Vu la requête, enregistrée le 22 février 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Mohamed X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 21 janvier 1999 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 janvier 1999 du préfet des Alpes-Maritimes décidant sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir ladite décision ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Prada Bordenave, Maître des Requêtes,
- les conclusions de Mme Maugüé, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait" ;
Considérant que M. X..., de nationalité tunisienne, a sollicité un titre de séjour qui lui a été refusé par une décision dont il a reçu notification le 5 mars 1998 ; qu'il s'est maintenu sur le territoire plus d'un mois à compter de cette notification ; qu'ainsi, le requérant entrait dans le cas visé au 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance précitée où le représentant de l'Etat dans le département peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X... apporte une aide indispensable à son père, résidant régulier en France depuis 1964, qui est âgé et dont le grave état de santé nécessite une intervention chirurgicale ; qu'il est le seul de sa famille, restée à l'étranger, à pouvoir apporter cette aide ; que, dans les circonstances de l'espèce, l'arrêté en date du 6 janvier 1999 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a ordonné la reconduite de M. X... à la frontière porte au droit de celui-ci au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels a été pris ledit arrêté ; qu'ainsi, il a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Nice a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 6 janvier 1999 ordonnant sa reconduite à la frontière ;
Article 1er : Le jugement susvisé du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Nice en date du 21 janvier 1999 et l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 6 janvier 1999 sont annulés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Mohamed X..., au préfet des Alpes-Maritimes et au ministre de l'intérieur.