Vu la requête, enregistrée le 28 septembre 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour le LABORATOIRE L. LAFON, société anonyme dont le siège est ... (94701), représenté par son président en exercice ; le LABORATOIRE L. LAFON demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 1er août 2000 du ministre de l'emploi et de la solidarité en tant qu'il modifie le taux de remboursement de la spécialité "Fonzylane" qu'il commercialise et d'en prononcer le sursis à exécution ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 20 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Boulouis, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Delaporte, Briard, avocat du LABORATOIRE L. LAFON,
- les conclusions de Mlle Fombeur, Commissaire du gouvernement ;
Sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'emploi et de la solidarité :
Considérant que l'arrêté attaqué du 1er août 2000 fait passer de 35 à 65 % la participation des assurés sociaux à la prise en charge de la spécialité "Fonzylane", fabriquée par le laboratoire requérant ; que celui-ci justifie d'un intérêt lui donnant qualité pour agir contre cet arrêté ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 163-13 du code de la sécurité sociale : "Le ministre chargé de la sécurité sociale et le ministre chargé de la santé informent l'entreprise qui exploite le médicament de leur intention soit de modifier le classement d'un médicament inscrit sur la liste prévue à l'article L. 162-17 au regard de la participation des assurés aux frais d'acquisition des médicaments, soit de radier un médicament des listes prévues aux articles L. 162-17 du présent code et L. 618 du code de la santé publique./ L'entreprise qui exploite le médicament peut présenter des observations écrites ou demander à être entendue par la commission prévue à l'article R. 163-15, dans le mois suivant réception de cette information" et qu'aux termes de l'article R. 163-16, lorsque l'avis de la commission "porte sur l'inscription, la modification des conditions d'inscription ou le renouvellement de l'inscription d'un médicament sur la liste prévue à l'article L. 162-17 ( ...), cet avis est immédiatement communiqué à l'entreprise qui exploite le médicament./ L'entreprise peut, dans les huit jours suivant la réception de cet avis, demander à être entendue par la commission ou présenter ses observations écrites. La commission peut modifier son avis compte tenu des observations présentées" ;
Considérant que si, en application des dispositions de l'article R. 163-16 du code de la sécurité sociale, le LABORATOIRE L. LAFON a été avisé, par la commission de la transparence, de l'avis provisoire rendu par celle-ci le 17 novembre 1999 et a pu présenter des observations avant que la commission ne rende son avis définitif estimant insuffisant le service médical rendu par le "Fonzylane", il est constant que l'arrêté attaqué du 1er août 2000 qui a augmenté la participation des assurés sociaux à la prise en charge de la spécialité pharmaceutique "Fonzylane", n'a pas été précédé de l'information, prévue par les dispositions de l'article R. 163-13 du même code, du LABORATOIRE L. LAFON, entreprise exploitant cette spécialité, par les ministres chargés de la sécurité sociale et de la santé, qui n'étaient pas tenus de suivre l'avis de la commission, de leur intention de procéder à cette modification ; que, par suite, le LABORATOIRE L. LAFON est fondé à soutenir que l'arrêté du 1er août 2000, en tant qu'il concerne la spécialité "Fonzylane", a été pris selon une procédure irrégulière et doit être annulé ;
Sur les conclusions du LABORATOIRE L. LAFON tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner l'Etat à payer au LABORATOIRE L. LAFON la somme de 20 000 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Les dispositions de l'arrêté du 1er août 2000 modifiant la liste des spécialités pharmaceutiques remboursables aux assurés sociaux relatives au "Fonzylane" sont annulées.
Article 2 : L'Etat est condamné à verser la somme de 20 000 F au LABORATOIRE L. LAFON autitre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au LABORATOIRE L. LAFON, au ministre de l'emploi et de la solidarité et au secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.