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20/09/1999 | FRANCE | N°163141

France | France, Conseil d'État, 7 / 10 ssr, 20 septembre 1999, 163141


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 28 novembre 1994 et 28 mars 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la Société lyonnaise d'études techniques et industrielles (SLETTI) dont le siège est "Le Charlemagne", 132, X... Charlemagne à Lyon (69002), représentée par ses dirigeants en exercice ; la Société lyonnaise d'études techniques et industrielles (SLETTI) demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 27 septembre 1994, par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a : - d'une part, sur renvoi après c

assation, écarté ses conclusions tendant à l'annulation du jugement du...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 28 novembre 1994 et 28 mars 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la Société lyonnaise d'études techniques et industrielles (SLETTI) dont le siège est "Le Charlemagne", 132, X... Charlemagne à Lyon (69002), représentée par ses dirigeants en exercice ; la Société lyonnaise d'études techniques et industrielles (SLETTI) demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 27 septembre 1994, par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a : - d'une part, sur renvoi après cassation, écarté ses conclusions tendant à l'annulation du jugement du 14 mai 1987 par lequel le tribunal administratif de Lyon l'a déclarée solidairement responsable avec la société Cottin-Jonneaux des désordres relevés à l'occasion d'un marché de travaux publics passé avec le centre hospitalier régional de Saint-Etienne ; - d'autre part, écarté ses conclusions d'appel tendant à l'annulation du jugement du 25 juin 1992, par lequel le tribunal administratif de Lyon l'a condamnée, solidairement avec l'entreprise Cottin-Jonneaux, à verser une somme de 3 535 962,27 F audit centre hospitalier ;
2°) d'annuler ou de réformer le jugement du 14 mai 1987 par lequel le tribunal administratif de Lyon l'a déclarée solidairement responsable des désordres ;
3°) d'annuler ou de réformer le jugement du 25 juin 1992 par lequel le tribunal administratif de Lyon l'a condamné solidairement avec la société Cottin-Jonneaux à payer au centre hospitalier régional et universitaire de Saint-Etienne la somme de 3 535 962,27 F et à supporter les frais d'expertise, ou, à titre subsidiaire de limiter le montant de l'indemnité due au centre hospitalier ;
4°) de condamner le centre hospitalier régional et universitaire de Saint-Etienne à lui verser la somme de 15 000 F sur le fondement de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Challan-Belval, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Boré, Xavier, avocat de la Société lyonnaise d'études techniques et industrielles (SLETTI) ; de la SCP Coutard, Mayer, avocat de la société Cottin-Jonneaux ; de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la S.A. entreprise générale Léon Grosse ; de la SCP Thomas-Raquin, Bénabent, avocat du Centre hospitalier régional de Saint-Etienne et de Me Boulloche, avocat de Mme Y... ;
- les conclusions de Mme Bergeal, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'à la suite des désordres constatés à l'occasion de la construction du centre hospitalier régional de Saint-Etienne, le tribunal administratif de Lyon a, par un jugement du 14 mai 1987, déclaré M. Y..., la société SLETTI et l'entreprise Cottin-Jonneaux responsables solidairement de 80 % du montant du préjudice résultant des malfaçons dans les revêtements de sols, condamné la société Entreprise générale Léon Grosse à garantir l'entreprise Cottin-Jonneaux à hauteur de 25 % des sommes qui seront mises à sa charge et a ordonné une expertise aux fins de déterminer le montant de l'indemnisation due au centre hospitalier ; que, par un arrêt du 27 juin 1990, la cour administrative d'appel de Lyon a réformé ce jugement et a, d'une part, exclu M. Y... de la responsabilité encourue envers le centre hospitalier, et, d'autre part, condamné l'entreprise Léon Grosse à garantir l'entreprise Cottin-Jonneaux de 50 % des sommes qui seront mises à la charge de cette dernière ; que, par un arrêt du 21 janvier 1994, le Conseil d'Etat a annulé l'article 2 de cet arrêt du 27 juin 1990 de la cour administrative d'appel condamnant l'entreprise Léon Grosse à garantir l'entreprise Cottin-Jonneaux, et l'article 3, en tant qu'il concerne les conclusions présentées par le bureau d'études SLETTI ; que, par un jugement du 25 juin 1992, le tribunal administratif de Lyon a, après expertise, condamné solidairement l'entreprise Cottin-Jonneaux et le bureau d'études SLETTI à payer au centre hospitalier de Saint-Etienne une somme de 3 535 962,27 F, augmentée des intérêts de droit à compter du 27 mai 1983 ; que la cour administrative d'appel de Lyon, statuant sur les appels dont elle était saisie, contre le jugement du 14 mai 1987 sur renvoi ordonné par l'arrêt du Conseil d'Etat en date du 21 janvier 1994, d'une part, contre le jugement du tribunal administratif de Lyon du 25 juin 1992, d'autre part, a, par un arrêt du 27 septembre 1994, rejeté les conclusions de la société Entreprise générale Grosse, de la société Cottin-Jonneaux et de la Société lyonnaise d'études techniques et industrielles (SLETTI) dirigées contre les jugements du tribunal administratif de Lyon ;qu'elle a également ordonné la capitalisation des intérêts et a statué sur les demandes de frais irrépétibles ; que le bureau d'études Société lyonnaise d'études techniques et industrielles (SLETTI), qui a été condamné solidairement avec la société Cottin-Jonneaux à verser au centre hospitalier une somme de 3 535 962,27 F en réparation des conséquences dommageables des malfaçons, et également à garantir l'entreprise Cottin-Jonneaux à hauteur de 7 % des condamnations prononcées à son encontre se pourvoit contre cet arrêt du 27 septembre 1994 ; que, par la voie de pourvois provoqués la société Cottin-Jonneaux, qui a été condamnée solidairement avec le bureau d'études SLETTI à réparer les conséquences dommageables des malfaçons, et la société Entreprise générale Léon Grosse, qui doit garantir à hauteur de 25 % l'entreprise Cottin-Jonneaux des condamnations prononcées contre elle, sollicitent également l'annulation de cet arrêt ;

