Vu la requête, enregistrée le 17 octobre 1996 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Alain X..., demeurant 1, square Les Cases à Le Chesnay (78150) ; M. X... demande que le Conseil d'Etat annule la décision implicite par laquelle le consul général de France à Shangaï a refusé de délivrer un visa de long séjour à sa fille adoptive, Ging Shao X... ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code civil ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative à l'entrée et au séjour des étrangers en France ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Dayan, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Combrexelle, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que, pour justifier le refus de visa opposé à Mlle Shao X... par le consul général de France à Shanghaï, le ministre des affaires étrangères, dans ses écritures devant le Conseil d'Etat, soutient que cette enfant mineure, adoptée par M. X... selon le régime de l'adoption simple, n'aurait qu'une vie familiale "fictive" avec son père adoptif, lequel réside en France ; qu'au surplus cette adoption serait sans valeur faute d'avoir respecté la procédure prévue par la législation chinoise ; qu'enfin le requérant ne subviendrait pas aux besoins financiers de l'enfant et ne justifierait pas quelles seraient les conditions de vie de celle-ci en cas de séjour en France ;
Considérant que, par jugement du 16 juin 1993, devenu définitif, le tribunal de grande instance de Versailles a prononcé l'adoption simple de Mlle Shao X..., mineure de 16 ans et de nationalité chinoise, par M. X..., son oncle, de nationalité française ;
Considérant, d'une part, qu'en vertu de l'article 365 du code civil, même en cas d'adoption simple, l'adoptant est seul investi à l'égard de l'adopté de tous les droits d'autorité parentale, dans les mêmes conditions qu'à l'égard de l'enfant légitime ; qu'il suit de là que le refus de visa à Mlle Shao X..., résidant en France alors que son père adoptif vit en France, porte par lui-même une atteinte effective au respect dû à la vie familiale tant de l'enfant que de son père ;
Considérant, d'autre part, qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des attestations de ressources fournies, que le motif tiré de ce que M. X... ne pourrait subvenir aux besoins de Mlle Shao X... repose sur une appréciation manifestement erronée ;
Considérant, enfin, que les conditions et les effets de l'adoption sont régis par la loi nationale de l'adoptant, celle de l'enfant adopté ne devant déterminer que les conditions de son consentement ou de sa représentation ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... est fondé à soutenir que le refus de visa attaqué méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et à en demander, pour ces motifs, l'annulation ;
Article 1er : La décision par laquelle le consul général de France à Shangaï a refusé le visa de long séjour demandé par Mlle Shao X... est annulée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Alain X... et au ministre des affaires étrangères.