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17/09/1999 | FRANCE | N°201804

France | France, Conseil d'État, 2 / 6 ssr, 17 septembre 1999, 201804


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 16 novembre 1998 et 14 décembre 1998 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Annick Y..., demeurant Ferme de Rouge Maison, à Vailly-sur-Aisne (02370) ; Mme Y... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 7 octobre 1998 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a, faisant droit à la protestation formée par M. X..., annulé son élection, le 22 mars 1998, en qualité de conseiller général du canton de Vailly-sur-Aisne (Aisne) ;
2°) de rejeter la protestation de

M. X... et de valider son élection ;
3°) de condamner M. X... à lui p...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 16 novembre 1998 et 14 décembre 1998 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Annick Y..., demeurant Ferme de Rouge Maison, à Vailly-sur-Aisne (02370) ; Mme Y... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 7 octobre 1998 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a, faisant droit à la protestation formée par M. X..., annulé son élection, le 22 mars 1998, en qualité de conseiller général du canton de Vailly-sur-Aisne (Aisne) ;
2°) de rejeter la protestation de M. X... et de valider son élection ;
3°) de condamner M. X... à lui payer une somme de 15 000 F, au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code électoral ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Bordry, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de Mme Y... et de la SCP Masse-Dessen, Georges, Thouvenin, avocat de M. X...,
- les conclusions de M. Honorat, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, lors des opérations électorales qui ont été organisées le 22 mars 1998 en vue de la désignation, au second tour du scrutin, du conseiller général du canton de Vailly-sur-Aisne (Aisne), Mme Y..., qui a recueilli 2208 des 4362 suffrages exprimés, soit 54 de plus que l'autre candidat, M. X..., a été proclamée élue ; qu'elle fait appel du jugement par lequel le tribunal administratif d'Amiens, faisant droit à la protestation de M. X..., a annulé son élection ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X... a fait l'objet, pendant toute la durée de la campagne électorale, d'attaques mettant en cause sa probité ; que ces attaques, qui prenaient appui sur une condamnation pénale prononcée à son encontre quelques années plus tôt et faisaient référence à des faits bien connus des électeurs, n'étaient toutefois pas de celles auxquelles un candidat est dans l'impossibilité d'apporter des réponses utiles ; que M. X..., qui en a eu connaissance deux semaines avant le second tour de scrutin, a pu effectivement y répondre ; que, par suite et en dépit de leur caractère regrettable et de l'écart limité entre le nombre des suffrages respectivement obtenus par Mme Y... et M. X..., elles n'ont pas été de nature, dans les circonstances de l'espèce, à fausser les résultats du scrutin ; qu'ainsi, c'est à tort que, pour annuler l'élection de Mme Y..., le tribunal administratif a admis le bien fondé du grief invoqué à leur propos par M. X... au soutien de sa protestation ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres griefs soulevés par M. X... ;
Considérant que, malgré sa diffusion tardive, le tract intitulé "la gauche cantonale" n'a introduit dans le débat électoral aucun élément nouveau, de sorte que, même en l'absence de réponse de M. X..., il n'a pas été de nature à induire les électeurs en erreur et à altérer la sincérité du scrutin ;
Considérant que l'allégation selon laquelle une électrice âgée aurait subi des pressions n'est pas corroborée par les pièces du dossier ;
Considérant que les griefs ayant trait aux pressions qui auraient été exercées par le président du conseil général, ainsi qu'au dépassement par Mme Y... du plafond des dépenses de campagne, ont été présentés après l'expiration du délai de recours contentieux et ne sont, dès lors, pas recevables ;
Considérant que le fait que, contrairement aux prescriptions de l'article L. 62du code électoral, la salle de scrutin de la commune de Sancy-les-Cheminots ne comportait pas d'isoloir et que les électeurs devaient, pour mettre leur bulletin dans l'enveloppe, se rendre dans une pièce contiguë, utilisée comme bureau par le maire, ne permet pas de tenir pour établi que le secret du vote n'aurait pas été respecté, Mme Y... faisant valoir, sans être contredite, que les volets de cette pièce étaient clos le jour du scrutin et que chaque électeur en fermait la porte après y avoir pénétré seul ; que, dès lors, il n'y a pas lieu de retrancher du nombre total des suffrages recueillis par les deux candidats ceux qui ont été exprimés en faveur de l'un ou de l'autre par 49 électeurs de cette commune ;

Considérant qu'aux termes du troisième alinéa de l'article L. 62-I du code électoral : "Le vote de chaque électeur est constaté par la signature apposée en face de son nom sur la liste d'émargement" ; que le deuxième alinéa de l'article L. 64 du même code dispose que, "lorsqu'un électeur se trouve dans l'impossibilité de signer, l'émargement prévu par le troisième alinéa de l'article L. 62-I est apposé par un électeur de son choix, qui fait suivre sa signature de la mention suivante : l'électeur ne peut signer lui-même" ; qu'il résulte de l'instruction que les votes de deux électeurs ont été constatés par l'apposition d'une croix sur la liste d'émargement, en méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 64 ; que, par suite, ces deux votes doivent être déduits du nombre total des suffrages exprimés ; qu'après ce retranchement, Mme Y... conserve cependant le plus grand nombre de voix ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme Y... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a annulé son élection ;
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que Mme Y..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer à M. X... la somme qu'il demande, au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner M. X... à payer à Mme Y... la somme qu'elle demande au même titre ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif d'Amiens du 7 octobre 1998 est annulé.
Article 2 : L'élection de Mme Y... en qualité de conseiller général du canton de Vailly-sur-Aisne (Aisne) est validée.
Article 3 : La protestation de M. X... est rejetée.
Article 4 : Les conclusions présentées par M. X... et par Mme Y... au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991, sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mme Annick Y..., à M. Raymond X... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 2 / 6 ssr
Numéro d'arrêt : 201804
Date de la décision : 17/09/1999
Sens de l'arrêt : Annulation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

28-03-04-02,RJ1 ELECTIONS - ELECTIONS AU CONSEIL GENERAL - CAMPAGNE ET PROPAGANDE ELECTORALES - PROPAGANDE ELECTORALE -Attaques mettant en cause la probité d'un candidat pendant toute la durée de la campagne électorale - Faits établis et bien connus des électeurs et délai suffisant pour répliquer utilement à ces attaques - Attaques ne constituant pas une manoeuvre de nature à altérer la sincérité du scrutin (1).

28-03-04-02 Des attaques mettant en cause la probité d'un candidat pendant toute la durée de la campagne électorale ne constituent pas une manoeuvre de nature à altérer la sincérité du scrutin dès lors qu'elles font état de faits établis et bien connus des électeurs et que le candidat a disposé d'un délai suffisant pour répliquer utilement à ces attaques.


Références :

Code électoral L62, L64
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75

1.

Rappr. 1996-10-30, Elections municipales de Roissy-en-Brie, p. 423


Publications
Proposition de citation : CE, 17 sep. 1999, n° 201804
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Groux
Rapporteur ?: M. Bordry
Rapporteur public ?: M. Honorat

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1999:201804.19990917
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