Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 7 et 21 mars 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE DE TRANSPORTS "LA MOUETTE", dont le siège est ..., représentée par son président en exercice ; la SOCIETE DE TRANSPORTS "LA MOUETTE" demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'ordonnance du 21 février 2001 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la suspension de l'exécution de l'arrêté du 10 novembre 2000 par lequel le préfet du Pas-de-Calais a déclaré d'utilité publique et urgents les travaux relatifs à l'aménagement des routes nationales n°s 1 et 142 (liaison A 16 - port de Boulogne-sur-Mer) ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 10 000 F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;
Vu le code de l'environnement ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de la voirie routière ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Olléon, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Nicolay, de Lanouvelle, avocat de la SOCIETE DE TRANSPORTS "LA MOUETTE",
- les conclusions de M. Bachelier, Commissaire du gouvernement ;
Sur la recevabilité de la requête :
Considérant que la SOCIETE DE TRANSPORTS "LA MOUETTE", qui avait demandé au juge des référés du tribunal administratif de Lille la suspension de l'exécution de l'arrêté du 10 novembre 2000 par lequel le préfet du Pas-de-Calais a déclaré d'utilité publique et urgents les travaux relatifs à l'aménagement des routes nationales n°s 1 et 142 (liaison A 16 - port de Boulogne-sur-Mer), avait la qualité de partie dans cette instance et présente, par suite, un intérêt lui donnant qualité pour se pourvoir en cassation contre l'ordonnance du 21 février 2001 par laquelle ledit juge des référés a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'ordonnance attaquée :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : "Quand une décision administrative, même d e rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ces effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision" ; qu'aux termes de l'article R. 742-2 du même code : "Les ordonnances mentionnent le nom des parties, l'analyse des conclusions ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elles font application" ;
Considérant qu'il appartient au juge des référés qui rejette une demande tendant à la suspension de l'exécution d'une décision administrative au motif qu'il n'est pas fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de cette décision, d'analyser soit dans les visas de son ordonnance, soit dans les motifs de celle-ci, les moyens développés au soutien de la demande de suspension, afin, notamment, de mettre le juge de cassation en mesure d'exercer son contrôle ;
Considérant que, dans l'analyse de l'argumentation présentée par la SOCIETE DE TRANSPORTS "LA MOUETTE" au soutien de ses conclusions tendant à ce que soit suspendue l'exécution de l'arrêté du 10 novembre 2000 susmentionné, l'ordonnance attaquée s'est bornée à indiquer, dans ses visas, sans autre précision, que la société faisait état de moyens propres, selon elle, à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de l'arrêté déclaratif d'utilité publique ; qu'elle n'a pas davantage précisé quels étaient ces moyens en énonçant dans ses motifs qu'aucun d'entre eux ne paraissait de nature, en l'état de l'instruction, à créer un doute sérieux quant à la légalité de l'arrêté dont la suspension était demandée ; que, dès lors, la SOCIETE DE TRANSPORTS "LA MOUETTE" est fondée à soutenir que l'ordonnance attaquée, qui est entachée d'un défaut de motivation, doit être annulée ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, le Conseil d'Etat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut "régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie" ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée ;
Considérant que, pour demander la suspension de l'exécution de l'arrêté préfectoral déclaratif d'utilité publique du 10 novembre 2000, la SOCIETE DE TRANSPORTS "LA MOUETTE" soutient qu'il a été pris en méconnaissance des dispositions de l'article L. 123-3 du code de la voirie routière, que les nuisances sonores causées aux bâtiments d'habitation riverains par le projet de liaison autoroutière présentent un caractère excessif, que l'étude d'impact est insuffisante s'agissant de l'analyse des coûts collectifs des pollutions et nuisances et des avantages induits pour la collectivité, enfin que l'arrêté litigieux a omis de mettre le schéma directeur applicable en compatibilité avec le projet ; qu'aucun de ces moyens ne paraît de nature à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de l'arrêté du 10 novembre 2000 susmentionné ; qu'il y a lieu, par suite, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par le ministre de l'équipement, des transports et du logement, de rejeter la demande de la SOCIETE DE TRANSPORTS "LA MOUETTE" tendant à la suspension de l'exécution de cet arrêté ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de cet article font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à verser à la SOCIETE DE TRANSPORTS "LA MOUETTE" la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L'ordonnance du 21 février 2001 du juge des référés du tribunal administratif de Lille est annulée.
Article 2 : La demande présentée par la SOCIETE DE TRANSPORTS "LA MOUETTE" devant le juge des référés du tribunal administratif de Lille est rejetée.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la SOCIETE DE TRANSPORTS "LA MOUETTE" est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE DE TRANSPORTS "LA MOUETTE" et au ministre de l'équipement, des transports et du logement.