement retenu comme pays de destination ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE L'AIN est fondé à soutenir que, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 16 décembre 1999 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... ; qu'en revanche, le préfet n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le même jugement, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Lyon a annulé sa décision du 16 décembre fixant la Yougoslavie (Kosovo) comme pays de destination ;
Sur les conclusions tendant à la condamnation de l'Etat au versement des frais exposés par M. X... et non compris dans les dépens :
Considérant qu'il n'y pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner l'Etat à verser à M. X... la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du 20 janvier 2000 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Lyon est annulé en tant qu'il a annulé l'arrêté du PREFET DE L'AIN en date du 16 décembre 1999 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X....
Article 2 : Les conclusions de M. X... devant le tribunal administratif de Lyon tendant à l'annulation de l'arrêté du PREFET DE L'AIN en date du 16 décembre 1999 ordonnant sa reconduite à la frontière sont rejetées.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête du PREFET DE L'AIN est rejeté.
Article 4 : Les conclusions de M. X... tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE L'AIN, à M. Ramadan X... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 7 ss
Numéro d'arrêt : 217165
Date de la décision : 23/11/2001
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 16 décembre 1999
Code de justice administrative L761-1
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 8
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22


Publications
Proposition de citation : CE, 23 nov. 2001, n° 217165
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Aubert
Rapporteur public ?: Mme Bergeal

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2001:217165.20011123
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