Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 24 avril et 20 août 1998 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'ASSOCIATION CHAMBRE DEPARTEMENTALE DE LA PROPRIETE IMMOBILIERE DU JURA, dont le siège social est ..., représentée par ses dirigeants en exercice ; l'ASSOCIATION CHAMBRE DEPARTEMENTALE DE LA PROPRIETE IMMOBILIERE DU JURA demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 19 février 1998 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 6 octobre 1994 du tribunal administratif de Besançon rejetant sa demande en décharge de l'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre des années 1985 et 1988 et des pénalités y afférentes, et de condamner l'Etat à lui verser une somme de 12 000 F au titre de l'article 75-I de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Bonnot, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Guiguet, Bachelier, Potier de la Varde, avocat de l'ASSOCIATION CHAMBRE DEPARTEMENTALE DE LA PROPRIETE IMMOBILIERE DU JURA,
- les conclusions de M. Courtial, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 206-1 du code général des impôts : " ... sont passibles de l'impôt sur les sociétés, quel que soit leur objet, les sociétés anonymes ... et toutes autres personnes morales se livrant à une exploitation ou à des opérations de caractère lucratif" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la SARL Sogreprim dont le capital était initialement détenu par l'ASSOCIATION CHAMBRE DEPARTEMENTALE DE LA PROPRIETE IMMOBILIERE DU JURA à 99,5 % et pour le solde par cinq membres de cette association, a procédé en 1985, puis en 1988 après sa transformation en société anonyme, à deux augmentations de capital au pair sans prime d'émission, qui ont porté son capital social de 100 000 F à 300 000 F puis à 1 200 000 F ; que l'association, renonçant à son droit préférentiel de souscription, s'est abstenue de souscrire à ces augmentations de capital, sa participation au capital de la société Sogeprim passant de la sorte de 99,5 % à 33,16 % puis à 8,29 %, les titres émis ayant été souscrits en totalité par les autres associés membres de l'association pour leur valeur nominale de 100 F par titre ; qu'après avoir évalué la valeur réelle, supérieure à la valeur nominale, des parts ou actions de la société Sogeprim avant et après chaque augmentation de capital et déterminé ainsi l'avantage auquel l'association avait renoncé au profit des autres associés membres de l'association qui avaient souscrit à l'augmentation de capital pour la valeur nominale des titres, l'administration a assujetti l'association à l'impôt sur les sociétés sur le montant correspondant à l'avantage ainsi consenti au titre des années 1985 et 1988 ;
Considérant qu'en laissant ainsi les autres associés de la société Sogeprim qui étaient membres de l'association, souscrire au pair la totalité des parts ou actions nouvelles alors que la valeur réelle de ces parts ou actions était nettement supérieure à leur valeur nominale, l'association a consenti à ces derniers un avantage dont l'octroi n'était pas compatible avec une gestion désintéressée ; qu'elle entrait, par suite, comme l'a jugé la Cour, sans commettre d'erreur de droit, dans le champ de l'impôt sur les sociétés ;
Considérant que l'avantage ainsi consenti par l'association à certains de ses membres ne comportait aucune contrepartie pour elle ; que, par suite, la Cour n'a pas inexactement qualifié les faits en regardant l'abstention délibérée de l'association de souscrire aux augmentations de capital de la société Sogeprim comme un acte anormal de gestion ; que, dès lors, la requête par laquelle l'ASSOCIATION CHAMBRE DEPARTEMENTALE DE LA PROPRIETE IMMOBILIERE DU JURA conteste l'arrêt de la Cour jugeant fondée la réintégration dans ses bases imposables à l'impôt sur les sociétés de l'avantage qu'elle avait consenti sans contrepartie à ses membres, ne peut qu'être rejetée ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à l'ASSOCIATION CHAMBRE DEPARTEMENTALE DE LA PROPRIETE IMMOBILIERE DU JURA la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de l'ASSOCIATION CHAMBRE DEPARTEMENTALE DE LA PROPRIETE IMMOBILIERE DU JURA est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'ASSOCIATION CHAMBRE DEPARTEMENTALE DE LA PROPRIETE IMMOBILIERE DU JURA et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.