Considérant en premier lieu qu'aux termes des stipulations de l'article 15 de la convention passée entre le centre hospitalier et le bureau d'études SLETTI, "dans le cadre des lois et règlements en vigueur à la date du présent contrat, le bureau d'études assumera vis-à-vis du maître de l'ouvrage la responsabilité des dommages de toute nature dérivant de ses seules fautes personnelles envisagées dans le cadre des missions qui lui sont confiées, sans pouvoir être tenu responsable ni personnellement ni par les effets de la solidarité, du fait de tiers autres que ses préposés" ; que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, la cour administrative d'appel de Lyon n'a pas dénaturé lesdites stipulations en jugeant que si ces stipulations faisaient obstacle à ce que soit établie entre le bureau d'études et un autre constructeur la solidarité prévue à l'article 1202 du code civil, elles ne pouvaient en revanche interdire une condamnation in solidum du bureau d'études et de cet autre constructeur, si ceux-ci étaient, du fait de leurs fautes respectives, tous les deux à l'origine des mêmes désordres ; qu'elle n'a commis aucune erreur de droit en ne prononçant pas une condamnation subsidiaire seulement ;
Considérant en deuxième lieu que c'est par une appréciation souveraine de la commune intention des parties que la cour administrative d'appel de Lyon, qui n'a pas dénaturé les stipulations de la convention passée entre le centre hospitalier et le bureau d'études, a jugé que la conception et l'exécution des travaux de la chape entraient bien dans la mission confiée au bureau d'études SLETTI par le maître d'ouvrage ;
Considérant en troisième lieu que les requérants, pour critiquer le montant de l'indemnité fixé par le tribunal administratif et confirmé par la cour administrative, contestent tant la réalité du retard qu'aurait pris le chantier que l'existence d'un lien de causalité entre ce retard et les malfaçons ; que, d'une part, la cour, qui n'a pas dénaturé les pièces du dossier et a suffisamment motivé son arrêt s'est livrée à une appréciation souveraine des faits de l'espèce en jugeant que le chantier avait pris du retard et que ce retard était à l'origine du préjudice subi par le maître d'ouvrage ; que, d'autre part, en estimant qu'il existait un lien de causalité direct et certain entre ce retard et les malfaçons elle n'a commis aucune erreur de qualification juridique ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi du bureau d'études SLETTI doit être rejeté ; qu'il en est, par suite, de même, en l'absence d'aggravation de leur situation, des pourvois provoqués de la société Cottin-Jonneaux et de la société Entreprise générale Léon Grosse qui sont irrecevables ;

Sur les conclusions du bureau d'études SLETTI tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que le centre hospitalier régional de Saint-Etienne, qui n'est pas, dans la présenteinstance, la partie perdante, soit condamné à payer au bureau d'études SLETTI la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Sur les conclusions du centre hospitalier régional de Saint-Etienne tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-I de la loi susvisée du 10 juillet 1991 et de condamner le bureau d'études SLETTI, à payer au centre hospitalier de Saint-Etienne la somme de 15 000 F qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête du bureau d'études SLETTI est rejetée.
Article 2 : Les pourvois provoqués de la société Cottin-Jonneaux et de la société Entreprise générale Léon Grosse sont rejetés.
Article 3 : Le bureau d'études SLETTI versera au centre hospitalier régional de Saint-Etienne une somme de 15 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au bureau d'études SLETTI, à la société Cottin-Jonneaux, à la société Entreprise générale Léon Grosse, aux héritiers de M. Y..., au centre hospitalier régional de Saint-Etienne et au ministre de l'emploi et de la solidarité.


Synthèse
Formation : 7 / 10 ssr
Numéro d'arrêt : 163141
Date de la décision : 20/09/1999
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours en cassation

Analyses

39-06-01-02 MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - RAPPORTS ENTRE L'ARCHITECTE, L'ENTREPRENEUR ET LE MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DES CONSTRUCTEURS A L'EGARD DU MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE CONTRACTUELLE -Existence dans la convention signée entre le maître de l'ouvrage et un bureau d'études d'une stipulation contractuelle prohibant que le bureau d'études soit tenu responsable par les effets de la solidarité - Conséquences - Impossibilité de mettre en oeuvre la solidarité prévue par l'article 1202 du code civil mais possibilité de condamnation solidaire.

39-06-01-02 Les stipulations d'une convention passée entre un centre hospitalier et un bureau d'études pour la construction de l'hôpital, selon lesquelles le bureau d'études ne pourra être tenu responsable ni personnellement ni par les effets de la solidarité du fait de tiers autres que ses préposés, font obstacle à ce que soit établie entre le bureau d'études et un autre constructeur la solidarité prévue à l'article 1202 du code civil, mais ne peuvent interdire une condamnation in solidum du bureau d'études et de cet autre constructeur, si ceux-ci sont, du fait de leurs fautes respectives, tous les deux à l'origine des mêmes désordres.


Références :

Code civil 1202
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75


Publications
Proposition de citation : CE, 20 sep. 1999, n° 163141
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Vught
Rapporteur ?: M. Challan-Belval
Rapporteur public ?: Mme Bergeal

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1999:163141.19990920
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