Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 4 septembre 1998 et 4 janvier 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la CLINIQUE CHIRURGICALE DU COUDON, dont le siège est ... à La Valette (83160) ; la CLINIQUE CHIRURGICALE DU COUDON demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 18 juin 1998 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté sa requête dirigée contre le jugement du 19 février 1996 du tribunal administratif de Marseille rejetant sa demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du 10 juillet 1993 du préfet de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur refusant de reconnaître au sein de l'établissement la pratique d'une activité d'anesthésie ou de chirurgie ambulatoire ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 15 000 F au titre de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu la loi n° 91-748 du 31 juillet 1991 ;
Vu la loi n° 91-1406 du 31 décembre 1991 ;
Vu le décret n° 92-1101 du 2 octobre 1992 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Eoche-Duval, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Nicolay, de Lanouvelle, avocat de la CLINIQUE CHIRURGICALE DU COUDON,
- les conclusions de Mme Boissard, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'en vertu des dispositions combinées du a) du 2° de l'article L. 712-2, du 2° de l'article L.712-8, et des articles L. 712-14 et L. 712-16, insérés dans le code de la santé publique par l'article 4 de la loi n° 91-748 du 31 juillet 1991 portant réforme hospitalière, la réalisation des projets relatifs à la création, à l'extension et à la transformation des installations nécessaires aux besoins de la population que sont "les structures de soins alternatives à l'hospitalisation" est subordonnée à la délivrance d'une autorisation accordée pour une durée déterminée de cinq ans au moins par le représentant de l'Etat lorsque le projet satisfait notamment, ainsi que l'exige le 3° de l'article L. 712-9 du code précité, "à des conditions techniques de fonctionnement fixées par décret" ; que les articles R. 712-2-1 et R. 712-2-3 du même code, dans leur rédaction issue de l'article 1er du décret n° 92-1101 du 2 octobre 1992 précisent, le premier, que les structures de soins alternatives à l'hospitalisation "ont pour objet d'éviter une hospitalisation à temps complet ou d'en diminuer la durée" et comprennent notamment "les structures pratiquant l'anesthésie ou la chirurgie ambulatoire", et le second, que la capacité de ces structures est exprimée en places dont le nombre "est obtenu en divisant par 365 le nombre annuel de patients pouvant être accueillis pour une durée inférieure à un jour" ;
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 24 du 31 juillet 1991 susmentionné : "Les établissements publics de santé qui, antérieurement à la date de promulgation de la présente loi, comportaient des structures de soins alternatives à l'hospitalisation mentionnées à l'article L. 712-2 du code de la santé publique sont autorisés à poursuivre cette activité, à condition d'en faire la déclaration au représentant de l'Etat et de respecter, dans un délai fixé par décret, les conditions techniques prévues au 3° de l'article L. 712-9 dudit code" ; que ces dispositions ont été étendues aux établissements de santé privés par l'article 10 de la loi n° 91-1406 du 31 décembre 1991 portant diverses dispositions d'ordre social ; que, selon l'article 2, premier alinéa, du décret du 2 octobre 1992 déjà mentionné, "les établissements de santé publics ou privés qui comportaient des structures de soins alternatives à l'hospitalisation à la date de publication de la loi du 31 juillet 1991 modifiée susvisée, disposent d'un délai de quatre mois pour procéder, auprès du préfet de région, à la déclaration prévue à l'article 24 de cette loi. Les modalités et le contenu de cette déclaration où devront figurer notamment les informations permettant d'apprécier la consistance et l'activité de la structure de soins à la date précitée, sont définis par un arrêté du ministre chargé de la santé dont la publication fait courir le délai de quatre mois susmentionné ( ...)" ; qu'aux termes du second alinéa, première phrase, de l'article 2 du même décret : "Le préfet de région délivre un récépissé du dépôt de la déclaration, qui vaut autorisation de poursuivre l'activité pour chaque structure de soins concernée et qui en précise la capacité retenue en nombre de places" ; que l'arrêté mentionné aupremier alinéa de l'article 2 du décret du 2 octobre 1992 a été pris le 12 novembre 1992 et publié au Journal officiel de la République française le 19 novembre suivant ;
