Vu la requête, enregistrée le 15 mars 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 22 décembre 1998 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté en date du 15 septembre 1998 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X...
Z... Xu ;
2°) de rejeter les conclusions de la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Versailles, dirigées contre ladite décision ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Gendreau-Massaloux, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mme Daussun, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière ( ...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et n'est pas contesté que M. A..., de nationalité chinoise, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 27 mai 1998, de la décision du PREFET DE POLICE en date du 18 mai 1998 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour au motif notamment des conditions frauduleuses dans lesquelles il s'était procuré des documents administratifs falsifiés ; qu'il entrait donc dans le cas visé au 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance précitée où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que si M. A... a épousé, le 25 août 1997, une compatriote, Mlle Y..., qui réside régulièrement en France et si le couple a eu un enfant le 27 septembre 1995, cette circonstance n'est pas à elle seule de nature à révéler que l'arrêté de reconduite attaqué serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation en raison des conséquences d'une gravité exceptionnelle qu'il comporterait sur la situation personnelle de l'intéressé ; qu'ainsi c'est à tort que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris s'est fondé sur ce motif pour annuler cet arrêté ;
Considérant toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... tant devant le tribunal administratif de Paris que devant le Conseil d'Etat ;
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui" ;
Considérant que si M. A... fait valoir qu'il a reconnu l'enfant de Mlle Y..., aujourd'hui son épouse, et que cet enfant est scolarisé en France, il ressort des pièces du dossier que, compte tenu des circonstances de l'espèce, notamment de la durée et des conditions de séjour de M. A... en France et des motifs susrappelés du refus d'autorisation de séjour qui lui a été opposé et en l'absence de tout élément mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'emmener sa famille avec lui en Chine, l'arrêté du PREFET DE POLICE en date du 15 septembre 1998 n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'il n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 dela convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 22 décembre 1998, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté en date du 15 septembre 1998 ordonnant la reconduite à la frontière de M. A... ;
Sur les conclusions de M. A... tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions susmentionnées font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à payer à M. A... la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 22 décembre 1998 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Paris est rejetée.
Article 3 : Les conclusions de M. A... tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à M. Din Z...
A... et au ministre de l'intérieur.