Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 11 août 1998 et 11 septembre 1998 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Philippe Y..., demeurant ... ; M. Y... demande que le Conseil d'Etat :
1°/ annule le jugement en date du 26 juin 1998 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a annulé, à la demande de M. X..., son élection en qualité de conseiller général du canton de Craonne ;
2°/ rejette la protestation de M. X... ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code électoral ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administrative l'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Martin Laprade, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Odent, avocat de M. Philippe Y...,
- les conclusions de M. Hubert, Commissaire du gouvernement ;
Sur la recevabilité du grief tenant à l'inéligibilité de M. Y... :
Considérant que si M. Y..., candidat élu en qualité de conseiller général du canton de Craonne, soutient que le tribunal administratif d'Amiens aurait dû rejeter comme tardif le grief tiré de son inéligibilité du fait de ses fonctions d'assistant parlementaire, fonctions dont M. X... aurait fait état sans en tirer argument dans la protestation qu'il a formée à l'encontre de l'élection, ce grief d'ordre public devait en tout état de cause être examiné d'office par le juge dès lors que la protestation avait été enregistrée dans le délai de cinq jours fixé par l'article R. 113 du code électoral ;
Sur l'éligibilité de M. Y... :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 195 du code électoral : "Ne peuvent être élus membres du conseil général : ... 18° Les membres du cabinet du président du conseil général ..." ; qu'il est constant que M. Y... exerçait au 22 mars 1998, date de son élection, les fonctions de collaborateur de l'inter-groupe constitué par les élus de la majorité départementale, lesquelles consistaient à conseiller les élus et à participer à l'élaboration des délibérations de l'assemblée départementale ; que, parallèlement, M. Y... était assistant parlementaire du sénateur président du conseil général de l'Aisne, à l'égard duquel il était de ce fait placé dans une situation de collaboration directe ; qu'alors même que ni l'une ni l'autre de ces deux activités n'y aurait en l'espèce suffi à elle seule, leur cumul conduit à assimiler M. Y... à un "membre de cabinet du président du conseil général" au sens des dispositions précitées du code électoral ; qu'alors même qu'il n'aurait pas détenu de pouvoir de décision, il tombait sous le coup de l'inéligibilité édictée par ces dispositions ; qu'ainsi M. Y... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a annulé son élection en qualité de conseiller général du canton de Craonne à l'issue des opérations électorales qui se sont déroulées dans ce canton le 22 mars 1998 ;
Article 1er : La requête de M. Y... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Philippe Y..., à M. X... et au ministre de l'intérieur.