Considérant que la CLINIQUE CHIRURGICALE DU COUDON a déposé le 28 avril 1993 une demande tendant à ce que soit reconnue au sein de l'établissement la pratique d'une activité d'anesthésie ou de chirurgie ambulatoire ; que cette demande a été rejetée par une décision du préfet de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur au double motif que la demande avait été formulée après le 20 mars 1993, date d'expiration du délai de quatre mois prévu par les dispositions précitées du décret du 2 octobre 1992 et que la matérialité d'une structure spécifique de chirurgie ambulatoire au sein de l'établissement n'était pas établie ; que la clinique a contesté ce refus devant le tribunal administratif de Nice ;
Considérant que, par un premier jugement du 28 juin 1994, le tribunal a, dans le cadre des dispositions de l'article 12 de la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987, saisi le Conseil d'Etat d'une demande d'avis sur la légalité de l'arrêté susmentionné du 12 novembre 1992 ; que, par un deuxième jugement du 19 février 1996, il a rejeté la demande formée par la CLINIQUE CHIRURGICALE DU COUDON contre la décision du préfet au motif que ce dernier était tenu de refuser d'accorder le récépissé sollicité, dès lors que la déclaration avait été faite après l'expiration du délai imparti par le décret du 2 octobre 1992 ; que, saisie d'une requête contre ce jugement, la cour administrative d'appel de Marseille a, par un arrêt du 18 juin 1998, confirmé ledit jugement ;
Considérant que le jugement par lequel un tribunal administratif, sans trancher expressément aucune question de droit, décide, avant de statuer sur une requête soulevant une question de droit nouvelle, présentant une difficulté sérieuse et se posant dans de nombreux litiges, de transmettre le dossier de l'affaire au Conseil d'Etat par application de l'article 12 de la loi du 31 décembre 1987 n'est, selon les termes mêmes de la loi "susceptible d'aucun recours" ; qu'eu égard tant à son objet qu'à l'impossibilité d'en contester les énonciations, un tel jugement constitue en réalité une mesure d'administration de la justice ; qu'une telle mesure est dépourvue d'autorité de chose jugée ; que ce motif de pur droit justifie légalement l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille en ce qu'il a estimé que le tribunal administratif de Nice avait pu valablement rejeter, par son jugement du 19 février 1996, la demande dont il était saisi pour un motif distinct de celui ayant servi de fondement à la demande d'avis adressée au Conseil d'Etat en vertu de son jugement du 28 juin 1994 ;
Considérant qu'il résulte des dispositions combinées de l'article 24 de la loi du 31 juillet 1991, de l'article 10 de la loi du 31 décembre 1991 et de l'article 2 du décret du 2 octobre 1992, qu'en raison du caractère de mesure transitoire de la procédure de déclaration, le délai de quatre mois prescrit par le décret, qui a commencé à courir à compter de la publication au Journal officiel du 19 novembre 1993 de l'arrêté du 12 novembre précédent, revêt nécessairement un caractère impératif ; que, par suite, en considérant que c'était à bon droit que le préfet de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur avait refusé de donner récépissé de la déclaration de la CLINIQUE CHIRURGICALE DU COUDON, dès lors qu'il était constant que cette dernière l'avait déposée après l'expiration du délai de quatre mois susmentionné, la cour administrative d'appel de Marseille qui a souverainement estimé que le retard n'était pas imputable à l'administration, n'a pas commis d'erreur de droit ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la CLINIQUE CHIRURGICALE DU COUDON n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille ;
Sur les conclusions de la CLINIQUE CHIRURGICALE DU COUDON tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à payer à la CLINIQUE CHIRURGICALE DU COUDON la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de la CLINIQUE CHIRURGICALE DU COUDON est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la CLINIQUE CHIRURGICALE DU COUDON et au ministre de l'emploi et de la solidarité.